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Dame de Pique : Peter Stein joue les mêmes cartes

Dernier spectacle lyonnais de cette trilogie de Tchaïkovski consacrée au théâtre de Pouchkine, cette Dame de Pique est la reprise de la production de janvier 2008.

Malgré une critique déjà sévère, comme pour les précédents spectacles, joue les mêmes cartes. Il se contente d'un copier-coller de sa mise en scène antérieure sans y apporter d'autre amélioration que de supprimer quelques-unes des scènes qui avaient alors suscité quelques remous dans le public. Comme la statue de la Grande Catherine II de Russie remplacée par l'arrivée de son portrait géant. On change un cheval borgne contre un aveugle. Les scènes de peinent à raconter le basculement de l'intrigue entre la fiction et la réalité. Le passage trop flou d'un état à l'autre mène le spectateur dans une confusion dérangeante.

Si les costumes restent riches, les décors dont la plaquette du programme nous informe que ceux «de la création de La Dame de Pique rendus inutilisables par un incident d'amiante…n'ont pu être reconstruits» ont été renouvelés dans l'urgence. Certains sont devenus caricaturaux, voir inadaptés.

Du côté des chanteurs, quelques artistes déjà croisés dans les deux précédentes productions de ce Festival Pouchkine se retrouvent dans cet opéra. Ainsi (Tomski) apparaît mieux intégré dans cette intrigue que dans Mazeppa, même s'il reste très cabotin. De même, la soprano (Lisa) est plus à l'aise ici que dans le rôle de Maria dans Mazeppa. Elle reste pourtant habitée d'une trop grande froideur pour nous convaincre de son amour pour Hermann alors qu'avec «Ouch polnotch blizitsa» (Il est bientôt minuit), elle chante l'un des plus beaux airs du répertoire lyrique. Le ténor (Hermann) déçoit. Chantant tout en force, il se retrouve souvent aux limites de la justesse. De plus, l'uniformité de son chant ne laisse pas transparaître les divers aspects de son personnage. Si théâtralement, il «tient» la scène, vocalement on ne perçoit pas de différences entre son amour de Lisa et celui du jeu. La noblesse du chant de l'Onéguine lyonnais du jour précédent fait d'Alexei Markov un Eletski tout désigné.

Comme il y a deux ans, on retrouve avec (La Comtesse) la magnifique interprétation d'un rôle souvent offert à des «vieilles gloires» de l'art lyrique. Dommage parce qu'avec la jeunesse de la voix de la mezzo russe, cette partie de la partition de Tchaïkovski, prend une toute autre couleur que ce qu'on entend d'habitude dans ces pages. Comme il y deux ans, lorsqu'affalée dans un fauteuil garni d'édredons, entourée de sa dizaine de suivantes prévenant le moindre mouvement de son humeur excédée, elle chante son souvenir de heures parisiennes passées, son Je crains de lui parler la nuit à peine sussuré, restera l'un des moments les plus émouvants de la soirée.

Si généralement la scène déçoit par son évident manque d'inventivité théâtrale, dans la fosse, le chef russe est en grande forme. Il emmène son Orchestre de l'Opéra de Lyon dans une coloration musicale qu'on ne lui avait jamais connu depuis le début du Festival. Avec l'orchestre, le Chœur de l'Opéra de Lyon s'affirme lui aussi dans l'excellence. Et une mention toute spéciale à la Maîtrise dont l'entrée en scène en tout début de l'opéra reste un moment de fraicheur magnifique.

Crédit photographique : (Lisa), (Eletski) ; (La Comtesse) © Stofleth

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