- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Les deux voies d’excellence de la danse française

En un week-end, il a été possible d'admirer deux voies différentes et complémentaires de l'école de danse française. Le Conservatoire national supérieur de danse de Paris dans x 100 à La Villette et les Démonstrations de l'école de danse de l'Opéra national de Paris au Palais Garnier.

x 100 par le CNSMDP à La Villette

Dans la foulée de l'Event qui avait réuni en 2019 cent jeunes interprètes à l'occasion du centenaire de Merce Cunningham, le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris renouvelle l'événement XXL à la Grande Halle de La Villette autour du répertoire de . Quelle belle idée de remonter avec ces jeunes danseurs une combinaison inédites d'extraits puisés dans un répertoire d'une centaine de pièces de la chorégraphe américaine, pionnière de la post modern dance à la Judson Church, à New-York dans les années 70 ! Parmi les Early Pieces, les Sticks 1 et 2, pièces réalisées avec des tasseaux que les danseurs doivent réussir à faire tenir bout à bout, nécessitent patience, coordination, adresse et habilité, et maîtrise de l'anglais. Ici pas de cours, de filles, de garçons, ni de divisions. Les cent jeunes danseurs sont mélangés et participent à l'événement, quel que soit leur âge.

Les séquences s'enchaînent dans le silence ou au rythme du métronome, jusqu'à ce que l'on entende dans le lointain un big band joué par les élèves musiciens, qui fait le tour des coulisses en restant invisible comme dans Foray Forêt, une pièce créée par la chorégraphe en 1990. La mise en espace, sur l'immense plateau de La Villette, le mélange des âges et des niveaux, la dramaturgie même de l'Event sont passionnants. Il n'y a aucun temps mort, une grande fluidité entre les séquences. Jusqu'à distinguer quelques solistes dont la souplesse, la qualité de mouvement n'a rien à envier aux danseurs professionnels. Difficile de deviner de quelles pièces sont extraites ces séquences, sans le repère de la scénographie ou des costumes, qui étaient souvent signées d'artistes illustres comme Robert Rauschenberg. L'écriture devient plus complexe, plus tonique avec l'accompagnement musical. Ce merveilleux exercice de transmission d'une technique et d'une esthétique devient alors par la magie du nombre un spectacle.

Démonstrations de l'École de danse de l'Opéra de Paris à Garnier

Pas de spectacle, mais les traditionnelles Démonstrations des élèves de l'école de danse à l'Opéra Garnier, de retour après deux années d'interruption pour cause de grève, puis de Covid. Ici, la répartition entre filles et garçons et la progression par division est bien visible et rythme le déroulé de l'après-midi. Qui commence par la troisième division garçons. Exercices de dégagés, tours, petite batterie, grand saut et final, le cours au milieu se déroule à un rythme rapide. Le professeur, Christophe Duquenne, très didactique, insiste beaucoup sur la tenue du dos et la ligne des épaules. Pour la troisième division filles, propose un exercice de relevés sur pointes au milieu, deux tours en dehors et en dedans, et une petite batterie, le tout au rythme soutenu d'un ragtime. La professeure insiste sur le fait de monter la taille et de baisser les épaules.

Cela se complique dans la deuxième division garçons avec des tours et des relevés bien sûr, mais également des pirouettes attitude inspirées de Napoli de Bournonville qui fait partie du répertoire de l'école, dont le travail des sauts sans l'aide des bras, mais avec les épaulements, permet aux élèves d'acquérir de la force, selon , professeur de cette division. On constate à ce niveau que les classes de garçons sont plus spectaculaires que celle des filles, qui hésitent à saluer collectivement et à se faire applaudir. Dans la deuxième division filles, Gershwin inspire les exercices de dégagés et de relevés rapides sur pointes. Dans l'adage plus lyrique, les danseuses sont invitées par leur enseignante Fabienne Cerutti à respirer et à sourire.

La première division est la classe d'engagement qui, en vertu d'une nouvelle tradition, porte cette année le nom de Patrick Dupond. Premiers manèges sur la pente de l'Opéra Garnier, premiers sauts de basque, la classe des garçons dont le professeur est , montre l'aboutissement du travail de bas de jambes et de tenue du haut du corps typique de l'école française. Légèreté et gainage sont la clé de la rapidité de ces jeunes danseurs. Comme de tradition, l'adage de la classe de première division filles a été créé par . Leur professeur perpétue cette belle entrée en matière et la fait suivre par des relevés sur une jambe à un rythme rapide, un exercice signé , ancienne directrice de l'école. Cette année, des pirouettes, rien que des pirouettes et une série de fouettés arabesques, pour finir en légèreté après la traditionnelle variation.

Dans le cours de danse de caractère, les troisièmes divisions filles et garçons s'entraînent à manipuler l'éventail dans un salut espagnol puis s'élancent dans une tarentelle, la danse italienne qui met en valeur leur vivacité, leur légèreté et leur joie de vivre. Pour finir, une suite russe avec des pas marchés, des ficelles et un certain nombre de pas complexes qui marquent une progression par rapport à l'enseignement reçu en quatrième division. Les démonstrations s'achèvent avec la classe d'adage qui réunit première division garçons et première division filles sous la houlette de . Encore une première, avec les premiers portés à bout de bras ou les portés lancés. Dans cette classe, il s'agit d'apprendre à danser ensemble, à se rattraper. À la fin de l'année scolaire, ils seront de jeunes professionnels, prêts à entrer dans le corps de ballet de l'Opéra de Paris ou dans une autre compagnie de ballet.

Crédits photographiques : © Svetlana Loboff pour l'Opéra national de Paris

(Visited 2 036 times, 1 visits today)