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Esa-Pekka Salonen et l’Orchestre de Paris, un concert tout en couleurs

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Paris. Philharmonie. Grande Salle Pierre Boulez. 8-II-2024. Johann-Sébastian Bach (1685-1750) : Fantaisie et Fugue en ut mineur BWV 537, dans une orchestration d’Edward Elgar (1922) ; Edward Elgar (1857-1934) : Sea Pictures, op. 37 ; Paul Hindemith (1895-1963) : Ragtime ; Symphonie « Matis der Maler ». Dame Sarah Connolly, mezzo-soprano. Orchestre de Paris, direction : Esa-Pekka Salonen.

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Encore un programme jubilatoire, très coloré, pour ce deuxième concert d' à la tête de l'.

Le programme, dans un raccourci saisissant, convoque J. S Bach avec sa Fantaisie et Fugue BWV 537, habillée pour l'occasion de l'orchestration haute en couleurs d'Elgar Edward, lui-même représenté par ses mouvantes et méditatives Sea Pictures interprétées par Sarah Connolly, avant que n'apporte la dernière touche à cette rutilante palette orchestrale avec Ragtime et la Symphonie tirée de Matis le peintre.

Si l'on sait qu'il n'existe pas (dans notre cerveau) d'analogies directes entre couleur et son, on sait également combien la musique est capable, au-delà des sons bruts, d'engendrer des impressions visuelles d'une rare émotion, preuve en est cette orchestration opulente de la Fantaisie et Fugue en ut mineur de J. S Bach concoctée par Elgar Edward (1922) qui en avive étonnamment le climat. Ce que Richard Strauss refusa pour partie, Elgar Edward nous l'offre en totalité avec cette réécriture (initialement prévue à quatre mains), certes un peu théâtrale mais d'une vivifiante ardeur, qui gagne assurément en couleur et force de vie ce qu'elle perd en ferveur et intériorité, portée par des cordes onctueuses dans la Fantaisie, puis par force percussions, glissandos et gammes fusées dans la Fugue où les lignes s'entrelacent dans une dynamique grandiose, un peu parodique…

Tout autre climat, éminemment romantique et fortement teinté de mélancolie, pour les Sea Pictures d'Elgar Edward (1899) : cycle de cinq mélodies sur des textes de cinq poètes différents comme autant de moments aux couleurs changeantes évoquant un paysage marin où la houle marine mouvante accompagne une méditation sur la mort, la passion amoureuse, oscillant entre douleur et félicité en s'appuyant sur une orchestration particulièrement riche dont (remplaçant Nina Stemme initialement prévue) nous livre une jolie interprétation, pleine de poésie, mais manquant un peu de projection pour résister aux assauts, pourtant modérés, de l', bien contenu par .

Véritable exercice d'orchestre et de direction Ragtime de (1922) ouvre la seconde partie sur un pied de nez… A partir d'une très libre référence au Clavier bien tempéré, réalise une sorte de collage musical expressionniste, parodique, dissonant et éclectique, mêlant accents afro-américains et circassiens sur un phrasé très rythmique dont Salonen délivre une interprétation jubilatoire, presque barbare, parfaitement en place, dans une frénésie éclatante, très percussive et fortement cuivrée.

Plus policée, dans des teintes plus pastel, parcourant tous les pupitres de la phalange parisienne, la Symphonie extraite de l'opéra Matis le peintre (1934) déroule ensuite ses trois mouvements se référant chacun au célèbre retable d'Issenheim de Mathias Grünewald : le concert angélique (prélude du premier acte) débute par une introduction lente, méditative, dans un calme quasi religieux avant que le phrasé ne se creuse, sollicitant flute, trombones, cors et trompettes sur une dynamique riche en nuances où l'on admire l'impeccable organisation des plans sonores ; la Mise au tombeau, (interlude entre les deux scènes du septième tableau) met en avant des cordes élégiaques renforcées par les bois (flute et hautbois) dans une atmosphère menaçante ; la Tentation de Saint-Antoine (sixième tableau) imprégnée d'attente et d'urgence voit se déployer une progression inexorable (cuivres et cordes) sur une rythmique implacable où alternent des épisodes lyriques confiés aux cordes graves et des épisodes plus tumultueux du tutti scandés par des déflagrations de percussions avant que l'apparition d'une mélodie lyrique ne laisse espérer une victoire contre les démons de l'Enfer dans une conclusion apaisée célébrant la gloire céleste.

Crédit photographique : © Minna Hatinen

 

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Paris. Philharmonie. Grande Salle Pierre Boulez. 8-II-2024. Johann-Sébastian Bach (1685-1750) : Fantaisie et Fugue en ut mineur BWV 537, dans une orchestration d’Edward Elgar (1922) ; Edward Elgar (1857-1934) : Sea Pictures, op. 37 ; Paul Hindemith (1895-1963) : Ragtime ; Symphonie « Matis der Maler ». Dame Sarah Connolly, mezzo-soprano. Orchestre de Paris, direction : Esa-Pekka Salonen.

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