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Bouquet final pour Mikko Franck au Philharmonique de Radio France

Après dix années à la direction musicale de l', tire sa révérence dans un concert où le participe avec un très bel Hymne Choral.

Remplaçant au pied levé de Chung dans Tristan und Isolde de Wagner en 2012 à la Salle Pleyel, était ensuite devenu le chef le plus évident pour succéder au Coréen à la tête de l'. Dix ans plus tard, le bilan est plus contrasté entre des concerts très réussis, notamment dans les œuvres de Sibelius ou cette année dans Richard Strauss, et une certaine forme d'essoufflement, marquée aussi par de nombreuses annulations pendant plusieurs années. Mais aujourd'hui, l'heure est plus à la fête qu'au bilan, avec un dernier concert en forme de « bouquet final », sans bouquet de bienvenue pour le successeur, puisque le nouveau directeur musical désigné Jaap van Zweden n'arrive qu'à partir de la saison 2026-27.

Pour débuter son dernier programme de directeur, a eu la bonne idée de faire appel aussi au , pour un Choral Hymns from the Rig Veda de qui aurait été sans doute encore mieux adapté s'il avait été joué en dernier. Dans cet ouvrage ressortent les qualités de chef de Mikko Franck, complet et aussi attentif envers le chœur qu'envers ses musiciens. La formation préparée par (bien occupé ces dernières semaines entre un concert Duruflé et la préparation du NFM Choir pour le Te Deum d'Escaich) offre une prononciation relativement claire du texte anglais, débuté par un ardent Hymne de Guerre et achevé sur un touchant Hymne Funèbre.

Moins méditatif, l'« Égyptien » de Saint-Saëns retrouve l'un de ses interprètes phares, le Français . Mais si le pianiste l'a enregistré avec Charles Dutoit il y a près de vingt ans (pour Decca) et en possède toujours le style, et surtout des couleurs adaptées (bien plus que Seong-Jin Cho dans le même auditorium avec l'autre formation de Radio France l'année passée), le jeu ne contient plus la même puissance et semble même s'être fragilisé. Bien accompagné par le Philharmonique, ce Concerto n° 5 démontre toujours avec quelle facilité les doigts du pianiste évoluent sur le clavier, mais sans y retrouver cette ampleur entendue récemment sous d'autres touchers. Ainsi, le thème nubien si superbe du deuxième mouvement semble presque effacé, et le finale manque de flamme, sans que l'on sache si à ne pas vouloir couvrir le pianiste, Mikko Franck n'a pas lui aussi participé à rendre le son trop petit. En bis, la Pavane pour une infante défunte de Ravel prise sur un tempo rapide se voit ôter tout pathos, et présente quelques imperfections flagrantes à la main gauche.

Concert de fête oblige, il y a une surprise dans cette soirée, présentée en anglais par un chef qui n'aura pas pris le temps d'apprendre notre langue en une décennie. Visiblement, cette surprise l'est pour Mikko Franck aussi, obligé de se retourner vers la partition pour la nommer, en l'occurrence une Élégie de Fauré très facilement accompagnée par l'orchestre, et surtout magnifiée par le geste de Sol Gabetta. Venue s'intégrer au début de la deuxième partie, la pièce précède celle de , Inlandsis, commandée et créée par les mêmes interprètes en 2023. Pour un chef qui a toujours adoré et défendu son compatriote, Rautavaara, disparu en 2016, aurait sans doute été mieux adapté à ce programme d'adieu. Jouer ce soir la partition inoffensive de la Française est un jeu d'enfant, mais présente peu d'intérêt. Encore plus qu'il y a deux ans, l'œuvre paraît déjà d'un autre siècle, tant elle ne fait rien d'autre que colorer très sagement un matériau orchestral à la fois linéaire et redondant, mâtiné d'un sous-texte écologique à la mode.

Heureusement, le Don Juan de redonne un peu d'énergie pour nous faire mieux profiter de ce qui reste aujourd'hui l'une des meilleures formations françaises, de surcroit dans sa meilleure nomenclature grâce à la présence du jeune premier violon . À faire pâlir les solistes des plus grands orchestres germaniques, ses solos sur le magnifique Hieronymus Amati 1696 apportent toute l'espièglerie et la fougue de la jeunesse à une interprétation symphonique sinon soignée, du moins bien redynamisée dans les derniers instants. Après le concert, les musiciens du Philharmonique offrent à Mikko Franck une partition manuscrite de l'autre Franck, en référence à l'un des moments référents de leur longue collaboration, l'album Franck by Franck (Alpha).

Crédits photographiques : © ResMusica

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