Airs véristes avec Vittorio Grigolo
Dans un programme où se sont illustrés les plus grands, le ténor italien montre vite ses limites. Orchestre sobre et stylé pour un chant par trop débraillé.

L'année 2024, à n'en pas douter, apportera son lot de récitals Puccini, et personne n'aurait l'idée de s'en plaindre. Après Jonathan Tetelmann (Clef ResMusica) et Angela Gheorghiu, c'est aujourd'hui au tour de Vittorio Grigolo, dont le dernier récital remonte à 2016, de nous proposer sa contribution. Si Puccini constitue à peu près la moitié de ce CD relativement court, tout juste trois quarts d'heure, le reste du programme est complété par des airs véristes relativement connus, à l'exception de la seule rareté de l'album, un air de l'Iris de Mascagni.
Sans doute n'est-il pas raisonnable pour le ténor italien, dont les moyens lyriques conviennent idéalement à Donizetti ou au jeune Verdi, voire à certains emplois de l'opéra français, de vouloir se hisser à des rôles spinto comme Andrea Chénier, Calaf, Canio et Dick Johnson, dans lesquels ont brillé autrefois les Corelli, Del Monaco ou plus récemment Domingo. La voix de Vittorio Grigolo montre vite ses limites, ses fragilités et le manque de réserve vocale même si, contrairement à ce qu'on pouvait craindre, « Nessun dorma » est plutôt de belle tenue. Plus gênant à nos oreilles, le ton généralement doucereux et larmoyant employé pour nombreux de ces extraits, ton qui nous ramène aux pires excès expressifs de l'école vériste des années 1930-40. Verissimo, on en veut bien, mais pas dans la dégringolade stylistique et la débauche de trémolos. Ces réserves étant exprimées, le CD n'en contient pas moins quelques jolies réussites, comme par exemple un assez élégant « La dolcissima effigie » d'Adriana Lecouvreur, chanté piano sur toute la durée de l'air. Ici, Grigolo rappellerait presque Carreras dans ses meilleures années. On notera la belle entente avec le chef Pier Giorgio Morandi qui, à la tête de l'Orchestre national tchèque, dirige avec élégance et sobriété des partitions qui n'ont pas fini de révéler leur beauté orchestrale.









