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Un Blomstedt léger emmène l’Orchestre de Paris dans Brahms et Mendelssohn

Pour son habituel concert de saison avec l', revient à deux compositeurs romantiques lors d'un programme extrêmement classique.

aura attendu de dépasser quatre-vingts ans pour être véritablement identifié comme chef d'importance en France. Il revient maintenant à Paris chaque saison, comme si les années s'écoulaient tranquillement sur sa figure svelte. Aujourd'hui, ses quatre-vingt onze ans n'altèrent ni le pas toujours léger pour entrer en scène, ni la tenue debout devant le pupitre pendant toute la soirée.

Pourtant, si les concerts se suivent, il ne se ressemblent pas. Car loin de l'incroyable interprétation de l'Urfassung de la Symphonie n° 3 de Bruckner l'an passé avec l'Orchestre de Paris, ou du Deutches Requiem joué la même saison à la Philharmonie de Paris avec le Gewandhausorchester Leipzig, la Symphonie n° 1 en ut mineur de Brahms ne retrouve cette fois même pas la tenue que celle interprétée par le chef en 2017 à Berlin avec les Berliner Philharmoniker. L' est évidemment un ensemble plus transparent, et évidemment le chef s'en sert comme tel. Mais là où il parvenait à concentrer d'une manière incroyable les cordes de la formation l'an passé dans Bruckner, il les allège aujourd'hui, au risque de ne jamais trouver ni tension ni contraste.

Déjà à Berlin, le premier mouvement sans nerf nous avait dérouté et les deux suivants, joués d'un seul flux, étaient passés sans marquer, ne laissant qu'au Finale une magnifique clarté. La luminosité de cette lecture se montre encore plus prégnante à Paris, mais de même que l'avait recherché Chailly il y a quelques années avec son ensemble saxon, cette optique limite la portée de la partition de Brahms. Car la Première n'est pas écrite comme les symphonies suivantes, et surtout pas comme la Deuxième, à laquelle un legato permanent et une ductilité de chaque instant semblent bien mieux adaptés, à l'image de l'interprétation déjà livrée par Blomstedt à la Salle Pleyel en 2014. À l'occasion aujourd'hui, un solo de violon de Roland Daugareuil ravive l'oreille, comme les interventions de la petite harmonie, toutes empreintes d'éclat et de chaleur. Pour autant, il reste bien peu à la fin de cette symphonie, ni aucune tension après le Poco sostenuto, ni excès de liberté ou évanescence dans les mouvements médians. L'Adagio, si marquant par sa grâce à Berlin, passe lui aussi comme le reste, avec un thème aux cordes sans ampleur.

En première partie, montre qu'il n'a rien perdu de sa maestria dès les premiers accords du Concerto pour piano n° 1 de . Les arpèges se déploient à loisir, avec une utilisation continue, bien que mesurée par l'appui, des deux pédales. Il traite d'une même vision tout le concerto, dont une superbe cadence, renforcée ensuite par les interventions du violoncelle et de l'alto. Le geste romantique s'étale sous un toucher que l'on ne peut s'empêcher de trouver toutefois quelque peu glacé. Le Presto correspond mieux à ce doigté, jamais pris en défaut, même dans les parties les plus exigeantes en termes de dextérité. L'orchestre l'accompagne avec la même légèreté que pour la symphonie ensuite, sans se faire remarquer, avec une belle couleur de cordes et de belles interventions des bois, déjà chauds, à l'image de la première clarinette et de la flûte. Blomstedt n'a pas modifié sa vision depuis son enregistrement de l'œuvre avec Thibaudet. Il ne bénéficie cependant pas de la densité sonore d'une formation germanique, et allège donc son accompagnement malgré des cordes naturellement limpides, quand seuls cors et trompettes par deux sont véritablement lancés avec force et brillance.

En bis, le pianiste offre un remarquable « Chant sans mots », comme il l'annonce lui-même (traduction littérale bien plus légitime que l'expression Romances sans paroles des Lieder ohne Worte de Mendelssohn), dont un extrait du premier recueil opus 19 nous est offert ici avec une superbe dextérité.

Crédit photographique © Accentus Music

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