Choix cornélien pour deux très belles productions du chef -d'œuvre de Weber à la Scala et à Dresde. Chacun, en tout cas, y trouvera son compte.
Les deux versions proposent une mise en scène relativement traditionnelle, en dépit de quelques tentatives de modernisation. La première, que l'on doit à l'ancien contreténor Axel Köhler, joue sur les liens privilégiés entre l'ouvrage et son lieu de création. Représenté près de 1500 fois dans le cadre du Semperoper, l'opéra composé à Dresde du temps où Weber était maître de chapelle à la cour fut également le dernier opéra à l'affiche avant la destruction de la ville en février 1945, de même qu'il fut le premier que l'on donna pour l'inauguration du nouveau théâtre en 1985. Dans le concept de la mise en scène, l'orage de la Gorge aux Loups fait ainsi figure de l'anéantissement auquel est soumis la population, vêtue comme on pouvait l'être du temps de la dernière guerre. La proposition milanaise, due au metteur en scène Matthias Hartmann, rend plus explicite encore la dimension fantasmagorique de l'ouvrage, nourrie des fantasmes érotiques des uns et des autres, de même qu'elle tire jusqu'à la caricature la composante folklorique gommée à Dresde par le recours à la modernisation. Dans l'ensemble, et l'on en s'en étonnera pas, l'orchestre, les chœurs et les rôles secondaires sont plus idiomatiques dans la version issue de la scène allemande.
Pour la partie strictement vocale, on préfèrera sans doute la version scaligère en raison surtout de la présence en Agathe de Julia Kleiter, dont les grâces mozartiennes irradient le plateau durant toutes ses apparitions. Autre interprète de choix, la basse Günther Groissböck qui brule les planches dans son incarnation d'un Kaspar superbement chantant, et est véritablement diabolique sur le plan scénique. Son homologue de Dresde, Georg Zeppenfeld, paraît plus conventionnel sans pour autant démériter. Endossant le rôle de Max dans les deux versions, Michael König, habitué des emplois wagnériens, est aussi empoté scéniquement à Dresde qu'à Milan. Un rien plus frais en 2015, son Heldentenor paraît plus assorti au soprano plus dramatique de Sara Jakubiak, belle Agathe dans la pure tradition du jugentlich dramatisch allemand. Les deux Ännchen, Christina Landshamer à Dresde et Eva Liebau à Milan, parviennent toutes deux à être fraîches et piquantes tout en évitant l'acidité qu'on associe parfois à ce rôle.
S'il fallait faire un choix ? Dresde pour la tradition et les splendeurs orchestrales, Milan pour la beauté vocale de Kleiter et de Groissböck.
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1 commentaire sur “Freischütz à Dresde et Milan en DVD, choix cornélien”
Vous avez raison. Orchestralement, le Freischütz de Dresde est de tout premier ordre. Et la mise en scène n’est pas déplaisante. A signaler également, la belle prestation d’Albert Dohmen.
Belle qualité d’image et de son, ce qui ne gâche rien.
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Vous avez raison. Orchestralement, le Freischütz de Dresde est de tout premier ordre. Et la mise en scène n’est pas déplaisante. A signaler également, la belle prestation d’Albert Dohmen.
Belle qualité d’image et de son, ce qui ne gâche rien.