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Klaus Florian Vogt retrouve la Ville Morte à Vienne

Reprise pour quatre soirs, La Ville Morte de Korngold retrouve pour Paul, cette fois amoureux de la Marietta de et soutenu en fosse par , qui fait pour l'occasion ses débuts à Vienne.


Die Tote Stadt
(La Ville Morte) de Korngold revient sur la scène viennoise dans la production de 2004 de , déjà couverte en 2017 avec les deux chanteurs principaux (Vogt/Nylund) et le chef (Mikko Franck) bien connus dans l'œuvre par l'enregistrement d'Helsinki de 2010. Créée à Salzbourg puis revue à Londres et San Francisco, la mise en scène récupérée par le Wiener Staatsoper avait finalement été prêtée à Paris en 2009. Elle est redonnée dans la capitale autrichienne pour la 24e fois ce soir.

Référent depuis plus une décennie dans le rôle, retrouve Paul et s'il présente maintenant de dangereuses tensions dans le haut du spectre à l'acte I, il magnifie toujours autant la scène finale, encore délivrée de son timbre angélique, superbement ajusté aux couleurs de l'orchestre. Sa Marietta, également Marie lorsque celle-ci réapparaît, trouve avec une artiste qui a pris une nouvelle stature après neuf saisons passées dans la troupe de Mayence.

Programmée dans de nombreuses maisons d'opéra dès 2019, la soprano lituanienne aura dû attendre que la situation sanitaire s'améliore pour enfin apparaître dans les plus grands rôles et les plus grandes salles. Après avoir signé ses débuts in loco avec Salomé en octobre 2020, répond maintenant à d'une voix pleine et sonore, dont le haut-médium facile ne détimbre qu'à quelques aigus lancés trop vite. La technique de chant crée cependant souvent un léger vibrato de fond de gorge en fin de phrase. En plus de ses qualités vocales, la chanteuse cherche à composer une danseuse physiquement engagée, qui caractérise bien les différentes phases émotionnelles de sa double héroïne.


D'un excellent niveau, le reste de la distribution remet à l'honneur , parfaitement assorti aux habits de Frank puis du Pierrot. D'une élocution claire et d'un style straussien bien adaptés pour Frank, il parvient à modifier sa ligne de chant pour Fritz en l'amenant plus vers la comédie, bien qu'il garde une vraie profondeur lors de son air à l'acte II. , elle aussi déjà présente en 2017, campe à ses côtés une intéressante Brigitta grâce à un timbre de mezzo bien déployé sur tout le bas-médium. Puis, lorsque la compagnie entre en scène, le ténor se fait particulièrement remarquer par la beauté de son timbre pour Victorin, et par ses couleurs soyeuses pour Lucienne.

Le chœur et le chœur d'enfants n'ont qu'une courte intervention dans l'opéra, mais elle est parfaitement tenue, tandis qu'à l'orchestre, le jeune , tout récemment nommé directeur musical de l'Oper Frankfurt, offre pour sa première au Wiener Staatsoper une direction soignée, bien appliquée à gérer la partition par ses diverses caractéristiques. D'une introduction pré-hollywoodienne menée avec vigueur, le chef passe à une élégance viennoise d'un superbe lyrisme dans les ultimes instants straussiens, magnifiés par une formation évidemment idéale pour cette musique. Déjà très équilibrée, sa lecture n'offre pas de prisme particulier à l'ouvrage, mais confère à la soirée une grande tenue, sans jamais profiter des forces en présence pour surpasser le plateau en volume sonore. En plus d'une belle soirée vocale, cette représentation devient alors aussi une soirée orchestrale pleine de promesses.

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