Éditos

La main du marionnettiste

 
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La bombe du MEDEF dégoupillée le 13 février dernier a bien une origine. Comment une organisation patronale totalement étrangère au monde du spectacle a-t-elle pu s’intéresser à un milieu qu’elle a toujours au mieux ignoré ? Le marionnettiste finit toujours par montrer sa main, l’occasion de découvrir quelques « think tanks » ultra-libéraux qui gravitent autour du puissant syndicat patronal. Et que le MEDEF a repris au pied de la lettre, sans réfléchir.

Le principe du régime des intermittents, tout comme celui des intérimaires, repose sur la solidarité interprofessionnelle. Les excédents des uns compensent les déficits des autres, et ce n’est pas que valable pour l’assurance-chômage, il suffit de constater les investissements massifs de capitaux faits dernièrement pour maintenir l’industrie automobile à flot. Si le MEDEF devient partisan de la politique de la terre brûlée, c’est-à-dire supprimer un dispositif car il coûterait trop cher, de nombreuses entreprises – et non des moindres – seraient en liquidation. Exit PSA, dont les ventes chutent. Exit Renault, puisque les bénéfices viennent de Nissan et Dacia.  Exit Dassault aviation, avec ce Rafale dont personne ne veut.

L’idée d’origine de suppression du statut des intermittents vient de l’Institut de l’Entreprise. Dont un des membres fondateurs est l’UIMM, la branche « industrie » du MEDEF. Cet institut a commandé un rapport à Bruno Coquet, haut fonctionnaire au Ministère du Travail. Sans surprise, l’auteur demande la suppression pure et simple des annexes VIII et X, celles qui définissent le statut des intermittents. Dans la même veine, l’idée est reprise par l’IFRAP, la Fondation pour la recherche des administrations et les politiques publiques, qui dénonce une « générosité excessive » via les colonnes du « Figaro » dans lesquelles cet organisme s’exprime assez souvent. Curieusement l’IFRAP avait communiqué en décembre un dossier qui permettait d’économiser 5 milliards d’euros sur les indemnités du chômage. « Il faut prendre l’argent où il se trouve, c’est à dire chez les pauvres. Bon d’accord ils n’ont pas beaucoup d’argent, mais il y a beaucoup de pauvres » ironisait Alphonse Allais au XIXe siècle. Le troisième larron est l’Institut Montaigne, dont les accointances avec le MEDEF ne sont plus à prouver et qui lors de la campagne pour les Présidentielles de 2012 proposait parmi ses solutions économiques la suppression des intermittents.

Le souci est que dans les négociations qui se déroulent actuellement à l’UNEDIC (les autres statuts de chômeurs sont aussi discutés) aucune organisation patronale ne représente le monde du spectacle. Pourtant le SYNDEAC, la CGT-Spectacles et autres collectifs d’intermittents ont des solutions à proposer – n’oublions pas que la réalité des intermittents est de faire face à des subventions en perpétuelle baisse, donc des cachets réduits et engagements de plus en plus rares. Mais face aux poids lourds du MEDEF ou de la CGPME et à leurs puissants Mazarins en arrière-boutique, ils ne feront pas le poids. L’été 2014 risque furieusement de ressembler à l’été 2003.

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