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Paris, salle Gaveau. 10-I-2013. Franco Fagioli, contre-ténor. Airs et cantates de Frescobaldi, Monteverdi, Ferrari, Doni, Haendel, Vivaldi, Geminiani, Paisiello. Marco Frezzato, violoncelle ; Luca Pianca, archiluth ; Jeremy Joseph, clavecin.

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Le succès retentissant du récent Artaserse nancéen, brillamment servi par cinq contre-ténors d'exception, a apporté la preuve, s'il en était encore besoin, de l'éclatante santé de cette tessiture ; une voix qui semble avoir désormais dépassé les limites du possible ! C'est en particulier pour cette démesure vocale que l'éblouissant contre-ténor argentin était fiévreusement attendu à la salle Gaveau à Paris lors d'un récital unique intitulé « Airs baroques virtuoses ».

Le programme semble pourtant contredire ce titre prometteur en pyrotechnie, avec une première partie tournée vers des pages prébaroques appartenant au parlare cantando de Monteverdi, Frescobaldi ou Ferrari, le tout accompagné par un effectif minimaliste : un simple continuo de trois instruments (un archiluth, un violoncelle et un clavecin).

Effectivement, point de feu d'artifice vocal pour commencer le récital mais des pages autrement compliquées : des récitatifs expressifs dans lesquels l'interprète peut donner libre cours à une théâtralité exacerbée, et ainsi rendre éminemment vivantes, brillantes et virtuoses des pages qui auraient pu s'avérer bien ennuyeuses dans le gosier d'autres interprètes.

Poésie, caresses vocales, trilles délicates dans les « scherzi musicali » de Monteverdi alternent avec un Ferrari au rythme dansant voire jazzy !

Avec Haendel et Vivaldi, ce surdoué du chant va plus loin encore et dévoile de rares capacités vocales: son large ambitus lui permet d'atteindre de sidérantes notes suraiguës à faire pâlir ses confrères contre-ténors ou consœurs sopranos ; sa technique lui permet d'aborder crânement les pages les plus virtuoses, son agilité et son souffle long font de lui un chanteur aux prouesses vocales hors du commun. On reste bluffé !

Pourtant l'artiste n'a pas toujours connu ce niveau d'excellence : on se souvient d'un Giulio Cesare zurichois au goût d'inachevé, ou encore un premier disque encore timide. Mais à Zurich, son chemin a croisé celui d'une muse, celle qui semble l'avoir très largement inspiré et aidé à parfaire technique vocale et présence scénique : la talentueuse Cecilia Bartoli ! Les similitudes de timbre sont si troublantes que les yeux fermés, on s'y tromperait ! Plus encore sa gestuelle, ses petits pas de danse, cette façon de frapper dans les mains avec cette touche flamenco, les relances de la main adressées aux instrumentistes rappellent La Bartoli. Et comme elle, il excelle dans l'art de raconter des histoires, de planter décors et atmosphères comme pour la bucolique cantate de Haendel ; il confère à cette simple ballade une tendresse et une poésie infinie « Aure soave », ou insuffle encore une déchirante souffrance amoureuse à la cantate de Vivaldi.

Son panache et sa virtuosité débridée couplés à une forte présence scénique ravivent avec bonheur toutes les fois où l'on a eu la chance de le voir mis en scène, car c'est bien à la scène qu'il peut véritablement donner libre court à son sens de la théâtralité : on se souvient avec bonheur des rôles de Tolomeo et Cesare dans Giulio Cesare à Paris, Zurich et Karlsruhe, Ariodante à Karlsruhe, Rodelinda à Martina Franca… et dernièrement ce rôle périlleux dans l'opéra Artaserse de Vinci, dans lequel son air vertigineux de la fin du premier acte est resté gravé dans les mémoires : « Vo solcando un mar crudel  », air qui a projeté un public à la limite de l'hystérie au temps des castrats ! C'est d'ailleurs cet air que le public de la salle Gaveau lui a réclamé avec forte insistance ! Difficile sans orchestre, pourtant il s'y est volontiers lancé a cappella avec brio !

Après le succès nancéen, on annonce déjà une reprise de cet Artaserse avec à Versailles la saison prochaine !

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