La Scène, Spectacles divers

Jacques-Louis David sur fond d’hymnes et chants populaires de la Révolution

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Paris. Auditorium du Louvre. 8-XI-2025. La lame et le pinceau. David, metteur en scène de la Révolution. Mise en scène et conception : Benjamin Lazar. Direction musicale : Arnaud Marzorati. Art-vidéo : Joseph Paris. Lumières : Camille Mauplot. Son : Joan Cunha. Musiques de Frédéric Blasius, C.W. Gluck, F.J. Gossec, André Grétry, Bernardo Porta et chants anonymes. Avec : Judith Chemla, Benjamin Lazar, Arnaud Marzorati et l’ensemble Les Lunaisiens, Stanislas Roquette, Thibault Lacroix, et le chœur amateur dirigé par Jean-Sébastien Beauvais

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À l'Auditorium du musée du Louvre, en lien avec l'exposition dédiée à Jacques-Louis David, le spectacle La lame et le pinceau conçu par met en scène les souvenirs du peintre durant son emprisonnement : sur fond de musiques d'époque, ses toiles et les personnages de la période révolutionnaire reprennent vie.

Au centre de la scène, trois cubes noirs alignés font office de tables derrière lesquelles se tiennent les acteurs, face au public, incarnant chacun tour à tour plusieurs personnages, dont ceux qui se livreront à l'interrogatoire du peintre lors de son procès. À gauche, dans la pénombre quatre instrumentistes de l'ensemble et le chanteur . Après un avertissement (« Le Comité de salut public condamne ce spectacle ! ») lancé par l'acteur , qui incarnera David ensuite, les images d'hommes et de femmes dessinées par le peintre défilent sur un écran géant, aux sons du serpent et de la harpe. « Regarder ces dessins, les peintures de David, c'est y chercher les hommes ».

Plusieurs chefs-d'œuvre sont ainsi projetés au fil du récit, Le Serment des Horaces, Marat assassiné, Les licteurs rapportant à Brutus les corps de ses fils… tandis que des textes lus décrivent les scènes et orientent le regard sur des détails montrés en gros plans, amenant ainsi le spectateur à décrypter les expressions des visages et des corps, la psychologie des personnages. Ceux-là peints deviennent parfois réels, vivants, des figurants de chair s'y substituant en fondu-enchaîné, les deux finissant par se confondre, « le geste de peinture devenant geste de chair ». David ne se contenta pas de produire les images puissamment éloquentes de ses peintures. Député de la Convention, il les fit circuler, et surtout eut en charge l'organisation des cérémonies et fêtes révolutionnaires.

Le spectacle propose de restituer l'esprit de ces évènements grandioses, relatés de façon quasi journalistique et illustrés, au pied des toiles projetées, scéniquement et musicalement. Ainsi, l'excellent chœur amateur dirigé par Jean-Sébastien Beauvais entonne-t-il depuis un balcon latéral l'hymne révolutionnaire « Dieu puissant daigne soutenir notre république naissante… » tandis que les acteurs nous font revivre le Serment du jeu de Paume. Ainsi chante-t-il l'hymne de « Ce ne sont plus les pleurs qu'il est temps de répandre… » composé pour la translation du corps de Voltaire au Panthéon, dont la progression du cortège nous est décrite, dans les émotions de cet évènement nouveau. Ainsi nous conte-t-on aussi la pompe funèbre pour les obsèques de Marat jusqu'au jardin des Cordeliers sur la musique de , et le sort de la reine Marie-Antoinette dont la comédienne et chanteuse adopte la pose de profil croquée par le peintre quelques minutes avant qu'elle soit conduite à l'échafaud. Autre femmes évoquées, Olympe de Gouges et Manon Roland, qui furent guillotinées aussi, ces « ombres chéries » auxquelles la chanteuse prête sa voix dans l'air « Ombre chérie, ombre sacrée… » extrait d'Andromaque d'André Grétry. La chanson populaire dont et explorent le répertoire depuis ses origines, témoigne de la présence vivante des foules enjouées qui viennent assister à ces fêtes. La célèbre Guillotine permanente (dont la clarinette de Roberta Cristini imite non sans une pincée d'humour et de ridicule le bruit de la lame), la Marseillaise devenue hymne national et le Ah ça ira sont entonnés avec engouement, accompagnés par la trompette, la clarinette, le serpent et la harpe, instruments anciens et familiers des Lunaisiens. On retient un moment de pur régal lorsque les talentueux acteurs et procèdent à la déclinaison orale du calendrier révolutionnaire et de ses jours aux noms basés sur la décade, se livrant avec eux à une ronde verbale et musicale endiablée dans un esprit enjoué et humoristique. On n'oubliera pas non plus une autre figure importante, celle d'André Chénier qui rompit son amitié avec David en 1792, entré aussi en scène sous les traits de pour déballer ses griefs accusateurs à l'encontre du peintre, dont l'autoportrait projeté cache sous une ombre la déformation de sa joue…Ni enfin l'Hymne à l'Être Suprême de Gossec vaillamment entonné par le chœur de Jean-Sébastien Beauvais.

Ce spectacle vivant, bien monté et bien défendu par ses acteurs (musiciens, comédiens et vidéaste), éclaire un pan de l'Histoire de France des coups de pinceau d'un peintre qui les transforma en autant de lames, telles celles luisantes des glaives et de la guillotine, immortalisé aussi par ses hymnes et chansons populaires.

Crédits photographiques :  , tournage au Musée du Louvre ; ©  Joseph Paris

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Paris. Auditorium du Louvre. 8-XI-2025. La lame et le pinceau. David, metteur en scène de la Révolution. Mise en scène et conception : Benjamin Lazar. Direction musicale : Arnaud Marzorati. Art-vidéo : Joseph Paris. Lumières : Camille Mauplot. Son : Joan Cunha. Musiques de Frédéric Blasius, C.W. Gluck, F.J. Gossec, André Grétry, Bernardo Porta et chants anonymes. Avec : Judith Chemla, Benjamin Lazar, Arnaud Marzorati et l’ensemble Les Lunaisiens, Stanislas Roquette, Thibault Lacroix, et le chœur amateur dirigé par Jean-Sébastien Beauvais

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