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A Londres, Agneta Eichenholz s’impose en grande Lulu

Toute production de Lulu reste un événement car, en dépit de la place de cet opéra dans l'Histoire de la musique, cette œuvre n'est pas si fréquente au répertoire des saisons d'opéras.

Outre la difficulté vertigineuse des aigus et de l'endurance du rôle titre, la distribution à réunir ne doit comporter aucunes faiblesses et l'orchestre de Berg soumet les musiciens à des exigences redoutables. Il faut des chanteurs de génie, un chef au bras solide et aussi un metteur en scène capable de démêler les fils du livret. A regarder la pochette de ce DVD, l'équipe réunie par le Royal Opera House de Londres, s'annonçait prometteuse ! Elle s'acquitte, haut la main, de sa tâche !

Le metteur en scène est un scénographe prolixe et hyperactif. Son esthétique se fond souvent dans un espace scénique épuré au maximum avec une utilisation des costumes contemporains. L'équipe scénique ne déroge pas à cette règle et réduit les accessoires au strict minimum. L'action est contemporaine avec des costumes sombre et bien taillés tirés du quotidien business et jet-set pour les hommes et des robes et tailleurs noirs pour les femmes. La force du metteur en scène est d'imposer une lecture claire des relations entre les personnages tandis que l'abstraction scénique renforce les liens entre les protagonistes du drame. La scène ressemble alors à un bocal remplit, à ras bords, de passions et de haines. La camera de Robin Lough se concentre au maximum sur les élans et la rages des personnages, donnant au drame un aspect hyperréaliste et glaçant.

s'impose comme l'une des grandes Lulu du moment. Le timbre est radieux et la voix légère se joue des pièges stratosphériques du rôle. Dotée d'une présence scénique irradiante, l'artiste campe, en beauté froide et intrigante, toutes les facettes de Lulu, évoluant entre la fragilité, la passion, la haine… prête son timbre radieux à Alwa alors que l'on retrouve dans le rôle du docteur Schön. La voix puissante et l'engagement scénique total du chanteur éclairent le rôle central du docteur. Plutôt inattendue en Gerschwitz, , ancienne reine du bel-canto, impose pourtant un chant séduisant et corsé. Le reste du plateau est à l'unisson avec des incarnations parfaites de Will Hartmann, ou .

Dans la fosse, propose une lecture parfaite dans sa fluidité, sa solidité dramatique et sa précision. Le chef fait de l'orchestre un félin qui serpente entre les personnages, déployant les sortilèges de la séduction ou explosant les tumultes sentimentaux. C'est un Berg plutôt d'esthète cultivé que d'analyste façon Boulez ou de minéralité façon Dohnanyi.

En DVD, cette Lulu s'impose comme le premier choix, par son fini musical et technique. On cite tout de même l'autre (et unique) grande version filmée : celle du festival de Glyndebourne 1996 avec dans le rôle titre (NVC/Warner).

 

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