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Nouveau festival à Dijon : Leonardo García Alarcón en ouverture

Les Artistes en Résidence, c'était un des fondamentaux de l'ère Joyeux. Alors que cette dernière s'achève dans la douleur, la pléiade d'artistes embarqués dans l'aventure qui a placé l'Opéra de Dijon sur la route des rendez-vous musicaux incontournables, se mobilise en ces temps inédits pour une série de 36 concerts, dont 28 en ligne, jusqu'au 6 juillet. Voici donc les Artistes en Résistance, ouvert avec , résident depuis 2017.


L'œuvre sans auteur
au cinéma l'an passé. Le Concert sans auditeur à l'Auditorium désert de Dijon cette année. Quand on sait, comme , combien « l'écoute du public agrandit le geste de l'acteur » (la 573ᵉ de ses 1001 définitions du théâtre), quand on a appris la défiance du son en ligne, on regarde à deux fois avant de décider de « se rendre » à ce premier festival de l'étrange été 2020. A l'arrivée, l'entreprise, finement conçue (et disponible en illimité sur le site de l'Opéra), le niveau des musiciens, leur bonheur palpable de se retrouver enfin, réduit à néant l'essentiel des atermoiements.

Contrairement à ce qui est annoncé, les 40 minutes de ce troisième concert sur les cinq donnés par six instrumentistes de sont donnés en faux direct : à une répétition matinale, aura succédé une captation en matinée, montée ensuite pour le rendez-vous de 20 heures. Le direct ne concerne de fait que les 10 minutes d'un dialogue pédagogique introductif avec Alarcón, et les 30 minutes d'un échange aussi instructif que constructif entre instrumentistes présents et public virtuel en ligne, le tout animé par Stephen Sazio. L'on y remonte au temps où Alarcón et les siens jouaient sous la houlette de cet autre Argentin flamboyant, Gabriele Garrido. L'on y rappelle surtout combien grande était, dans la musique baroque, la liberté laissée aux interprètes. Des interprètes-compositeurs en quelque sorte. La spécificité de , en fait, comme l'avait brillamment démontré, à Dijon déjà, la résurrection du Prometeo de Draghi.

Trente minutes. Sept numéros musicaux. Seul couac, au-delà de la broutille d'un retard d'une demi-heure à l'allumage, le programme est donné dans le plus grand désordre, ce qui n'est pas sans nuire à la soirée la plus militante du festival : Les compositrices vénitiennes. Lesquelles, si elles n'étaient pas religieuses ou « bien nées », ne pouvaient prétendre à la composition. a consacré en 2009 un très beau disque (Virtuosissima compositrice, Ambronay) à la plus renommée, , dont Alarcón signale que, privée d'opéra, elle inventa la cantate : ainsi Lagrime mie, cantate et ariette à voix seule, interprétée par le tempérament magnétique de . L'égérie de Capella Mediterranea plonge ensuite, en une performance qui n'est pas sans rappeler l'extraverti de sa Finta Pazza, dans le dramatisme du bref M'ingannasti in verità, de la plus méconnue . La jeune compositrice quitta Venise pour la cour de Louis XIV, où elle composa un Ercole amante, « opéra à redécouvrir un jour » conseille l'œil bienveillant et déjà gourmand d'Alarcón, que l'on ne remerciera jamais assez pour la redécouverte majeure de ses Falvetti.

Les deux femmes sont entourées de quelques hommes : Giovani Paolo Paladino, dont l'Ancor che col partire, à la guitare, donne en douceur le la de la soirée ; et sa Gaillarde La Caotorta ; et sa Sonata seconda ; et enfin le grand maître vénitien de Strozzi et Bembo : et sa Sinfonia per la notte extraite d'Egisto.

Que des instrumentaux pour ces messieurs, la voix étant réservée à ces dames. Une voix dont elles ont été trop longtemps privées. Une voix qui bouleverse pour finir dans le tube de Strozzi, le sublime Che si puo fare, juste entre le Dido's Lament de Purcell et le Pur ti miro de Monteverdi.

Crédits photographiques : © Gilles Abbeg-Opéra de Dijon

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Mis à jour : 02/06/2020 à 16h35

 

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