Motets de Campra et Bernier par Romain Bockler et le Concerto Soave
André Campra et Nicolas Bernier sont des compositeurs-phares du début du XVIIIᵉ siècle, emblématiques d'une période férue d'italianismes. Ils sont ici réunis dans un programme alternant motets à voix seule et pièces d'orgue.
Le motet pour voix soliste et deux dessus de violons est né en Italie au XVIIᵉ siècle. Il devint l'un des principaux ambassadeurs du goût italien en France au début du XVIIIᵉ siècle, dont André Campra et Nicolas Bernier furent les champions. Si Campra, d'ascendance italienne, doit principalement sa notoriété à ses opéras-ballets, Bernier est moins connu mais ses motets gardent la marque de ses études à Rome auprès de Caldara. Tous deux allient l'élégance française à la théâtralité italienne, parfaits exemples des Goûts Réunis.
Le programme s'ouvre et se referme par un Venite, exultemus que chacun des deux musiciens compose sur le même texte, celui de Bernier étant plus chargé en vocalises. L'introduction instrumentale est particulièrement développée dans le motet Judica me Deus de Bernier. Un seul des cinq motets présents dans cet enregistrement ne fait pas appel aux violons, et c'est un court prélude d'orgue de Nicolas Lebègue qui fait office de symphonie introductive.
Ce qui caractérise l'écriture de ces motets, ce sont les contrastes entre les différents versets, en accord avec le sens du texte. La voix chaude du baryton Romain Bockler (qui nous avait séduits dans le rôle-titre de l'Orfeo de Monteverdi au dernier Mars en Baroque) épouse parfaitement la souplesse de la ligne musicale, soutenue par un riche continuo où Jean-Marc Aymes alterne le clavecin et l'orgue positif. Les violons déroulent avec éloquence leurs guirlandes décoratives. Le motet Alma redemptoris mater de Bernier, sans symphonie, est chantée depuis la tribune, accompagné par le bel orgue de Cucuron. La voix bénéficie là de plus de réverbération, l'acoustique n'étant pas la même que pour les autres pièces chantées devant le chœur, ce que l'on peut regretter. Mais ce que l'on regrettera surtout, c'est l'absence de toute référence faite à l'orgue historique de Cucuron, judicieusement choisi pour alterner avec les pièces vocales. « Les pièces d'orgue permettaient aux voix de se reposer » peut-on lire dans le livret d'accompagnement sous la plume de la musicologue Nathalie Berthon-Blivet. C'est un peu court ! Et les pièces de Marchand, DuMage et Lebègue jouées par Jean-Marc Aymes auraient mérité un peu plus de considération.









