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Éblouissante Iphigénie en Tauride au Théâtre des Champs-Élysées

C'est à une réussite absolue que nous a convié le Théâtre des Champs-Élysées, pour cette Iphigénie en Tauride glaçante, qui titille les nerfs du spectateur jusqu'à l'insoutenable.

La mise en scène provient du Lyric Opera of Chicago, mais a fait le déplacement à Paris pour en assurer la reprise, et lui, ainsi que son équipe, ont fait l'objet d'une véritable ovation au moment des saluts. Décors et costumes sont uniformément noirs, avec simplement les prénoms des Atrides écrits à la craie sur les parois. Les accessoires sont rares, uniquement un autel sacrificiel et des poignards. Ce dépouillement même nous plonge au cœur de la violence de l'action, où tout n'est que meurtre.

Les chœurs sont relégués dans la fosse. C'est d'ordinaire un procédé qui ne nous plaît pas, mais cette fois-ci, dans une chorégraphie époustouflante de , les danseurs, omniprésents, figurent d'une façon oppressante les différentes foules (prêtresses, scythes, gardes, et surtout Furies qui tourmentent Oreste dans une scène proprement terrifiante). Si l'on ajoute à tout ceci les lumières de et , qui projettent d'immenses ombres menaçantes, on ne peut que dire qu'il s'agit d'un spectacle coup de poing.

La prise de rôle d'Iphigénie de était un gros enjeu pour la mezzo, et on sent chez elle un soin de tous les instants aux nombreux écueils qui parsèment la partition. Elle s'en tire d'une façon superbe, avec un timbre somptueux, des graves opulents et des aigus triomphaux, ainsi qu'une belle présence scénique. Tout au plus aurait-on aimé un peu plus de précision dans la diction – sans l'aide des surtitres, on ne comprendrait pas chaque mot, ce qui est dommage dans une tragédie lyrique.

est exceptionnel, sur tous les plans. Son Oreste torturé, halluciné jusqu'à la folie, restera dans les mémoires, sa palette de couleurs répondant à la moindre de ses intentions.

est le seul non francophone de la distribution principale, et cela s'entend à peine, si ce ne sont à quelques reprises de minimes fautes de prosodie. Le timbre n'est pas le plus joli du monde, mais le personnage est convaincant, et on y sent un véritable travail.

est un Thoas impressionnant, mais parfois la véhémence du ton lui fait perdre de vue le legato.

Les seconds rôles sont à l'aune de cette distribution de luxe, avec une mention spéciale pour la Diane majestueuse de .

Notre bonheur n'aurait pas été complet sans un chœur et un orchestre irréprochables. Sous la baguette de , les Balthasar-Neumann Chor & Ensemble sont absolument magiques de son, d'engagement et de nuances.

Les quelques réserves qui pourraient être émises ça et là ne pourront être tenues que pour du pinaillage, tant ce spectacle approche de la perfection, à la fois dramaturgique et musicale.

Crédit photographique : © Vincent Pontet

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