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Kullervo somptueux par Thomas Dausgaard et ses troupes à Glasgow

et son  signent avec Kullervo un premier disque Sibelius, relevant le défi d'une discographie très relevée. 

Si abandonna sa symphonie Kullervo après le succès éclatant de sa création le 28 avril 1892 à Helsinki, la postérité l'a heureusement requalifiée et réhabilitée au rang de premier chef-d'œuvre orchestral du futur grand maître de la symphonie du XXe siècle.

Kullervo, personnage mythique du Kalevala, l'épopée populaire finlandaise, inspira ce premier opus majeur qui sera suivi d'autres réussites mémorables stimulées par ce thème vecteur du nationalisme et de l'opposition à la Russie impérialiste et dominatrice. Conçu pour soprano et baryton solistes, chœur d'hommes et orchestre, Kullervo débute par une introduction orchestrale (Allegro moderato), présentation du héros avec son thème sombre que l'on retrouvera tel un leitmotiv. Les quatre autres mouvements solidement charpentés, dramatiques et originaux, décrivent successivement l'histoire du jeune homme tempétueux à travers ses premières années sous les traits d'une berceuse (La jeunesse de Kullervo, Grave), la rencontre et le viol, centre pathétique de la partition (Kullervo et sa sœur, Allegro vivace), son départ au combat (Kullervo part à la guerre, Andante) avec ses passages farouches et enfin l'épisode presque obsessionnel qui mène à sa fin (Le mort de Kullervo, Andante). L'implication musicale du compositeur fut aussi un acte éminemment politique qui le propulsa pour longtemps comme tête de file de la libération nationale en adoptant la langue finnoise, celle du peuple, lui qui pratiquait le Suédois, réservé à l'élite intellectuelle et économique.

Cet opus 7, conçu à Vienne où il étudiait, doit partiellement au Tristan et Isolde de Richard Wagner et à la Symphonie n° 3 d'Anton Bruckner. Ces influences et d'autres encore ne barrent pas la route au chef-d'œuvre avec son écriture maîtrisée et volontaire, son récit implacable, ses dynamiques époustouflantes, son langage inconnu dans le Norden. Les épisodes douloureux, merveilleusement rendus et impressionnants de douceur et de déréliction, contrastent avec les élans épiques incontrôlables entraînant avec leurs rythmes incoercibles. La discographie, d'une qualité éclatante n'a pas oublié les réalisations admirables de Paavo Berglund (EMI), Osmo Vänskä (BIS), Neeme Järvi (BIS), Paavo Järvi (Virgin), Ari Rasilainen (CPO), Jorma Panula (Naxos), Esa-Pekka Salonen (Sony).

Le chef danois et son Orchestre symphonique de la BBC écossaise, dans leur meilleur jour avec leur phrasé rigoureux, leur poésie scintillante et pathétique, ne ménagent guère le registre émotionnel que contribuent à intensifier les deux solistes exceptionnels  et et le chœur inoubliable (mouvements 3 et 5). Tous nous captivent tout au long de l'aventure. Qu'on ne s'y trompe pas, ils sont dignes de figurer à l'apogée de l'histoire de l'enregistrement de Kullervo.

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