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Mârouf, délicieux cairote cake

L'Opéra Comique poursuit l'exploration de son patrimoine avec Mârouf, l'un des plus grands succès de la salle Favart.

L'oeuvre ravive pourtant des souvenirs moins glorieux. Le nom d' reste entaché de sa responsabilité dans l'exclusion des élèves et professeurs juifs du Conservatoire, qu'il dirigeait en 1940. De l'œuvre elle-même, on pouvait craindre un pittoresque d'exposition coloniale ou un humour qui sent le rance. Ce n'est pas le cas, puisque le livret n'est rien d'autre qu'un conte du Livre des mille et une nuits. Les personnages ont même gardé les charmantes circonlocutions du Docteur Mardrus.

n'a donc pas cherché à donner à Mârouf une profondeur qu'il n'a jamais eue, et ce n'est pas les quelques bouteilles de soda présentes sur scène qui pourront nous convaincre que l'œuvre a quelque chose de plus à dire. Les décors font un peu pauvres, alors que les coiffures et les figurants participent d'une surenchère de gags parfois drôles, parfois puérils.

Si le spectacle plaît sans émerveiller ni convaincre, la partition se défend fort bien. L'Orchestre Philharmonique de Radio-France en fait briller les diaprures sans tomber dans le clinquant. sert l'œuvre avec conviction et ne laisse pas passer les belles pages orchestrales (prélude du second acte) ou chorales (finale du second acte, interventions d' au dernier acte). Il soutient tout aussi efficacement la narration et ne noie pas les chanteurs. Parmi ces derniers, on trouve des représentants accomplis de la jeune génération de chanteurs français, aux côtés des élèves de l'Académie de l'Opéra Comique. C'est un réel plaisir de constater que tous savent rendre justice à la difficile expression vocale, assez debussyste, qui caractérise l'œuvre. , dans le rôle titre (en version originale, pour baryton), est peut-être le moins naturel dans le récitatif, frôlant parfois l'emphase. Mais le jeu et la diction sont admirables, la voix plutôt sombre mais ductile. Des autres, il n'y a que du bien à dire : les caractères sont parfaitement dits et incarnés, du Sultan ravi et pourtant majestueux de au fourbe Vizir de , en passant par les excellents et Frédéric Goncalvès. est moins claire, mais le rôle n'est que criailleries. Enfin le personnage de la Princesse, coquette et rouée, convient particulièrement à , qui s'y trouve très à l'aise vocalement. Le duo d'amour est certainement le sommet d'une soirée qui a permis de renouer avec une œuvre peut-être pas fondamentale, mais des plus séduisantes.

Crédit photographique : © Pierre Grosbois

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