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Fabio Biondi et l’OCP sur le terrain du baroque français

C'est un programme de baroque français tardif que l' proposait, sous l'archet expert de .

Parmi les orchestres permanents d'Île-de-France, l'OCP est sans doute celui qui s'aventure le plus souvent hors de son répertoire naturel : musique indienne, concerts-lecture pour enfants, comédie musicale… sans oublier bien sûr la musique baroque. La collaboration avec n'est pas nouvelle, et si elle a pu ne pas toujours convaincre, il semble que les efforts du violoniste et chef italien portent aujourd'hui leurs fruits. S'il n'obtiendra jamais des instruments modernes un son conforme à celui auquel les meilleurs orchestres baroques nous ont habitués, il faut reconnaître que l'impression de décalage est bien atténuée par les techniques de jeu (notes inégales, ornementation, dynamique du son…) et la netteté des intentions. Le positionnement de en maître de concert, partageant le jeu des premiers violons et dirigeant de l'archet quand sa partie est muette ou quand cela est nécessaire, n'y est sans doute pas étranger. Résultat : on ressent chez les musiciens le souci de l'écoute et le plaisir de jouer ensemble. En définitive, l'autre grande différence avec un orchestre baroque concerne alors l'équilibre des voix : on a beau avoir affaire à un orchestre de chambre, les vents, classiquement distribués par deux, le théorbe et le clavecin s'entendent moins face aux 14 violons, 6 altos, 5 violoncelles et 3 contrebasses.

Le style français hérité de Lully est parfaitement maîtrisé dans la suite d'orchestre du ballet comique Don Quichotte chez la duchesse. L'humour et les procédés théâtraux qui font le sel de l'œuvre de Boismortier sont bien soulignés. Énergique voire trépidante, cette musique est profondément réjouissante jouée par ces musiciens qui savent profiter de leur effet de masse sans en abuser. La puissance de l'ensemble est encore plus intéressante dans une forme concertante, en opposition avec les passages solistes. C'est le cas dans le concerto de , et particulièrement dans l'Adagio central où des tutti très pointés alternent avec des soli très chantants, seulement accompagnés à la basse continue. Dans les deux mouvements rapides, on admire le jeu pas toujours millimétrique mais ô combien vivant de Fabio Biondi qui épouse la fougue toute italienne de la partition.

Enfin, en deuxième partie, la suite d'orchestre des Boréades permet de savourer vingt minutes orchestrales d'une œuvre de deux heures et demie, qui, écrite en 1763, est la dernière de . D'aucuns la présentent d'ailleurs comme la dernière manifestation du baroque français en musique. L'apport de deux cors naturels et de deux clarinettes rééquilibre un peu le son en faveur des vents. Davantage que dans la première partie, Fabio Biondi quitte régulièrement son violon pour diriger de l'archet, car si la beauté de la musique est évidente au public, elle demande beaucoup d'application de la part des musiciens. Ceux-ci sont particulièrement inspirés dans l'Ouverture et dans le magnifique air d'entrée de l'acte IV suivi de sa contredanse. Quand le dernier accord du rappel résonne, on ne peut s'empêcher de reconnaître que Fabio Biondi a réussi à créer l'illusion, le temps de cette belle soirée, que l' est devenu un ensemble baroque.

Crédit photographique : Fabio Biondi © James Rajotte

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