Sophie Junker, brillante silhouette vénitienne
Le soprano de Sophie Junker avait fait des merveilles dans son premier récital enregistré autour de la figure de La Francesina (Clef ResMusica). Dans ce nouvel album intitulé « La Serenissima, Venetian Silhouettes », on retrouve les grands noms de la musique baroque vénitienne du début du XVIIIe siècle mais surtout la voix ample et charnue d'une jeune interprète tout à son affaire dans cette programmation séduisante.
Autour des grandes héroïnes de l'opéra vénitien, on ne peut pas dire que la thématique de ce disque sorte des sentiers battus malgré deux premières mondiales : l'air d'Antonio Lotti (1667-1740) « Con flamme, e con straggi », qui brille par une fougue orchestrale colorée que mène avec beaucoup de nuances l'ensemble {OH !}Orkiestra sous la baguette de Martyna Pastuszka et l'air de Francesco Gasparini (1661-1727) « Sì, ti sente l'alma mia », d'une sérénité gracieuse et légère soutenue par le violon de la cheffe d'orchestre.
L'expressivité des interprètes s'impose immédiatement, la technique sans faille de Sophie Junker faisant primer les affects parmi de multiples couleurs et ambiances. La virtuosité, pourtant présente, passe au second plan pour laisser toute l'ampleur aux aptitudes dramatiques de la soliste et de ses musiciens. « Madre diletta, abbracciami » de Giovanni Porta (1675-1755) permet à l'interprète de déployer de superbes vibratos, son legato, tapi sur un piano orchestral quasi-irréel, se distinguant particulièrement dans la ligne vocale soignée de Benedetto Marcello (1686-1739) pour sa sérénade « Come mai puoi vedermi piangere ».
{OH !}Orkiestra sous la direction de Martyna Pastuszka fait ici des choix interprétatifs originaux, comme la couleur pastorale affirmée dans le Concerto pour violon en la mineur d'Antonio Vivaldi (1678-1741) ou la sonorité aigre de son « Moi cor, s'io ti credessi » extrait de La Silvia. Les musiciens se démarquent également dans leur partie soliste, de la virtuosité du hautbois dans l'air « Vendetta, sì farò » de Francesco Gasparini à l'ampleur du violon de Martyna Pastuska dans l'air du même compositeur évoqué plus haut : une belle force ajoutée à un projet discographique réussi.















