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Le Messie de Haendel avec Jordi Savall à la Chapelle royale de Versailles

Récemment, nous avons salué l'enregistrement du Messie de Haendel proposé par Hervé Niquet à la Chapelle royale de Versailles. Le tour est venu de vous présenter l'interprétation donnée dans le même lieu mais un an avant par .

Tout au long de sa vie, a élaboré plus d'une trentaine d'oratorios, genre de composition s'appuyant sur des textes bibliques auxquels il insufflait une vraie dimension dramatique. Pour écrire Le Messie, sur un livret en anglais de inspiré des Écritures saintes de l'Ancien Testament et des Évangiles, il ne lui fallut que vingt-quatre jours. Le résultat fut stupéfiant : ce « Grand oratorio sacré » connut un succès incomparable, qui valut à Haendel plus de gloire qu'aucune autre de ses pages.

L'interprétation présentée par et ses ensembles fut enregistrée en deux concerts publics à Versailles. Pour réaliser cette version, les musiciens ont utilisé comme point de départ, la partition autographe du Messie conservée à la British Library de Londres scellée avec la signature R.M.20.F.2, qu'ils ont enrichie par l'ajout des parties de hautbois trouvables dans le manuscrit employé pour la version exécutée au Foundling Hospital (une ancienne institution londonienne fondée pour recueillir les enfants abandonnés) en 1754.

Sous la direction de , Le Messie est une large fresque glorifiant la vie de Jésus, nous rapprochant au plus près des événements décrits dans la Bible. Savall anime cette œuvre par des changements de tempo habiles jamais brusques, en même temps qu'il fait preuve d'une précision perceptible dans l'articulation des cordes, d'une rondeur saisissante, nulle part exagérée ni ostentatoire. Il respire largement et naturellement, de sorte que les phrasés qui se succèdent, forment un fil narratif continu et logique dans la chaîne des motifs musicaux.

Quatre solistes entrent en lice. est doté d'une voix de ténor relativement sombre, dense et éloquente, se parant d'un ton sérieux dans les récitatifs et empreinte d'une virtuosité mesurée dans les airs. Le baryton  impressionne par une voix puissante, profonde et suggestive, d'un timbre à la fois onctueux dans les graves et sublime dans ses aigus, assurant intensité et élan à son exécution. À son tour, séduit par un fausset empli de douceur, de luminosité et d'une expressivité tantôt lyrique, tantôt flamboyante, selon le sens des paroles chantées. Quant à , elle possède une voix de soprano brillante, légère, délicate et gracieuse, gardant une belle vocalité dans toute sa tessiture, maîtrisant le souffle dans les phrasés dont le filé est parfois soutenu par Savall pour mettre en exergue leur charme et leur force évocatrice.

En ce qui concerne le chœur, il est composé de sept sopranos, cinq mezzo-sopranos (comprenant les contraltos et les contre-ténors), cinq ténors et cinq barytons/basses. Leur chant est rayonnant de lumière, de teintes riches en harmoniques, bien homogènes dans les tutti, d'une déclamation ciselée jusque dans les moindres détails, portée par une respiration ample et naturelle, permettant à l'auditeur d'apprécier les subtilités de la partition. Leur diction et leur maîtrise du vibrato sont exemplaires. Le chœur de l'Alléluia se voit, ici, donné avec autant de majesté – évitant le pathos – que de noblesse et de simplicité, ponctué par les interventions solennelles des trompettes.

Voici un album soigné à l'extrême : deux SACD hybrides munis d'un livret épais agrémenté de nombreuses photos et des textes. Ne ratons pas cette parution où Jordi Savall se montre à son meilleur. Une référence et une alternative aux versions signées Marc Minkowski (Archiv Produktion) et Václav Luks (Accent).

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