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M22 : Così fan tutte

L'édition 2006 du Salzburger Festspiele présentait un ambitieux projet : donner toutes les œuvres scéniques de Mozart, pour l'année anniversaire de la naissance du compositeur. Et l'une des soirées majeures du festival avec les Nozze di Figaro et un Idomeneo exceptionnel aura été la production de Così fan tutte.

Il est vrai que la vision de Karl-Ernst et ne peut guère laisser indifférent. Le parti pris est simple : puisqu'il n'est guère vraisemblable que les deux jeunes filles ne reconnaissent pas leurs fiancés déguisés en Albanais, cette production, qui a connu déjà plusieurs reprises, laisse entendre qu'elles sont au courant de la duperie. Ainsi, dès le « Una donna a quindici anni », Fiordiligi et Dorabella se montrent bien plus complices de Despina que prudes jeunes filles choquées par ses méthodes, et on les voit plutôt ses acolytes et élèves douées. Le dispositif, d'une crédibilité toute relative, tend à s'amenuiser au cours de l'opéra. Mais il serait bien difficile de rester insensible à cette superbe scénographie. Tout, des coloris bleus-gris au grand plateau vide qui met en valeur le nombre restreint de personnage, du continuo sur scène qui semble posé là, en apesanteur et sans choquer, aux choristes masqués, tout concourt à créer une délicieuse atmosphère de conte et des scènes à l'esthétique élégante. Et quelque discutables que soient parfois les choix de mise en scène, rarement l'on aura été aussi près du conte philosophique qu'est par certains côtés Così, avec le personnage de Don Alfonso comme figure du philosophe éclairé. Une mise en scène que l'on ne détaillera pas plus, ayant déjà été évoquée par notre collaborateur Richard Letawe. La photographie est de haute qualité malgré quelques gros plans peu flatteurs pour les chanteuses.

montre parfois en Fiordiligi une prononciation dure mais solide, son chant est bien mené et sensible et les difficiles aigus du rôle sont fort habilement négociés. n'a pas de mal à imposer une Dorabella idéale, au timbre chaud et séduisant. Interprète que l'on a l'habitude de rencontrer en Ferrando, s'améliore nettement au fil de ses reprises du rôle. Son émission est désormais plus franche, et son « Aura amorosa » aérienne fait preuve d'autant de finesse que de musicalité. , qui lui aussi enchaîne les reprises du rôle de Guglielmo sur les plus grandes scènes internationales, maîtrise parfaitement son rôle dont il est l'un des titulaires idéaux. Tous deux immortalisent pour la deuxième fois leur interprétation après la parution en DVD de la production désormais classique de Patrice Chéreau. Le personnage bouffe de Despina est idéalement servi par . La voix est superbement conservée et l'interprétation truculente fait merveille grâce à la gestuelle comique que lui réservait la mise en scène. ne trouve pas tout de suite son autorité et manque parfois d'éclat mais sa présence diabolique domine vite l'intrigue. On admire surtout le résultat d'ensemble plus que la virtuosité individuelle : la troupe est homogène, les duos des deux sœurs et le final du I sont somptueux. Le plateau prestigieux ne serait rien sans la virtuosité de  : le chef crée un son plein, équilibré et s'autorise des tempi lents bienvenus et pleins de signification.

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