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Concert hommage au compositeur Fuminori Tanada

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Paris. Conservatoire National supérieur de musique. Salle Nadia Boulanger. 19-XII-2025. Fuminori Tanada (1961-2025) : Sommerwind IV, pour 2 flûtes solistes et 13 flûtes spatialisées ; Interlude, pour violoncelle solo ; Sommerwind IIIb, pour 4 cors et ensemble de cordes ; Echoing Bells, pour ensemble ; Salvatore Sciarrino, Prélude pour piano ; JS Bach : Suite pour violoncelle n°5 en do mineur, BWV 1011 ; Courante et Sarabande ; Maurice Ravel (1875-1937) : Rhapsodie espagnole à quatre mains : Feria ; Tristan Murail (né en 1947) : Cloches d’adieu et un sourire…, pour piano. Saori Ishikawa, Chisato Taniguchi, piano ; Albert Kuchinski, violoncelle ; étudiants des classes du CNSMDP (flûtes, cordes et cors) ; direction Jean-Christophe Vervoitte ; Ensemble L’Itinéraire ; direction Mathieu Romano.

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Émouvant et de très haute tenue, le concert hommage au pianiste et compositeur japonais , qui nous a quittés en juin dernier à l'âge de 64 ans, fédère les forces du Conservatoire national supérieur de Paris où il enseignait et celles de L'Itinéraire dont il a été le pianiste durant 36 ans.

Fin musicien et pianiste recherché, dont on rappelle la grande générosité et l'engagement dans la transmission de la musique d'aujourd'hui, a rejoint L'Itinéraire en 1989 ; il a enseigné la musique de chambre au Conservatoire de Paris et fut l'accompagnateur des classes de flûte de Philippe Bernold et Sophie Cherrier. On doit à cette dernière, épaulée par l'équipe du CNSM, l'initiative de cette soirée in memoriam dans la salle Nadia Boulanger où s'affichent, aux côtés des œuvres de Tanada, celles de compositeurs qui ont compté dans sa vie de musicien, Bach mais aussi Salvatore Sciarrino, et .

Dans la mouvance spectrale

Son catalogue d'une quarantaine d'œuvres fait apparaître des titres en série comme Mysterious morning (de I à IV), Echoing ou encore Sommerwind. Deux flûtes solistes, de part et d'autre du chef , sont encadrées par trois groupes de flûtes spatialisés dans Sommerwind IV, une pièce en trois volets, trois esquisses aux textures aussi légères que raffinées, jouant sur le mouvement du son/souffle dans l'espace, entre fragilité de l'émission (sons éoliens), granulations fines et fulgurance, comme ces sons fendus de la dernière partie rappelant les techniques du shakuhachi.

Dans Sommerwind IIIb, toujours sous la direction de , un ensemble de cordes est au centre du plateau, entouré de part et d'autre du chef, par quatre cors : un « espace acoustique » qui n'est pas sans rappeler, dans une moindre mesure, celui de Gérard Grisey dans Épilogue. Tanada y explore les territoires du timbre et le devenir du son avec l'acuité d'une oreille hors norme. Les cors – merveilleux Manuela Bianchi, Benjamin Degrande, Hugo Thobie-Pereira et Adèle Galichet) sont solistes, entretenant un effet d'écho voire de continuum très étrange tandis que les cordes texturent l'espace microtonal. Troublantes sont ces sonorités proches de la voix entendues à la fin de la pièce, suscitant des effets d'émergence inouïs.

Après le court Prélude pour piano de Salvatore Sciarrino, aussi fluide que jaillissant, joué avec des mitaines par l'étonnante , le violoncelliste met sur son pupitre Interlude de Tanada, une pièce plus précisément inscrite dans la mouvance spectrale à laquelle adhère notre compositeur. L'écriture balaie tout le registre de l'instrument jusqu'à la fragilité des harmoniques extrêmes aiguës, balançant entre geste éruptif et jeu plus délicat (bariolages) aux fluctuations microtonales et à l'aura mystérieuse. L'interprète joue (et avec quel panache !) cet Interlude entre la courante et la sarabande (au temps très étiré) de la Suite n°5 de JS Bach.

est au côté de dans la version à 4 mains de Feria, dernier volet de la Rhapsodie espagnole de emmenée avec un brillant et une virtuosité éblouissante par nos deux jeunes pianistes dont l'homogénéité du clavier et la synergie du geste sont merveille ! Cloches d'adieu, et un sourire… (1994) de sous les doigts de est à fleur d'émotion, jouée ce soir in memoriam . Avec ses notes répétées qui tintent dans les différents registres du clavier, la pièce anticipe Echoing Bells (Cloches en écho), l'ultime partition du compositeur créée en juin dernier par L'Itinéraire qui referme le concert.

Les musiciens de L'Itinéraire sont sur le plateau, dirigés par avec, au piano, Tomoki Akiyama. L'œuvre est superbe, qui floute les contours et engendre une matière-timbre parcourant tous les registres, où s'hybrident et fusionnent les couleurs instrumentales ; avant que la cloche ne résonne et ses accords somptueux cernés par le son filé des cordes en harmoniques ; à la fin de la pièce, un long silence est maintenu par le chef et ses musiciens… avant la réaction chaleureuse du public.

Crédit photographique : © Ayumi Mori (Fuminori Tanada) ; L'Itinéraire

 

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Paris. Conservatoire National supérieur de musique. Salle Nadia Boulanger. 19-XII-2025. Fuminori Tanada (1961-2025) : Sommerwind IV, pour 2 flûtes solistes et 13 flûtes spatialisées ; Interlude, pour violoncelle solo ; Sommerwind IIIb, pour 4 cors et ensemble de cordes ; Echoing Bells, pour ensemble ; Salvatore Sciarrino, Prélude pour piano ; JS Bach : Suite pour violoncelle n°5 en do mineur, BWV 1011 ; Courante et Sarabande ; Maurice Ravel (1875-1937) : Rhapsodie espagnole à quatre mains : Feria ; Tristan Murail (né en 1947) : Cloches d’adieu et un sourire…, pour piano. Saori Ishikawa, Chisato Taniguchi, piano ; Albert Kuchinski, violoncelle ; étudiants des classes du CNSMDP (flûtes, cordes et cors) ; direction Jean-Christophe Vervoitte ; Ensemble L’Itinéraire ; direction Mathieu Romano.

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