Créé en 2023 au Concertgebouw d'Amsterdam sous la direction du compositeur, Requiem for Nature est présenté cette fin de saison à Paris avec les quatre mêmes solistes, défendu cette fois par le Philharmonique de Radio France et un très beau Chœur de Radio France.

Dernier concert du cycle « nature et vivant » de l'Orchestre Philharmonique de Radio France, le Requiem for Nature permet d'entendre à la direction son compositeur Tan Dun, dans un Auditorium étonnamment à peine à deux-tiers plein, alors qu'il semble difficile à croire que le jeune public adepte des musiques de films Tigre et Dragon (2000) ou Hero (2002) soit passé à côté de la venue de l'artiste.

Quelque peu en forme de pastiche, cette messe laïque réutilise des pans entiers de la Buddha Passion (2006) et les effets aquatiques conçus pour le célèbre Water Concerto (1998) puis la Water Music (2004). Un peu facile, cette réadaptation pourra trouver une justification écologique, celle énoncée par exemple par le maître américain de Tan Dun, John Cage, quand il évoquait le fait que « Music is ecology ». Cependant, si les six parties d'environ une heure vingt en tout démontrent la maîtrise assurée d'une composition entre atmosphères de musiques de films et emprunts à la tradition, on trouvera tout de même le résultat au-dessous des grandes œuvres du compositeur chinois.

Pour la servir cependant, le Chœur de Radio France préparé par Karine Locatelli répond présent dès le début de Confession, juste avant que ne s'élève la voix d'outre-tombe du chanteur de gorge mongol Hasibagen, accompagné à la fin de sa première lamentation par les sonorités envoutantes d'un tuyau harmonique. De petits bassins imposent à deux percussionnistes de souvent alterner entre des paniers et plaques pour faire couler ou frapper l'eau, exploitée comme véritable instrument, sa sonorité amplifiée par micro permettant d'apporter un effet naturel au matériau symphonique. Plutôt simple, celui-ci est aisément appréhendé par le Philharmonique de Radio France, habitué à jouer tous les types de musiques contemporaines jusqu'aux musiques de films, comme récemment encore celle d'Howard Shore (album paru ensuite chez DG).

Si le musicologue Jacques Amblard, de l'Ircam, arguait il y a peu au micro de Laurent Vilarem sur France Musique que Tan Dun s'appropriait les thèmes populaires pour les intégrer à un style moderne d'une manière relativement similaire à celle de Bartók, le Mantra repris de la Buddha Passion fait pour sa part bien plus penser à l'adaptation des thèmes chinois par Puccini dans son opéra Turandot, puis la partie suivante avec la soprano Candice Chung à Tosca, jusqu'au cri de mort qui fait référence au drame. Han Yan au pipa – luth chinois très bien mis en avant dans l'ultime partie – et la soprano thibétaine Yong Jiangfan contribuent de belle manière à ramener la partition vers les terres natales du compositeur. Pour le reste, on profite surtout de la prestation du Chœur de Radio France, parfait pour retranscrire des parties parfois proches de celles de Mahler, et pour les nombreuses autres souvent chantées en anglais, notamment le dernier choral, qui aurait sans doute gagné à être énoncé dans une langue moins internationale.

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