Petites formes dansées au Festival d’Avignon
Chaque été, des lieux intimistes permettent de découvrir des petites formes dansées pendant le Festival d'Avignon. Illustration avec Guillaume et Harold de Gaëlle Bourges, invitée par la Belle Scène Saint-Denis et Quelle aurore, de Soa Ratsifandrihana, dans le cadre du Sujet à vif ! Tentatives.
La chorégraphe prolixe et inventive Gaëlle Bourges revient à ce qu'elle sait faire de plus efficace : l'illustration façon BD animée des chef-d'œuvre artistiques du patrimoine mondial. Après la Fresque des effets du bon ou du mauvais gouvernement à Sienne qu'elle évoquait dans Conjurer la peur, la Tapisserie de l'Apocalypse à Angers dans Ce que tu vois ou celle de la Dame à la licorne au musée de Cluny dans A mon seul désir, voici qu'elle s'attaque à la Tapisserie de Bayeux en racontant à la manière d'une série, style Game of Thrones, les principaux épisodes de l'histoire de Guillaume et Harold, alias Guillaume le Conquérant.
Conçu pour être joué n'importe où, comme les autres spectacles de la collection tout-terrain imaginée par Alban Richard au CCN de Caen, ce duo audacieux et malin conjugue économie de moyen et clarté du récit historique. Avec ses yeux d'aujourd'hui, Gaëlle Bourges décrypte avec limpidité la broderie au cœur d'une polémique. Alors que le président Emmanuel Macron a promis lors de son voyage d'État en Angleterre, de prêter la tapisserie du 11ème siècle, actuellement exposée à Bayeux, au British Museum, à Londres, les conservateurs du patrimoine affirment que l'état de fragilité de la toile ne permet pas le voyage.
Quoi qu'il en soit, il faudra toute la pédagogie et l'inventivité visuelle de Gaëlle Bourges et de ses deux danseurs qui, comme des enfants, font d'une boîte en carton, un trône et d'une couverture polaire, un manteau. Chaque accessoire est en effet découpé dans du carton, parfois peint (le vaisseau, les boucliers), parfois laissé brut, comme le faucon ou le chien que Guillaume porte à bout de bras pendant sa traversée de la Manche. Une magnifique introduction à l'histoire de France.

Sont-elles des influenceuses ou des gogo dangers ? Les deux performeuses Soa Ratsifandrihana et Bonnie Banane percutent les codes de la représentation dans Quelle aurore, dans le cadre du Sujet à vif ! Tentatives avec la SACD qui tente chaque été de créer des rencontres stimulantes et expérimentales entre disciplines.
Soa Ratsifandrihana, récemment récompensée du Prix de la révélation chorégraphique du Syndicat de la critique, a répondu à la commande du Sujet à vif en entraînant avec elle la musicienne Bonnie Banane. Toutes deux se transforment en « it girls », dont le quotidien, entre selfie boudeur et entrainement sur tapis de marche, est entièrement performatif.
Pour la chorégraphe d'origine malgache qui cherche dans son travail à interroger les identités, ce duo se transforme en un défilé de vanités pour mettre en scène une rencontre originale à travers des corps dissemblables : l'une noire et l'autre blanche, l'une danseuse et l'autre non. Entre représentation et mélancolie, le miroir aux alouettes de deux « best friend ever » se dessine dans le ravissant Jardin de la vierge du Lycée Saint-Joseph.
Crédits photographiques pour Le sujet à vif ! : Christophe Raynaud de Lage / Festival d'Avignon
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