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Les étincelles ultimes d’Horowitz à Moscou

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Horowitz in Moscow. Domenico Scarlatti (1685-1757) : Sonates K. 87, K. 280, K. 135. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Sonate n° 10 K. 330. Sergueï Rachmaninov (1873-1943) : Préludes op. 32 n° 5 et n° 12 ; Polka de W.R. Alexandre Scriabine (1872-1915) : Etudes op. 2 n° 1 et op. 8 n° 12. Franz Schubert (1797-1828) : Impromptu D. 935 n° 3. Franz Liszt (1811-1886) : Soirées de Vienne n° 6 – valse caprice d’après Schubert ; Sonnet de Pétrarque 104. Frédéric Chopin (1810-1849) : Mazurkas op. 30 n° 4 et op. 7 n° 3 ; Polonaise op. 53. Robert Schumann (1810-1856) : Rêverie extraite des Scènes d’enfants. Moritz Moszkowski (1854-1925) : Etincelles, extrait des Morceaux caractéristiques op. 36 n° 6. Vladimir Horowitz, piano. Documentaire et interview d’Horowitz. 1 Blu-ray Sony Classical / C Major. Enregistré en public au Conservatoire de Moscou, en avril 1986. Notice de présentation en anglais et allemand. Durée : 60:48

 

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Le 20 avril 1986, soixante-et-un ans après avoir quitté la Russie, Horowitz revint dans son pays pour y donner un récital “historique”. Contrairement aux parutions antérieures en audio, le Blu-ray reprend l’intégralité du concert capté dans la Grande salle du Conservatoire de Moscou.

Ce programme parut à plusieurs reprises sous étiquette Deutsche Grammophon, mais pour une raison de durée et par choix artistique probablement, certaines pièces ne furent pas diffusées : deux des trois sonates de Scarlatti, l’Impromptu de Schubert, la Polonaise op. 53 de Chopin et les Soirées de Vienne n° 6 de Liszt (pour éviter les doublons, Deutsche Grammophon valorisa l’album The Studio Recordings – New York 1985). La captation vidéo reprise par Sony et C major est proposée au format Blu-ray. Cela n’apporte pas grand-chose à la qualité visuelle, la définition étant originellement moyenne, entachée de baisses de lumières dues certainement à l’éclairage déficient de la salle. La réalisation est fort correctement assurée, les caméras bien placées, restituant à la fois le jeu unique d’Horowitz et plus encore, l’émotion partagée entre un artiste de 83 ans et un public bouleversé.

Le Blu-ray est bien rythmé, s’ouvrant sur les préparatifs new-yorkais du piano en partance. L’entracte du concert à Moscou offre quelques minutes d’un entretien avec le pianiste, mais aussi ses rencontres avec des personnes de sa famille ou bien jouant sur le piano de Scriabine. Autant d’images que l’on revoit avec plaisir, ne serait-ce que pour le cabotinage d’Horowitz devant les caméras jusqu’au moment où justifiant un tel voyage, il apparaît profondément ému : il avait décidé de revoir son pays et sa famille avant de disparaître.

Toutes les pièces que nous connaissons si souvent sous ses doigts (le record est détenu par la Rêverie de Schumann dont il a laissé une vingtaine de lectures) portent, dans ce récital, l’empreinte d’un moment particulier. Cela signifie que le poids de l’évènement modifie sensiblement l’interprétation si l’on compare telle ou telle pièce de ce concert avec ce qu’il a gravé en studio. Certes, il y a toujours, la virtuosité tantôt effleurée, tantôt cinglante, la propulsion des graves si percussives, mais la véritable couleur de ce récital est la quête d’un chant partagé, aux sources d’une âme commune, intimiste parfois même. La Sonate K. 87 de Scarlatti, si fluide et concentrée dans l’espace, la Sonate en Ut de Mozart, si amoureusement lyrique – les deux mains sont comme deux personnages délicats qui chuchotent presque dans certains passages – et même les deux préludes de Rachmaninov ne sont pas destinés à un public occidental venu plus volontiers pour le frisson que pour la simple émotion, mais au russe lambda qui a passé des heures dans le froid en espérant obtenir une place. Horowitz n’a nul besoin de convaincre qu’il est une légende et de griser l’auditoire avec le “chic” des Soirées de Vienne, l’élégance hautaine d’une polonaise, cet acte de résistance face à l’occupant russe et dans lequel le public décela, qui sait, quelque message subliminal. Ce même public ferme les yeux et pleure en écoutant l’Impromptu en si bémol majeur de Schubert, les prises de risques et les fausses notes du Sonnet 104 de Pétrarque et de l’Étude op. 8 n° 12 de Scriabine, la partition peut-être la plus proche de l’univers de Rachmaninov. Tout, ici, baigne dans une incroyable atmosphère de nostalgie. La Rêverie déroutera aussi par le choix du tempo, le plus soutenu de toutes les gravures d’Horowitz. Dans une interview, il assura en riant à moitié que cette pièce, incontournable et pourtant si mal placée dans ce programme (entre la Polonaise de Chopin et les Étincelles de Moszkowski) était certainement la partition la plus difficile du répertoire…

C’est finalement ce lien indescriptible entre la scène et la salle, la vision de ce peuple déposer des fleurs et des larmes entre chaque morceau, qui justifient pleinement le visionnage de ce concert.

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Horowitz in Moscow. Domenico Scarlatti (1685-1757) : Sonates K. 87, K. 280, K. 135. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Sonate n° 10 K. 330. Sergueï Rachmaninov (1873-1943) : Préludes op. 32 n° 5 et n° 12 ; Polka de W.R. Alexandre Scriabine (1872-1915) : Etudes op. 2 n° 1 et op. 8 n° 12. Franz Schubert (1797-1828) : Impromptu D. 935 n° 3. Franz Liszt (1811-1886) : Soirées de Vienne n° 6 – valse caprice d’après Schubert ; Sonnet de Pétrarque 104. Frédéric Chopin (1810-1849) : Mazurkas op. 30 n° 4 et op. 7 n° 3 ; Polonaise op. 53. Robert Schumann (1810-1856) : Rêverie extraite des Scènes d’enfants. Moritz Moszkowski (1854-1925) : Etincelles, extrait des Morceaux caractéristiques op. 36 n° 6. Vladimir Horowitz, piano. Documentaire et interview d’Horowitz. 1 Blu-ray Sony Classical / C Major. Enregistré en public au Conservatoire de Moscou, en avril 1986. Notice de présentation en anglais et allemand. Durée : 60:48

 
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