Mozart sur son propre clavicorde par Alexander Gergelyfi et le bartyton Georg Nigl
Écouter des œuvres de Mozart sur son propre clavicorde, voilà qui représente une découverte de taille, tant la sonorité de l'instrument étonne par sa portée, incisive et chaleureuse. Alexander Gergelyfi offre un programme original aux côtés du baryton Georg Nigl en une belle alternance de pièces solo et d'airs et de lieders.

Retrouver les instruments originaux sur lesquels de grands compositeurs ont joué est un luxe appréciable mais pas toujours réalisable. On se souvient de certains orgues de Bach, ou de merveilleux pianos de Beethoven. Ici, en la maison natale de Mozart à Salzbourg, un clavicorde présente une émouvante inscription de sa veuve relatant l'utilisation de cet instrument par son mari pour la composition de La Flûte enchantée, La Clémence de Titus, le Requiem et sa Cantate maçonnique.
Les qualités intrinsèques du clavicorde sont de permettre une modulation du son en fonction du toucher avec des effets de piano et de forte. Le vibrato est également possible en modifiant la pression sur la touche, effet décrit sous le nom de « Bebung ». Johann Sebastian Bach déjà louait les qualités d'un tel instrument expressif à la différence du clavecin. Bien sûr son volume sonore réduit ne lui permettant pas de se déployer dans des salles de concert, il fut supplanté par le pianoforte.
On se prend à rêver de Mozart jouant à ce clavier discret d'usage domestique telle ou telle composition rappelée par son épouse. Cet outil de travail à la maison représentait pour le compositeur le minimum indispensable. A l'écoute, le clavicorde offre des sonorités boisées certes magnifiées par une prise de son rapprochée qui ne laisse perdre aucun détail acoustique. L'alternance des pièces solistes avec d'autres, chantées, offre une agréable diversité tout en montrant des possibilités multiples liées à l'accompagnement sur un tel type de clavier. Le programme débute ainsi avec l'Ouverture de la Flûte enchantée qui prend une ampleur incroyable malgré le support sonore. « On y entend des violons et même des cuivres dans les basses » comme nous le fait remarquer Alexander Gergelyfi d'après une citation de Léopold Mozart. Georg Nigl chante à la suite l'Air de Papageno : »Ein mädchen ». Sa voix timbrée s'équilibre à merveille avec celle du clavicorde, par une émission douce dans une captation globalement rapprochée.
Le CD offre ensuite la Marche extraite de La Clémence de Titus une nouvelle fois sonnant de tous ses feux sur le clavier à cordes frappées. La Violette d'après un texte de Goethe nous rappelle cet air quelque peu oublié et pourtant si émouvant qui nous décrit les malheurs d'une petite fleur hélas piétinée négligemment par une bergère. D'autres pièces solistes décrivent l'univers domestique de Mozart dont la Fantaisie KV 397 ou le pittoresque Adagio pour Harmonica de verre KV 356.
La découverte dans ce disque du clavicorde de Mozart en ce contexte musical est un enchantement.














