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La bouleversante Giunia de Patricia Petibon enfin en DVD

Douze ans après ses débuts dans le rôle, le DVD immortalise enfin la bouleversante Giunia de .

Ce fut en 2005 à Vienne. Nikolaus Harnoncourt était au pupitre, et nous faisait découvrir un Lucio Silla loin des fastes historiques souvent associés au genre de l'opera seria. Dans le rôle écrasant de Giunia, fit des débuts des plus remarqués, encensés à la fois par le public et la critique. Douze ans plus tard, en septembre 2017, la production est reprise au Teatro Real de Madrid. Les décors – une sorte d'asile dégradé où Silla, atteint du syndrome borderline, règne sous les yeux vigilants du médecin sadiste Aufidio – sont toujours aussi laids, et le concept manque toujours de cohérence. La direction d'acteur, en revanche, recréée pour l'occasion par Tine Buyse, s'avère toujours des plus pertinentes : point de temps mort, même pendant les airs les plus longs, mais un jeu d'une fascinante expressivité magnifiquement mis en valeur par la réalisation de Jérémie Cuvillier.

Quant à la distribution, il n'y a qu'un maillon faible : interprétant le rôle-titre. S'il soigne scrupuleusement ses récitatifs, les airs trahissent l'usure des moyens avec quelques incursions dans l'aigu franchement pénibles. , par contre, triomphe sans peine des difficultés de l'unique air d'Aufidio. Côté femmes, , au soprano légèrement pointu, campe une Celia juvénile, traduisant à merveille la naïveté de la jeune femme. , voix plus corsée, mais aussi flexible, incarne avec verve le rebelle Cinna. Elle trouve en une partenaire à sa guise : mezzo somptueux, égal sur toute la tessiture, aux vocalises faciles et à l'aigu tranchant, la chanteuse italienne fait grosse impression en Cecilio. Tout comme , Giunia ébouriffante. Ne faisant qu'une bouchée de ses airs pourtant parsemés de difficultés, sa virtuosité n'a pourtant rien de démonstratif. Vocalises, suraigus, sons filés – tout est mis au service d'une interprétation d'une bouleversante vérité. Du très grand art !

Autre triomphateur de la soirée : . Moins excentrique qu'Harnoncourt dans le choix des tempi, il fait monter la tension sans pour autant sacrifier à une dramatisation excessive. Et les récitatifs sont détaillés de main de maître. Du grand art, là aussi.

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