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La Chapelle Harmonique dans Bach et Telemann, une belle découverte

Chœur et orchestre baroque créé en 2017, se produit aussi en quatuor. C'est dans cette configuration qu'on a pu l'entendre à l'Auditorium du Louvre, dans un programme consacré à Bach et Telemann.

Les quatre piliers de ce jeune ensemble, particulièrement attirés par l'œuvre de , ont choisi de faire alterner des sonates en trio de ce dernier avec des quatuors dits « Parisisens » de son ami . Faisant partie de la série de sonates en trio composées pour orgue, d'ordinaire jouées seul, à deux, voire à trois, la sonate BWV 525 bénéficie donc d'un service de luxe avec ces quatre interprètes, auteurs de leur propre transcription. Le clavecin de est surnuméraire, mais il apporte un soutien efficace et plutôt discret. Si la flûte traversière de manque un peu de relief dans le premier mouvement, c'est mieux dans l'Adagio, où les pizzicati à la viole de gambe et le jeu de luth au clavecin installent une atmosphère propice à l'expression de la flûte et du violon étonnant de précision et de facilité dans les mains d'. L'acoustique de l'auditorium favorise cependant un peu trop le violon, comme constaté la veille, mais on finit par s'y faire et l'Allegro conclusif, plein d'énergie et de swing, justifie à lui seul la transcription pour des instruments à son direct.

L'autre sonate choisie est écrite originellement pour instruments de dessus, mais elle pourrait être due à Carl Philipp Emanuel Bach, d'après la sonate pour violon BWV 1021 qui est bien de Johann Sebastian. Les quatre courts mouvements sont avalés avec gourmandise, non sans une certaine urgence, mais aussi avec jubilation, et sans se départir de l'exigence de précision qui semble animer l'ensemble.

Entre les deux, les quatre musiciens ont quelque peu délaissé le son droit de la musique pour orgue, pour s'épanouir dans un Concerto de Telemann issu de la première série des Quadri dits plus tard Quatuors Parisiens. Au long d'un Allegro plein de verve, d'un Affetuoso aux affects subtils et d'un Vivace au relief saillant, les quatre musiciens font admirer une science du son bien consommée et un plaisir de converser qui transportent l'auditeur (les instruments certes chantent, mais, dans cette musique, les musiciens sont en conversation). Enfin, c'est le Quatuor n° 6 de la deuxième série, particulièrement virtuose, qui ferme le concert. Là encore, la qualité du noyau dur de se vérifie. Nous avouons préférer un peu plus de retenue, à la manière de Nevermind ou des Ambassadeurs, notamment dans les curieux dialogues du Gay. Mais la célérité convient au Distrait. Et l'essentiel reste de ne pas passer à côté du long Modéré final (sans doute l'un des morceaux les plus extraordinaires dans la musique de chambre de Telemann) : les accents dramatiques, les diversions apaisantes, les motifs ressassés et tordus à la manière de Bach, tout cela est parfaitement rendu et l'investissement des quatre musiciens jusqu'à la résolution finale rend ce sommet du concert très prenant.

Un élément étranger au programme apporte cependant un brin d'inattendu dans cette prestation : les frettes réticentes du violiste , excellent tout du long, l'obligent à des ajustements entre les mouvements et privent l'auditeur de certains enchaînements attendus. Autre élément propre à aiguiser la curiosité : deux fugues de Telemann transcrites et jouées avant les quatuors. Contemplatives et apaisées, elles nous propulsent des salons de la bonne société dans une froide église d'Allemagne du nord, et contribuent à faire de ce concert un moment vraiment baroque.

Crédit photographique : © Antonin Amy-Menichetti

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