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Mireille Delunsch signe sa première mise en scène à Bordeaux

Pour le cinquantenaire du décès de (qui a eu lieu très exactement le 30 janvier dernier) l'Opéra national de Bordeaux a décidé de monter les fameux Dialogues des carmélites en proposant à la soprano – qui fut dans un passé récent Blanche et Madame Lidoine – de signer sa première mise en scène.

La vision de reste traditionnelle, nous sommes bien dans un couvent pendant la Révolution française. L'action reste plutôt statique, de bonnes idées sont mises à l'oeuvre (Madame de Croissy avant de mourir serre Blanche dans ses bras un peu trop affectueusement, provoquant la colère justifiée de Mère Marie, Blanche devant le catafalque de la Prieure est effrayée par sa propre ombre devenue démesurée, …) parfois polluées par des détails inutiles (pendant l'entretient entre Blanche et son frère une petite fille joue à la marelle et Mère Marie, présente par obligation, fait du tricot), des incongruités (Mère Marie défroquée a une chevelure d'une malade atteinte du cancer en chimiothérapie) ou des déplacements injustifiés. Les relations entre les personnages, si importantes, sont parfois peu approfondies, comme la rivalité entre Mère Marie et la nouvelle Prieure. Toutefois les scènes s'enchaînent les unes aux autres par d'astucieux changements, sans temps mort, le tout rehaussé par la scénographie de et les excellents jeux de lumières de Dominique Borrini.

Coté féminin la distribution est cohérente. , et Sylvie Brunet sont des habituées de longue date des rôles tenus, qu'elles abordent toutes les trois avec le style adéquat et une diction parfaite. , qui faisait une prise de rôle, accuse parfois un vibrato trop excessif. , après son triomphe newyorkais dans La Clemenza di Tito, confirme son immense talent de mezzo-soprano et on ne peut regretter que ses engagements en France ne se limitent guère qu'à Bordeaux.

Coté masculin en revanche… à la notable exception d'Eric Huchet – enfin un Père confesseur en pleine voix, et non confié à un ténor en bout de course – aucun de ces messieurs, pourtant tous en rôles de comprimarii, ne rendent justice à la partition. accuse de nombreux soucis de justesse et coince avec les aigus, , malgré une prononciation claire, reste peu sonore. Mis à part Frédéric Goncalves, les autres barytons qui assurent les différents seconds rôles ne sont pas à la hauteur. Malgré la brièveté des répliques ce ne sont pas non plus des silhouettes et on aurait aimé un chant un peu plus soigné.

Mais peut-être que tous ces défauts auraient pu être atténués par une direction orchestrale plus claire et moins tonitruante. dirige à l'emporte-pièce, sans aucune nuance, obligeant les chanteurs à un fortissimo permanent. L'orchestre, bizarrement disposé dans la fosse, est livré à lui-même, les décalages fusent, les cuivres sont systématiquement surexposés, le son des cordes est terne, la justesse systématiquement approximative. Le tout dans une lecture – si on peut encore appeler une telle exécution par ce terme – au premier degré, sans profondeur, sans unité, totalement hors style. Le Poulenc du Dialogues n'est pas celui des Biches.

Cette production sera reprise prochainement à Angers-Nantes Opéras. Gageons qu'un plus du réglage de certains détails de la mise en scène, le chef d'orchestre sera remplacé.

Crédit photographique : (Blanche de la Force) © Frédéric Desmesure

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