Des influences multicolores

Après un splendide premier disque consacré au compositeur auquel ils doivent leur nom (Georg Muffat), les Muffatti (ensemble baroque belge) nous reviennent avec un autre compositeur dont le nom vous parle peut-être peu, mais qui pourrait bien vous surprendre par sa délicatesse aux influences multicolores. Ce disque est un rayon de soleil ou tout absolument tout respire le bonheur, y compris la mélancolie.
Johann Christoph Pez qui vécut le temps du règne personnel de Louis XIV est né à Munich où il reçut une formation de luthiste et de violiste. C'est au cours d'un voyage d'étude à Rome qu'il va s'imprégner des couleurs italiennes. Il finira ses jours comme Maître de Chapelle à Stuggart. De de son vivant, il connût une réelle notoriété puisque Telemann le considère comme faisant partie des six compositeurs allemands dont l'influence permet à la musique des cours germaniques de rayonner en Europe. Ses compositions furent très influencées par le style de Corelli et il suffit d'écouter le Sonate de concert en fa majeur (R, 15) pour le remarquer, en particulier dans son écriture. On remarquera toutefois dans cette sonate un passage d'un style et d'une virtuosité surprenants ou le basson et le violon concertent en mêlant légèreté et puissance, délicatesse et force. Mais les plus surprenantes de toutes ces œuvres sont celles qui doivent leur influence à Lully. Difficile lorsqu'on les entend de ne pas se laisser piéger, tant le style en est si proche, et cette influence peut sembler d'autant plus que Pez ne mit jamais les pieds en France et ne rencontra donc jamais Lully.
L'interprétation brillante des Muffatti, nous permet de découvrir ce qui fait que Pez n'est pas un compositeur de second plan. Tous les instrumentistes de cet ensemble offrent des couleurs rayonnantes, un sens du phrasé vertigineux à l'interprétation de ces œuvres. Les cordes (violons, violoncelles, violes de gambe…) osent tout, aériennes et précises, elles nous entraînent dans la chaconne du Concerto grosso (R, 18) aux confins de la souplesse et de la légèreté dans des combinaisons d'une beauté apollinienne, digne des fastes de Versailles.
Les Muffatti nous offre ici une version somptueuse d'œuvres rares qui n'attendaient que des interprètes dignes d'elles pour renaître, Phénix baroque qui pourtant annonce déjà le siècle des Lumières.









