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6e édition du Festival Aux Armes, Contemporains !

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Paris. La Scala. Festival Aux Armes, Contemporains !. 14-X-2023. Piccola Scala
19h30 : Giorgio Netti (né en 1963) : Necessità d’interrogare il cielo (extrait) ; Samir Amarouch (né en 1991) : Trio pour saxophone soprano, accordéon microtonal et guitare électrique ; Yann Robin (né en 1974) : Schizophrenia, pour saxophone soprano et clarinette sib ; Bruno Mantovani (né en 1974) : Rondes de printemps, pour saxophone soprano. Sandro Compagnon, saxophone soprano ; Nicolas Baldeyrou, clarinette ; Jean-Étienne Sotty, accordéon microtonal; Rémy Reber, guitare électrique.

21h30 : Alexandre Jamar (né en 1995) : Four songs from the Bell Jar, pour soprano,flûte, clarinette, violon, violoncelle, piano et percussion ; Naoki Sakata (née en 1981) : Obsidian Waves, pour flûte, clarinette, violon, violoncelle, piano et percussion ; Dahae Boo (née en 1988), Après, le Silence, pour violon, clarinette, violoncelle, piano, et électronique ; Mathieu Bonilla (né en 1979), Einfühlung, pour flûte, clarinette, violon, violoncelle, piano et percussion. Ensemble écoute : Myrianne Fleur, soprano ; Rachel Koblyakov, violon ; Emmanuel Acurero, violoncelle ; Samuel Casale, flûte ; Joséphine Besançon, clarinette ; Quentin Dubreuil, percussion ; Orlando Bass, piano ; Fernando Palomeque, piano et direction.

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En partenariat avec la Sacem, le festival Aux Armes, Contemporains !, porté par son directeur Rodolphe Bruneau-Boulmier, a passé commande à une quinzaine de compositeurs et donné la parole aux jeunes interprètes.

Ainsi cette carte blanche offerte au jeune et merveilleux saxophoniste qui vient de sortir un CD entièrement consacré aux œuvres originales ou transcrites pour saxophone de . Quatre pièces sont à l'affiche de son récital, alternant solo, duo et trio. Dans Necessità d'interrogare il cielo, le Milanais compose la fragilité, jouant sur les fluctuations du spectre harmonique et l'instabilité de ses partiels via les sons multiphoniques du saxophone soprano et la microchromie d'un espace exploré dans toutes ses configurations : une pièce éprouvante pour l'interprète qui la conduit avec une énergie sans faille.

Les deux partenaires, accordéoniste d'une part () et guitariste d'autre part () se sont discrètement approchés du saxophoniste pour enchaîner dans l'élan avec le Trio de Samir Amarouch donné ce soir partiellement. L'écriture instaure d'emblée la superposition sauvage des trois couches sonores autonomes qui donnent le ton et la haute tension de cette pièce radicale. Les combinaisons sont multiples pour les trois forces en présence, entre horizontalité et verticalité, répétition et variation, régularité et ruptures rythmiques ; Trio est un work in progress, encore fragile dans son fonctionnement, mais riche de promesses, dont la version définitive doit accueillir la danse !

Schizophrenia de confronte deux instruments, ni tout à fait différents, ni tout à fait autres… Le saxophone soprano de et la clarinette de . L'œuvre joue sur les frictions de timbre et l'enchevêtrement des trajectoires dans un espace microtonal où s'inscrivent de somptueux multiphoniques : l'écriture est virtuose voire acrobatique et la joute sonore sans merci, aux limites du supportable dans la Piccola Scala, lieu un rien confiné qui ne permet pas aux sonorités de se déployer dans leur pleine résonance.

referme ce récital avec Rondes de printemps (2020) de , un bijou taillé sur mesure pour notre saxophoniste hors norme qui la joue par cœur, avec une adhésion totale du geste instrumental au mouvement rotatoire de la musique. Voir, à ce titre, après le slap inaugural, la manière presque chorégraphique avec laquelle il débute la pièce. Car, au-delà de l'hommage à Debussy, le titre Rondes de printemps doit être pris au pied de la lettre : une musique écrite en mai 2020 qui ne fait que tourner selon des périodicités contrariées. Se glisse entre deux tours (clin d'œil au maître vénéré) le profil microtonal d'un chant populaire aussi bref que délicieux. L'aisance de Sandro Compagnon est déconcertante et la sonorité toujours contrôlée, dont le velouté et l'ampleur font merveille.

