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Herbert Blomstedt en jeune homme dirige Brahms, Beethoven et Schubert

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Paris. Philharmonie. 23 et 24-X-2017. Johannes Brahms (1833-1897) : Ein deutsches Requiem. Hannah Morrison, soprano ; Michael Nagy, baryton. Wiener Singverein, chef de chœur : Johannes Prinz. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Triple Concerto, pour piano, violon et violoncelle op. 56. Leonidas Kavakos, violon ; Gautier Capuçon, violoncelle ; Kirill Gerstein, piano. Franz Schubert (1797-1828) : Symphonie n°9 en do majeur D. 994 « La Grande ». Gewandhausorchester Leipzig, direction : Herbert Blomstedt.

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a 90 ans et peut tout se permettre, comme il le prouve une nouvelle fois lors de deux concerts de tournée avec l' : le premier soir, dans un fantastique Requiem Allemand de Brahms, puis le lendemain avec une Grande de Schubert de plus d'une heure, longue non pas à cause de la lenteur des tempi, mais parce qu'il joue toutes les reprises.

Tombé au début de l'été, , dont on connaissait la vigueur et la capacité à assurer toutes les répétitions debout, avait dû commencer à diriger assis, comme lors de son magnifique concert de Salzbourg avec les Wiener Philharmoniker. Cela aurait pu annoncer le début de la fin, mais ne semble déjà plus qu'un lointain passage à vide, lorsqu'il entre ce lundi d'automne sur la scène de la Philharmonie de Paris d'un pas alerte pour rejoindre l'estrade sans chaise, devant un pupitre sur lequel une rassurante partition ne sera jamais ouverte.

Premier soir : Ein Deutsches Requiem

Puisque Blomstedt est un jeune homme, il dirige comme un jeune homme, pour Un Requiem Allemand de d'à peine plus d'une heure dans lequel jamais la lenteur n'est recherchée. Cette absence d'hésitation n'implique pourtant pas faiblesse du discours, au contraire même, comme on peut le découvrir dès les premiers accords des contrebasses, d'une profondeur à faire pâlir un Thielemann, sans pour autant présenter la moindre lourdeur.

Le baryton retrouve une œuvre et une scène où il était encore en mars dernier. Mais si son style déclamatoire s'adaptait parfaitement à la proposition d'Hengelbrock lors de la saison passée, il trouve cette fois ses limites dans la vision plus mozartienne du chef suédois. La soprano recherchée devait être une voix claire, et si Christina Landshammer a rapidement disparu de l'affiche après la présentation de saison, Genia Kühmeier, ensuite annoncée, a été remplacée elle aussi. Nous découvrons donc , une voix mozartienne qui contrôle parfaitement le souffle et bénéficie d'une superbe clarté en plus d'une belle agilité à l'aigu lors de son unique intervention ; mais le son de sa voix reste sans doute trop fluet tout de même pour cette partition.

Le chœur choisi n'est autre que celui du  ; il a accompagné les plus grands dans l'œuvre et offre une fois de plus une prestation de grande qualité, dans laquelle chaque mot ressort, parfaitement compréhensible. Il donne une superbe ampleur aux textes des parties Denn alles Fleisch et Denn wir haben hie keine bleibende Statt. Pourtant on le sent aussi parfois sur la réserve face à la battue d'un chef qui ne cherche pas toujours la précision et le détail, mais le développement d'une ligne d'ensemble. Mais l'on reste impressionné par les jeux à plusieurs voix des cordes de l'orchestre dans certains passages qui n'auront jamais semblé aussi luthériens que lors de cette lecture.

Deuxième soir : Triple Concerto et Symphonie « La Grande »

Le lendemain, le Triple Concerto de Beethoven semble moins bien préparé. Il trouve trois interprètes de renom, mais seulement deux semblent vraiment jouer ensemble. Le violoncelliste est de loin le plus inspiré par l'œuvre, dont il traite les aspects chambristes comme du Schubert, avec un beau vibrato. Il est parfaitement en rythme avec le violon de , pourtant moins inspiré quant à lui, et même manquant de dextérité dans les parties rapides. leur tourne le dos à tous deux ; ce système ne semble pas le bon dans cet ouvrage, et le pianiste suit finalement tant bien que mal la dynamique installée par le duo de solistes à cordes, tandis que l'orchestre et le chef, rompus à cette partition, accompagnent au sens propre du terme. En bis, l'Adagio du Trio op. 11 du même Beethoven montre plus de coordination entre les trois musiciens solistes.

Au retour d'entracte, remonte sur le pupitre devant un ensemble surprenant, dont aucun des bois n'a été doublé, ni les cors quadruplés, mais où les cordes sont en grande formation comme pour une symphonie de Bruckner, avec huit contrebasses et donc seize premiers violons. Le célèbre premier violon, Sebastian Breuninger, a fait son apparition lors du concerto, mais après de multiples changements, les musiciens face à nous sont à présent rigoureusement les mêmes que ceux de la veille. L'on retrouve une magnifique flûte, si belle déjà dans ses parties du Requiem, et encore magnifique dans Schubert. Le hautbois est même meilleur, moins acide que la veille, surtout dans sa grande partie solo du mouvement lent.

Blomstedt semble avoir la vie devant lui, mais à l'inverse de nombre de ses aînés par le passé, il n'en profite pas pour ralentir les tempi ; c'est grâce aux reprises qu'il fait durer le plaisir, en allongeant au maximum la partition de la Symphonie en do majeur D. 994, étonnamment encore numérotée « 9 » dans le programme malgré la nouvelle numérotation. Son surnom de Grande lui correspond alors parfaitement, puisque avec un tel ensemble de cordes et toutes les reprises intégrées – même les plus improbables –, elle dépasse pour notre plus grand bonheur l'heure de musique.

Après ces deux concerts, aucun bis orchestral n'est proposé, mais qu'importe, puisque l'on sait maintenant pouvoir encore profiter du chef au pupitre pour les temps à venir !

Crédits photographiques : © Ava du Parc

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Paris. Philharmonie. 23 et 24-X-2017. Johannes Brahms (1833-1897) : Ein deutsches Requiem. Hannah Morrison, soprano ; Michael Nagy, baryton. Wiener Singverein, chef de chœur : Johannes Prinz. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Triple Concerto, pour piano, violon et violoncelle op. 56. Leonidas Kavakos, violon ; Gautier Capuçon, violoncelle ; Kirill Gerstein, piano. Franz Schubert (1797-1828) : Symphonie n°9 en do majeur D. 994 « La Grande ». Gewandhausorchester Leipzig, direction : Herbert Blomstedt.

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