La Scène, Spectacles divers

Le clavier bien démantelé de Claudine Simon

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Nanterre. Maison de la Musique. 2-IV-2025. Claudine Simon (née en 1980) : Anatomia ; conception, écriture, performance, Claudine Simon ; scénographie : Rudy Decelière ; son : Laurent Sassi ; regard extérieur : Pau Simon ; facteur de piano : Thomas Garcin ; régie lumière : Lila Burdet ; régie plateau et générale : Théo Vacheron

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Après sa création en 2023 au festival Musica de Strasbourg, le spectacle Anatomia de repart en tournée, investissant pour trois représentations le plateau de la Maison de la Musique de Nanterre.

Des filins descendent des cintres et strient l'espace scénique (celui de Rudy Decelière), sorte de boîte noire qui fait d'autant mieux ressortir le bois clair (poncé et sablé) d'un Schimmel quart-de-queue en attente de la pianiste. arrive pieds nus et joue du Liszt, les très célèbres Consolations et autres Funérailles, marche funèbre prémonitoire (pour le piano surtout !) dont la basse obstinée de la main gauche, répétée à l'envi, embrase l'espace de résonance. Ainsi s'ouvrent les vannes du son, au-delà du jeu de l'interprète relayée par l'amplification et la diffusion (Laurent Sassi) à travers les haut-parleurs.

Dissection et observation

Commence alors, avec un assistant (le régisseur Théo Vacheron) car les pièces sont lourdes, le démantèlement systématique du piano, dans le calme et la beauté du geste. Chaque composante (le couvercle d'abord, les supports en bois, le pédalier, etc.) est placée en équilibre sur les filins tels des mobiles qui animent l'espace et sont donnés à voir. Quant à la mécanique (l'ensemble des marteaux), elle est exposée sur le devant de la scène, à hauteur des mains de qui en joue avec dextérité : musique bruitée avec effet guïro sur les chevilles, ballet de marteaux (en solo ou ensemble) et leurs rebonds sonores. L'espace de jeu est amplifié et nous laisse apprécier cette séquence ludique et feutrée qui ravit l'œil autant que l'oreille.

Un piano volant

Le piano ainsi « désossé » est suspendu lui aussi, après que l'assistant lui a enlevé ses trois pieds ; l'entreprise est risquée, menée grâce à un système de poulie sous le contrôle du régisseur. Son ombre agrandie se projette sur le mur latéral de la scène à la faveur des éclairages de Lila Burdet.

 

Il fait basculer presque verticalement le cadre métallique du piano où sont tendues les cordes : « J'éprouve une vraie sensation physique quand le piano est en train de voler », confie Claudine Simon. L'instrument devient alors une sorte de piano-harpe que l'interprète se réapproprie, en explorant ses nouvelles potentialités sonores : « Ça me plait beaucoup d'aller vers cette réduction des moyens, alors qu'un piano est par essence un orchestre surpuissant », ajoute-t-elle, dans l'entretien avec Guillaume Gesret qu'on lit dans le programme. Pour ce faire, elle a entre les mains toutes sortes d'accessoires (brosse, baguette superball, objets métalliques) pour percuter, effleurer, frotter les cordes ainsi qu'une pédale à main qui permet de relever les étouffoirs et de libérer la résonance. Trois micros sont fixés dans la caisse, captant le son instrumental projeté à travers les haut-parleurs, entre poésie sonore et onirisme.

Au terme de la performance s'entendent, lointaines et effacées, des bribes de Consolations, pixels de mémoire et de mélancolie avant l'extinction des lumières.

Crédit photographique : © ResMusica

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Nanterre. Maison de la Musique. 2-IV-2025. Claudine Simon (née en 1980) : Anatomia ; conception, écriture, performance, Claudine Simon ; scénographie : Rudy Decelière ; son : Laurent Sassi ; regard extérieur : Pau Simon ; facteur de piano : Thomas Garcin ; régie lumière : Lila Burdet ; régie plateau et générale : Théo Vacheron

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