Le concert du soir invite l', fondé en 2015 et encore peu connu du public parisien, qui sort son premier CD sous le label Scala musique. Interprètes et compositeurs ont bénéficié d'une résidence d'une semaine à la Scala Provence (en Avignon) où ont été enregistrées les quatre pièces toutes récentes entendues ce soir.

Prix Élan 2022, le Belge a le vent en poupe. Il est dans les rangs du public et vient nous présenter sa nouvelle œuvre (2022), Four Songs from the Bell Jar, un projet singulier inspiré par celui de la jeune poétesse Nazifa Islam. Cette dernière a pour habitude d'écrire ses poèmes en prélevant les mots qui les composent de textes préexistants. Un processus de retrait qu'adopte le compositeur dans Four Songs from the Bell Jar pour soprano et six instruments où il fait revenir la même trame poétique et musicale quatre fois avec de moins en moins de mots et une musique de plus en plus raréfiée. C'est l'organicité du matériau vocal et instrumental qui est recherché dans une première occurrence où l'intensité culmine sur les derniers mots du poème.

À chaque reprise, le filtrage opère ; le tissu sonore progressivement s'effiloche et se troue, les couleurs s'estompent et le mouvement se fige dans un espace-temps presqu'oppressant, jusqu'au silence vertigineux. Le timbre de et l'intensité de sa performance impressionnent aux côtés des six instrumentistes, tous dirigés par Fernando Palomeque.

C'est la troisième version d'Obsidian Waves du Japonais qui est jouée ce soir, un compositeur que l'ensemble accompagne depuis quelques années et dont l'univers lui est familier. L'écriture y est ciselée, qui texture richement l'espace dans un premier mouvement nourri par les résonances graves du piano. Sorte d'étude aux allures minutieusement agencée, le deuxième mouvement articule différents gestes instrumentaux, rebond, gettato et bisbigliando, qui reviennent dans le finale fluido, aussi délicat que virtuose, sans faire de vagues pour autant.

L'idée de traces, en lien avec la mémoire, relie les deux dernières pièces. La Coréenne a repris la formation atypique du Quatuor pour la fin du temps d' – violon, clarinette, violoncelle et piano – à laquelle s'adjoint une partie électroacoustique, dans Après, le Silence. enchaînant ici sept mouvements. Ainsi des fragments/citations du chef d'œuvre de Messiaen s'entendent sous le jeu des quatre musiciens (c'est qui est au piano) comme à travers les haut-parleurs, avant de laisser libre cours aux commentaires d'allure quasi improvisée qui s'éloignent d'autant de l'original.

On est davantage séduit par Einfühlung (Empathie) de , une pièce à l'itinéraire beaucoup plus risqué où l'imagination est à l'œuvre. Dans cette partition écrite durant le confinement (comme celle de ), le compositeur a tenté de saisir l'émotion que lui procurent « les musiques qu'il aime » (celle du répertoire comme celle d'aujourd'hui) en écrivant ce que l'on pourrait appeler des anamorphoses : images modifiées d'horizons sonores très différenciés que l'auditeur pourra, ou pas, identifier. Parce que les contours y sont souvent floutés et l'écriture remodelée par le geste personnel du compositeur : cette traversée de la mémoire débute par le son de l'archet sur le flexatone, une ondulation bruitée et flottante qui reviendra durant toute la trajectoire. Les oscillations et autres allures vibratoires habitent cette musique en constante mutation, qui projette des images fugitives, entre matière lisse qui s'étire et sections rythmiques et musclées évoquant certains profils hispaniques. La réactivité des instrumentistes est exemplaire sous le geste de Fernando Palomeque qui confère à cette musique tremblée sa part d'onirisme et ses visions fantasmées.

Crédit photographique : © La Scala Paris

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21h30 : Alexandre Jamar (né en 1995) : Four songs from the Bell Jar, pour soprano,flûte, clarinette, violon, violoncelle, piano et percussion ; Naoki Sakata (née en 1981) : Obsidian Waves, pour flûte, clarinette, violon, violoncelle, piano et percussion ; Dahae Boo (née en 1988), Après, le Silence, pour violon, clarinette, violoncelle, piano, et électronique ; Mathieu Bonilla (né en 1979), Einfühlung, pour flûte, clarinette, violon, violoncelle, piano et percussion. Ensemble écoute : Myrianne Fleur, soprano ; Rachel Koblyakov, violon ; Emmanuel Acurero, violoncelle ; Samuel Casale, flûte ; Joséphine Besançon, clarinette ; Quentin Dubreuil, percussion ; Orlando Bass, piano ; Fernando Palomeque, piano et direction.

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