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Nancy : Retour de L’Italienne à Alger selon David Hermann

En reprenant L'Italienne à Alger dans la mise en scène inventive et très réussie de , mais avec une distribution entièrement nouvelle, l'Opéra national de Lorraine conclut sa saison avec légèreté et humour, mais non sans qualité musicale.

Lors de sa création en 2012, nous avions exprimé combien le travail de nous était apparu créatif, original et convaincant. Sans y revenir en détail, cette transposition dans la jungle après un crash d'avion et son abondance de gags aéronautiques colle en effet parfaitement avec la fantaisie et le délire de la partition de Rossini. Déjà repris en début de saison à Montpellier, le spectacle fonctionne toujours impeccablement et réjouit le public. Toutefois, en ce soir de première, la nouvelle distribution a paru quelquefois plus empruntée, moins à l'aise dans les nombreuses indications scéniques et dans des gags moins parfaitement réglés. Peut-être a-t-il eu moins de temps pour travailler avec ses nouveaux chanteurs, qui devraient, gageons-le, parvenir à plus de fluidité et de naturel lors des représentation suivantes, lorsqu'ils se seront complètement approprié cette mise en scène exigeante.

Avec ses graves plantureux, le délié de ses vocalises, son goût dans les variations, est une splendide Isabella à l'abattage scénique idoine. Prise dans un tempo très retenu, sa cavatine « Per lui che adoro » est un pur moment de grâce et de séduction vocales par la perfection du legato et de la mezza voce. assure un Lindoro de grand style, variant les reprises et la dynamique, en dépit d'une projection plus confidentielle dans le médium et les ensembles, et d'une relative avarice en suraigus. En Mustafà, est parfait de présence scénique et de précision dans les ensembles. Moins autoritaire dans ses deux grands airs, il y montre ses limites avec des prises de respiration intempestives et une vocalisation plus laborieuse. Sonore, mais peu « chantant », usant de parlando, brutalisant souvent son émission, n'est pas exempt de défauts vocaux. Mais son Taddeo emporte néanmoins l'adhésion par ses dons de comédien et son engagement, dans un rôle où ces qualités sont justement primordiales. Avec des aigus tonitruants, attire l'attention en Elvira tout comme en Zulma par la somptuosité de sa pâte vocale. Jeu outré et émission vocale en force, déçoit en Haly. Quoi qu'il en soit, tous semblent prendre un plaisir extrême et s'amuser follement dans cette mise en scène, comme le démontre un incident avec une perruque récalcitrante qui déclenche le fou rire de et d' et les empêche de terminer leur duo, sous les applaudissements du public, ravi de tant de spontanéité.

À la tête de l', qui se montre très réactif et impliqué et fait preuve d'une séduisante vivacité, confirme ses affinités avec la musique de Rossini. Ce grand habitué de l'Opéra de Nantes ne ménage pas ses efforts et ses injonctions pour, dans des tempos très tranchés, assurer l'allant et le soupçon de folie qui conviennent, tout en tentant de maintenir la précision rythmique parfois menacée par le choix de cadences ultra rapides. Mention spéciale pour le Chœur des hommes de l'Opéra national de Lorraine dont la douceur dans les pianissimos comme la plénitude dans les forte sont remarquables de qualité et de beauté.

Crédit photographique : (Lindoro),  (Isabella) / (Haly, en bas), (Mustafà, en haut) © C2images pour Opéra national de Lorraine

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