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Augusta Holmès dans l’ombre de Wagner à la Philharmonie de Paris

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Paris. Philharmonie. Grande Salle Pierre Boulez. 4-II-2023. Augusta Holmès (1847-1903) : Andromède (1883) ; Pologne (1883) ; La Nuit et l’Amour (1888) ; Richard Wagner (1813-1883) : Wesendonck lieder ; Ouverture des Fées ; Ouverture de Tannhäuser. Ann Petersen, soprano. Orchestre national de Metz-Grand Est, direction : David Reiland

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L' Grand Est et son directeur musical nous proposent de redécouvrir la compositrice française (1847-1903) en appariant quelques une de ses œuvres symphoniques (Andromède, Pologne, La Nuit et l'Amour) à celles de son modèle,  : Ouverture de Tannhäuser, des Fées et Wesendonck lieder chantés par la soprano .

En refusant de se soumettre aux codes mondains de son entourage, choisit envers et contre tout la musique et la liberté. Un choix audacieux qui lui valut l'admiration de ses pairs (César Franck, Saint-Saëns, Liszt, Wagner) mais également le misogyne rejet de ses contemporains qui la confinèrent dès sa mort à un long oubli. Un silence aujourd'hui rompu par cet hommage qui lui est justement rendu par la Philharmonie de Paris en collaboration avec le Palazzetto Bru Zane, en attendant un livre à paraître au printemps chez Actes Sud. Son catalogue étendu aborde tous les genres (mélodies, opéra et musique symphonique) avec une prédilection pour les poèmes symphoniques, genre très prisé à son époque, souvent inspirés chez elle par des œuvres picturales.

La postérité est souvent sévère, et parfois injuste, aussi faut-il rendre grâce à et à l'orchestre de Metz de remettre à l'honneur, au disque comme à la scène, cette compositrice « scandaleuse ». Au-delà d'une curiosité quelque peu coupable et anecdotique et de toute considération positive liée au genre, il faut bien avouer que la musique d' nous séduit ce soir par ses couleurs, trouvant sous la baguette du chef, ancien assistant de Simon Rattle, un fervent ambassadeur. Loin d'en être un pâle épigone, ses compositions furent largement influencées par son modèle, , et son Ring (1876) dont on s'amusera, du cor de Siegfried à la Chevauchée de Walkyries, à retrouver les réminiscences dans les courts poèmes symphoniques qui nous sont présentés, ici, centrés autour des thèmes de la liberté et de l'amour.

Andromède (1883) est probablement le plus connu. Il s'inspire de la mythologie dont la musique très narrative décrit le cours. en dresse un tableau contrasté et coloré, porté par un phrasé tout en relief. Après une ouverture solennelle par les trombones renforcés par des violoncelles vrombissants figurant l'attente d'Andromède sur son rocher au milieu des flots, le phrasé s'anime pour évoluer par vagues sur une belle dynamique pleine d'allant rapidement suspendue par un épisode plus méditatif confié au violon et à la harpe empreint de solitude et de désolation, avant que l'arrivée de Persée ne soit annoncée par des fanfares haletantes de cuivres pour se conclure sur le triomphe de l'amour, d'un lyrisme tendu, faisant intervenir violon, violoncelle, altos, clarinette, harpe et surtout un superbe solo de cor anglais.

Pologne (1883) exalte la liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes et plus particulièrement les massacres à Varsovie lors des multiples insurrections de 1830, 1848 et 1863. Moins narratif que le précédent, débutant dans un climat de gravité entretenu par les vents, il alterne lyrisme et dramatisme, mazurka martiale et sonneries militaires sur un phrasé chaotique tendu et très rythmique (fanfares de cuivres, cordes virevoltantes, harpe, flute et percussions) d'une belle ampleur sonore sans saturation.

La Nuit et l'Amour (1888) est à l'inverse une pièce plus romantique se déployant dans une atmosphère délicate et élégante où l'on apprécie tout particulièrement le sublime legato des cordes (violoncelles) comme la clarté et la transparence orchestrale mettant au jour de beaux contrechants cuivrés.

Non mois romantiques et passionnés les Wesendonck lieder chantés par la soprano enchantent par la qualité conjointe de la voix et de l'orchestre s'entrelaçant dans une émouvante symbiose. Si Der Engel pâtit d'un court instant de chauffe vocal, on est impressionné d'emblée par l'équilibre et les sonorités diaphanes de l'orchestre ainsi que par la direction précise et attentive de David Reiland. Stehe still est animé par un intense sentiment d'urgence sous tendu par les formidables qualités de diseuse et l'impeccable diction de la soprano dans une déclamation enflammée ; Si Schmerzen manque un peu de puissance, Im Treibhaus conduit sur un tempo très lent constitue sans doute le sommet du cycle par les accents tritanesques de l'orchestre, comme par le sublime legato, les aigus filés et l'implication scénique de la soprano, tandis que Träume suspend le temps dans un moment d'ineffable rêverie.

L'ouverture des Fées et de Tannhäuser confirment avec éclat la cohésion et la superbe plastique de la phalange lorraine, concluant une belle soirée de musique !

Crédit photographique : © Anders Bach

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