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Un Grand Macabre poétique et coloré pour une nouvelle ère à Wiesbaden

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Wiesbaden. Hessisches Staatstheater. György Ligeti (1923-2006) : Le Grand Macabre, opéra d’après la pièce de Michel de Ghelderode. Mise en scène : Pınar Karabulut ; décor : Jo Schramm ; costumes : Teresa Vergho. Avec : Seth Carico (Nekrotzar), Cornel Frey (Piet the Pot), Galina Benevich (Prince Go-go), Josefine Mindus (Venus/Gepopo), Sion Goronwy (Astradamors), Ariana Lucas (Mescalina), Sascha Zarrabi, Hovhannes Karapetyan (Ministres), Inna Fedorii (Amanda), Fleuranne Brockway (Amando) et Wooseok Shim, James Young, Fabian-Jakob Balkhausen. Chœur du Théâtre national de Hesse ; Hessisches Staatsorchester Wiesbaden ; direction : Leo McFall

fait les bons choix et contribue avec le chef à créer un spectacle attachant et complexe où les chanteurs sont en vedette.

Le Théâtre national de Wiesbaden, en ce début de saison, fête un nouveau départ, après des années de crise : le précédent intendant, le metteur en scène Uwe Eric Laufenberg, a fini par partir du jour au lendemain en janvier dernier après avoir longtemps alimenté la chronique à force de positions polémiques (sur la crise du Coronavirus ou sur la guerre en Ukraine) et de conflits violents avec la critique, sans même parler des violents conflits internes. La nouvelle intendance composée d'un duo féminin, Dorothea Hartmann et Beate Heine, ouvre sa première saison avec Le Grand Macabre de , une fin du monde pour faire table rase en quelque sorte : elles ont choisi une metteuse en scène encore assez novice en matière lyrique, , en collaboration avec le tout aussi nouveau directeur musical de la maison, . Ce dernier, avec son orchestre, reste visible tout au long du spectacle : ils sont placés en fond de scène plutôt qu'en fosse, ce qui est loin d'être inédit et n'est pas sans conséquence acoustique. L'aire de jeu s'avance jusqu'au premier rang de la salle, si bien que les chanteurs paraissent surexposés par rapport à un orchestre qu'on aimerait parfois entendre un peu plus – ce qui, après tout, est peut-être préférable à ce qu'on avait pu entendre cet été à Munich, où le décor ouvert du spectacle de Krzysztof Warlikowski tendait à manger les voix. La scène est constituée d'un grand disque incliné, complétée seulement par un gigantesque cône percé qui plane au-dessus de l'orchestre, à la fois porte d'entrée de Nekrotzar et instrument d'astronomie, qui confère du mouvement au décor tout en donnant toute sa dimension à l'action : c'est à la fois simple, lisible et pertinent.

On pourra reprocher à la metteuse en scène de ne pas être parvenue à donner un sens profond à la fin du monde ratée par Nekrotzar, pas plus que Warlikowski, mais on ne peut nier que sa mise en scène est à la fois efficacement divertissante et finalement pleine de qualités poétiques que le spectacle munichois n'offrait pas. Les costumes de Teresa Vergho, marqués par la couleur et la fantaisie, y sont pour beaucoup, mais la direction d'acteurs contribue beaucoup à donner cohérence et vie à ce qu'on voit sur scène : la tendresse du regard rend toute cette petite troupe terriblement sympathique.

Le couple grotesque de l'astronome Astradamors et de la mégère Mescalina est particulièrement réussi, avec une réalisation vocale à la hauteur des personnages : elle () est beaucoup plus vive, beaucoup moins d'une seule pièce que d'habitude, avec même des moments de fragilité ; lui (), Neptune drag queen a la légèreté circassienne, en pleine contradiction avec sa stature et sa profondeur vocale. en Nekrotzar a beaucoup plus de présence vocale que Michael Nagy à Munich. Il ne fait décidément pas peur : bien sûr, il essaie de détruire le monde, mais cette grande ambition paraît si peu en adéquation avec ses moyens d'action qu'on ne peut que sourire. Piet the Pot, de toute façon le personnage le plus sympathique de l'histoire, parvient avec à toute son efficacité comique, tout comme le numéro de Gepopo avec . Le traitement du prince Go-Go est lui beaucoup plus original : le choix d'une femme plutôt que d'un contre-ténor retire beaucoup de sa fragilité chancelante au personnage, qu'on sent dès le début au bord de la révolte ; c'est dramatiquement efficace, bien assumé par , à défaut de respecter tout à fait l'esprit de l'œuvre. L'excellente préparation musicale de la troupe fait honneur à ; ce qu'on entend de l'orchestre, dans ces conditions qui ne le favorisent pas, confirme la qualité de son travail.

Crédits photographiques : © Sandra Then

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Wiesbaden. Hessisches Staatstheater. György Ligeti (1923-2006) : Le Grand Macabre, opéra d’après la pièce de Michel de Ghelderode. Mise en scène : Pınar Karabulut ; décor : Jo Schramm ; costumes : Teresa Vergho. Avec : Seth Carico (Nekrotzar), Cornel Frey (Piet the Pot), Galina Benevich (Prince Go-go), Josefine Mindus (Venus/Gepopo), Sion Goronwy (Astradamors), Ariana Lucas (Mescalina), Sascha Zarrabi, Hovhannes Karapetyan (Ministres), Inna Fedorii (Amanda), Fleuranne Brockway (Amando) et Wooseok Shim, James Young, Fabian-Jakob Balkhausen. Chœur du Théâtre national de Hesse ; Hessisches Staatsorchester Wiesbaden ; direction : Leo McFall

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