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Archaïsme et conte de fées avec Oberon par Gardiner

Ultime partition de , fruit d'une commande du Covent Garden de Londres, qui en donna la création le 12 avril 1826, situé à mi-chemin du Singspiel et du drame wagnérien alors en devenir, Oberon n'est pas vraiment représentatif de l'évolution de la pensée de son auteur, qui, avec Euryanthe composé trois ans plus tôt, montrait sa volonté de se tourner vers le drame lyrique avec récitatif continu, concept perdu depuis Le Couronnement de Poppée de Monteverdi.

Mais, écrit pour Londres sur un texte en anglais, Oberon était envisagé dès sa conception pour être remanié en vue de représentations ultérieures dans les théâtres allemands. Mais, en raison de la mort prématurée de son auteur, plus encore que Der Freischütz, Oberon a eu à souffrir d'adaptations qui brouillent aujourd'hui encore les pistes. La forme originelle de l'ouvrage est elle-même fort alambiquée, le librettiste, Planché, s'étant inspiré de Christoph Martin Wieland d'après une traduction anglaise de William Sotheby. Le livret mêle la féerie shakespearienne avec références explicites au Songe d'une nuit d'été et à La Tempête, alors que l'Oberon de Wieland (1780) est issu de la geste médiévale du chevalier Huon de Bordeaux au XIIIe siècle. Peu présent à la scène, l'ouvrage de Weber est pourtant gorgé de musique splendide, que seules les versions concertantes permettent d'écouter de temps à autre.

Sir a choisi de donner à Paris l'original anglais d'Oberon dans une version semi-scénique avec « mise en espace » que le chef britannique a lui-même réalisée dans une scénographie quasi similaire à celle qu'il avait utilisée la saison dernière dans sa réalisation du Falstaff de Verdi en ce même Théâtre du Châtelet. Avec le comédien de la Royal Shakespeare Company Roger Allam, il a conçu une relecture distanciée, parodique, animée par un récitant, Allam lui-même, remarquable, qui, tenant tous les rôles parlés à la fois, ne manque ni d'humour ni de grâce, mais tend à occulter l'onirisme de l'œuvre. En fait, ce sont principalement les costumes kitsch et l'absence de direction d'acteur qui rendent le spectacle visuellement assez pauvre. Côté musique, c'est le bonheur quasi total. L', avec ses cuivres naturels exceptionnels d'assurance (la flûte solo était hélas moins en verve), et le somptueux sont proprement avivés par un qui sait enflammer cette partition parfois hétéroclite mais souvent remarquable et délicieuse. La distribution est pleinement en phase avec le chef-scénographe, bien que l'on eut préféré un Huon de Bordeaux à la voix plus égale et au timbre plus séduisant que celui de Charles Workman, néanmoins virtuose. Les airs brillants de Reiza sont défendus avec assurance par Hillevi Martinpelto, tandis que campe un Oberon juvénile et énergique à souhait. , au timbre chaud est fruité, est une Fatima rayonnante et constitue indubitablement la révélation de la soirée.

Crédit photographique : © EMI/Sheila Rock

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