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Rocío Molina : le flamenco qui fait mal

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Paris. La Grande halle de la Villette. 5-VI-2025. Carnación. Idée originale et chorégraphie : Rocío Molina. Mise en scène : Rocío Molina et Juan Kruz Dìaz de Garaio Esnaola. Création lumières : Carlos Marquerie. Création costumes : Leandra Cano. Danse : Rocío Molina. Chant : Francisco Contreras. Piano, musique électronique et programmation : Pepe Benítez. Violoniste : Maureen Choi. Soprano : Olalla Alemán. Chœur : Jeune chœur de Paris

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La danseuse et chorégraphe espagnole , à l'avant-garde du flamenco contemporain, livre avec Carnación une performance dérangeante, à la limite du genre.

Une chaise au milieu de la scène et une lumière rouge. La danseuse escalade la chaise, se penche en avant, tombe la tête la première, glisse à terre. Une fois, deux fois, trois fois… cinq fois, avec quelques variantes allant crescendo dans l'intensité. Une violoniste accompagne la scène en faisant couiner son instrument tandis qu'un homme au look de Hells Angel, , s'assoit sur la chaise. Docile, il se laisse ficeler méticuleusement et très longuement par qui, littéralement, tire les ficelles pour faire bouger cet homme devenu pantin.

Avec Carnación, entend explorer son désir. « Même si je porte toujours en moi l'expérience flamenco, c'est la première pièce que je ne conçois pas à partir de ces codes, explique la chorégraphe-interprète. Carnación est née d'une interrogation autour du désir humain, le mien en particulier, et de sa stigmatisation. » Et la danseuse espagnole de nous livrer, tableau après tableau un aperçu de sa psyché, portée sur le bondage et le sado-masochisme. Aux claques succèdent les caresses ou l'inverse. Après avoir ficelé son comparse, la chanteuse, désormais vêtue d'un petit juste-au-corps transparent, en fait de même avec elle-même, très (trop ?) longuement. À la musique électronique dansante de succèdent les crissements du violon de , ou le bruit amplifié des cordes qui se resserre autour du corps de danseuse qui se tortille au sol. Au milieu de ces scènes dérangeantes, les quelques interventions de la soprano ou du très beau apportent des coins d'éclaircies dans ce spectacle déroutant et parfois à la limite du supportable. D'ailleurs, au bout d'une heure, à seulement mi-parcours de la pièce, certains spectateurs de la Grande Halle de la Villette commencent à quitter les gradins, insensibles ou excédés par la proposition radicale de Molina.

Toutefois, la virtuosité des interprètes est indéniable, que ce soit le chant et la guitare flamenco de , malheureusement trop rare, tout comme les incartades de Rocío Molina dans sa discipline d'origine, le flamenco. Quand elle s'enflamme et laisse aller ses pieds et ses mains, pris d'une frénésie époustouflante, on comprend pourquoi Molina a reçu autant de prix au cours de sa carrière pour ses recherches chorégraphiques et ses propositions scéniques singulières : Prix national de la danse en 2010, National Dance Award en 2016 et 2019 au Royaume-Uni, médaille d'or des beaux-Arts en Espagne en 2022, Prix Lion d'argent pour la danse à la Biennale de Venise cette même année, notamment.

Au final, Carnación, à force de vouloir déranger le public et explorer les propres limites de la danseuse-chorégraphe, laisse une bonne partie des spectateurs sur la touche, notamment ceux qui s'attendaient à voir du flamenco et ont en réalité assisté à une performance intense et dérangeante.

Crédit photographique : © Simone Fratini

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