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La Khovantchina de Paris, grand œuvre d’Andrei Serban

Avec une distribution quasi intégralement renouvelée, La Khovantchina de Moussorgski revient à Bastille et montre encore l'intelligence de la mise en scène d'Andrei Serban, cette fois servie par la direction intimiste d'.


Créée en 2001 à l'Opéra Bastille, la mise en scène d'Andrei Serban pour La Khovantchina de Moussorgski était réapparue pour la dernière fois en 2013, dans une distribution portée encore par et . Elle revient cette saison avec une équipe musicale quasi intégralement modifiée et se montre toujours aussi belle par son mélange de classicisme et de modernité, des images encore très fortes. Par exemple, le prince déchu est emmené dans une charrette devant des gardes en habits de révolutionnaires français. Toujours aussi puissantes, la fin et l'apparition du jeune Tsar dans la fumée d'un plateau largement ouvert s'adapte parfaitement au choix de maintenir la version Chostakovitch de l'ouvrage jusqu'au bout, quand on pourrait sinon lui préférer la finesse du final de Stravinsky.

Sur scène, la distribution associe d'excellents chanteurs russes à d'autres internationaux, avec pour seul rôle commun à la dernière reprise le Kouzka toujours aussi vif et adapté du ténor . tient d'une belle voix son Prince Ivan Khovanski, bien qu'il manque de nuances et présente un chant trop monochrome. Des basses, on lui préfère alors , pour un Dosifei souvent profond, sauf dans le tableau de la forêt, où il se décale par rapport au groupe. tient un Chakloviti bien présent pour son air, puis d'une belle stature lorsqu'il assiste à la scène de meurtre, d'un coup de poignard sorti de l'ombre. Des ténors, pour le Prince Andrei Khovanski convainc le plus par une voix bien projetée et un timbre nuancé, quand pour le Prince Vassili Golitsine sort vaillamment de son grand air, mais avec un chant forcé et un aigu émaillé d'acidité et de vibrato.


Des hommes ressort également le Clerc de , très bien tenu dès la première scène, tandis que de la distribution féminine, se détache nettement, même si la mise en scène lui donne moins de place pour Marfa que celle de Christoph Loy à Amsterdam en 2016. Son chant semble s'être plus posé, bien qu'il reste très puissant et parfaitement projeté, particulièrement coloré dans le médium. peine plus avec Susanna, exposée à une ligne de chant tremblante, tandis qu'Emma trouve heureusement la soprano pour remplaçante, encore fragile à sa première apparition, puis bien plus assurée ensuite.

Les chœurs et la maîtrise préparés par ne sont pas toujours parfaitement en place, mais ils chantent masqués et nous avons été prévenus en début de représentation qu'il manquait chez eux comme dans l'orchestre de nombreux artistes, covidés. La prestation se voit donc plus qu'honorable, tout comme celle de l'orchestre, lui aussi touché par les défections. D'une direction claire et lente, éloigne le chef-d'œuvre moussorgskien du pittoresque, mais construit un drame intimiste, tout en finesse et souvent marquant dans les grands moments. Les danses livrées d'un caractère chambriste sont particulièrement intéressantes, tandis que les derniers instants touchent par leur justesse.

Crédits photographiques : © Guergana Damianova

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