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Hänsel und Gretel à Nancy : confiseries de Noël

Dans la mise en scène contemporaine mais néanmoins poétique d' et avec une distribution parfaitement appariée et de grand talent, l'Opéra national de Lorraine propose un idéal spectacle de Noël pour petits et grands.

Pilier du répertoire des fêtes de fin d'année dans les opéras allemands, Hänsel und Gretel est beaucoup moins présent de ce côté-ci du Rhin. Pourtant, l'unique opéra d' passé à la postérité ne manque pas de qualités : une fidélité au conte originel des frères Grimm et au merveilleux comme au questionnement métaphysique consubstantiels du genre, un symphonisme généreux jusque dans des intermèdes orchestraux très développés, un usage quasi wagnérien des leitmotive et quelques morceaux de bravoure qui ont fait beaucoup pour la notoriété de l'ouvrage.

Pour sa mise en scène, créée en 2015 pour Angers Nantes Opéra, a su éviter l'imagerie trop traditionnelle sans tomber dans la lourdeur démonstrative d'une interprétation psychanalytique. Son fil directeur à elle, c'est la nourriture, la faim qui tenaille, la tentation irrésistible des victuailles offertes à la vue, la satisfaction de manger au risque d'être soi-même mangé. Le point de départ est d'un réalisme cru ; Hansel et Gretel ainsi que leurs parents sont des SDF, vivant dans la rue parmi un amoncellement de poubelles. Point de misérabilisme cependant mais une claire mise en évidence de leur détresse et de leur désespoir. Avec le second acte dans une forêt faite de lampadaires à néon, poésie et féerie s'immiscent progressivement. Des chats et des souris bienveillants font leur apparition, envahissent la salle et aident Gretel à atteindre des pommes géantes surgies des cintres par magie. Au troisième acte, dans sa pâtisserie toute rose, la sorcière est plus grotesque qu'effrayante avec ses allures de Barbara Cartland et s'en débarrasser ne sera qu'une formalité. Les très jolis décors de Barbara de Limburg, les lumières évocatrices de François Thouret, le réglage impeccable des mouvements scéniques, tout concourt à un spectacle parfaitement réussi, où l'on retrouve avec délices son âme d'enfant.

Hansel et Gretel se complètent et s'assortissent avec bonheur. À Gretel (), la clarté et la fraîcheur d'un soprano aux aigus cristallins et les joies toute simples d'une petite fille qui aime chanter, jouer, danser. Plus sombre et introverti, Hansel bénéficie du timbre mordoré et de la fougue de , qui joue à la perfection le préadolescent boudeur et chamailleur. Dans le rôle du Père, impressionne dès ses « Rallalala » d'entrée par son timbre clair de baryton à l'aigu facile et par sa puissance. La Mère de n'est pas en reste par son intensité et parvient à rendre palpable la détresse de cette femme aux abois. En sorcière, est conforme à la tradition de distribuer le personnage à une chanteuse habituée aux rôles dits « de caractère » : voix parfois ingrate mais extraordinaire présence scénique. Il faut la voir jouer les vamps hollywoodiennes sur le retour, et avec quelle délectation et quel sens de l'humour ! Enfin, campe un Marchand de sable fort poétique mais paraît plus transparente et moins concernée dans le court rôle de la Fée Rosée.

Contribution essentielle à l'apothéose finale, le Chœur d'enfants du Conservatoire régional du Grand Nancy se révèle précis, juste et impliqué. C'est dans les textures diaphanes du rêve ou de la nuit que l' se montre le plus convaincant. Dans les climax orchestraux, la sonorité devient compacte et l'orchestre perd quelque peu en homogénéité, en puissance et en cohérence. Déjà présent à Nantes, ne ménage pourtant pas ses efforts et ses injonctions et parvient à maintenir une impeccable cohésion entre fosse et plateau.

Crédit photographique : (Hänsel), (Gretel) © Opéra national de Lorraine

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