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Carl Philipp Emanuel Bach mis à l’honneur par Café Zimmermann et Rupert Charlesworth

a incontestablement les faveurs du monde musical depuis quelques années. Le tricentenaire de sa naissance, il y a deux ans, a notamment participé au mouvement, qui se traduit par de nombreuses parutions et productions (oratorios, œuvres pour orgue, pour clavier, pour violon, pour violoncelle…, sans oublier la biographie de circonstance). À la salle Cortot, l'ensemble s'inscrit dans cette veine, en mettant à l'honneur la musique vocale profane du plus célèbre des fils Bach.

L'ensemble de et reprend ce soir l'intégralité du disque qu'il vient de faire paraître chez Alpha, augmentée de plusieurs Lieder avec simple accompagnement au clavecin. Les pièces vocales sont entrecoupées de pièces instrumentales, dont l'une, la sonate pour deux violons Wq 158 ouvre le concert. D'emblée, on retrouve les caractères de cette musique plaisante, recherchée et riche en nuances, en même temps que le son souple et chaleureux de . Les nuances en pizzicato dans le Largo con sordini sont ainsi du plus bel effet. Le Lied qui suit, Fürsten sind am Lebensziele, œuvre tardive de 1785, est troublant du point de vue du style : si de nombreux motifs mélodiques font beaucoup penser à Mozart, la pâte musicale des tutti et certains accents dramatiques renvoient directement à son père Johann Sebastian Bach.

Mais la suite du concert permet bien de vérifier que le « Bach de Berlin et de Hambourg » a développé son style et sa sensibilité propres. C'est déjà le cas avec les deux autres pièces instrumentales : la Sinfonia pour deux violons et basse continue Wq 156, une œuvre de musique de chambre qui regarde vers la symphonie ; et la Sonatina Wq 104, un véritable petit concert avec flûtes, violons et clavecin obligé, où la grande agilité de est mise en valeur (dans l'Allegro ma non troppo notamment), et où la cohérence d'ensemble, dans une partition pleine de surprises, est remarquable.

Les pièces vocales surprennent par leur brièveté et enchantent par leur fraîcheur. est parfait pour ces textes poétiques, certains lyriques (Selma, Edle Freiheit extrait des trois airs Wq 211, Lyda…), d'autres moralisateurs (Reiche bis zum Wolkensitze) ou encore drolatiques (Der StoïkerPhyllis, Belinde). Le texte est rendu de manière très intelligible, avec peu d'erreurs de prononciations. La voix du ténor anglais est expressive juste ce qu'il faut, sans emportements excessifs, les textes étant d'un ton généralement assez léger. Son timbre coloré fait merveille, au milieu d'un accompagnement plus ou moins fourni selon les morceaux (du seul clavecin au petit orchestre violoncelle, alto, deux violons et deux traversos) mais toujours bien assorti à la voix.

Le programme se clôt avec une cantate, Der Frühling (Le printemps), dans laquelle Bach a gardé l'alternance airs-récitatifs, mais de manière moins marquée que ce que son père avait institué. Belle et rafraîchissante, cette œuvre aura sans nul doute achevé de faire oublier au public de la salle Cortot la grisaille automnale.

Crédits photographiques : © Jean-Baptiste Millot ; © Benjamin Harte

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