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Akhnaten : le « hanteur » de rêves

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Strasbourg. Opéra du Rhin. 23.09.2002. Philip Glass : Akhnaten (Akhenaton).

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Dans le cadre du Festival Musica, l'opéra du Rhin propose l'opéra de Akhnaten (Akhenaton) dans une production héritée de Boston. La mise en scène évite l'écueil de la « leçon de psychanalyse » gratuite pour rendre au symbole sa dimension universelle. Chacun peut ainsi comprendre le spectacle à sa manière, ou tout simplement se laisser porter par son esthétique.

Les données historiques sont minces : un pharaon atypique dont la mémoire nous est parvenue par quelques centaines de tablettes soumises à la torture par les historiens, quelques citations posthumes et beaucoup de zones d'ombre remplies par les siècles ! On ne sait en fait pas grand-chose de cet inventeur du monothéisme en Egypte, sinon qu'il vivait à côté du monde réel, souverain inconscient des réalités de ce monde, Prince Siddharta qui n'arriva pas à devenir Bouddha !

On pourrait aussi y voir un Louis de Bavière antique, désireux de donner au monde des raisons de se transcender au travers de quelques monuments conçus à cet effet. Toujours est-il que ce dirigeant mystique et marginal inspira un vrai chef d'œuvre à Phil Glass, si souvent accusé de facilité. Certes, l'obstination de la répétition mélodique et rythmique crée un climat captivant au sens propre du terme et peut ainsi susciter l'adhésion inconditionnelle comme le rejet rédhibitoire.

L'histoire a manifestement jugé et cet opéra de Glass, créé en 1984, est entré au répertoire. Climat envoûtant , écriture vocale sensuelle, duos déchirants, tout concourt à emprisonner l'auditeur pour le faire pénétrer dans un monde de volupté.

Côté mise en scène, la production de l'Opéra du Rhin nous fit heureusement grâce d'un metteur en scène convaincu de devoir prendre en main l'éducation de son public. Daniel Pelzig expose les données de l'intrigue, stylise une Egypte antique tout en en préservant le mystère et fait finalement du spectateur un admirateur des couleurs, des éclairages, des dieux du Nil sans devoir se poser la question de l'intemporalité du mythe. Et c'est bien ainsi que cet Akhnaten devient terriblement actuel, sa marginalité compréhensible, son désir de vision défendable.

Et lorsque de vrais touristes envahissent la scène au final, chacun comprend que toutes les civilisations sont destinées à passer. Il n'en reste souvent que quelques pierres que des enfants viennent « tagger » avec innocence et ironie.

David Walker est éblouissant en Akhenaton. Doté d'un physique exceptionnel, il ressemble à s'y méprendre au dieu Râ de Stargate, film hollywoodien de Roland Emmerich, ce qui est loin d'être un contresens.

La Nefertiti de , modèle de musicalité, se marie parfaitement avec la Reine de Witalije Blinstrubyte.

Concernés par leurs personnages, avantagés par une mise en scène qui les valorise, les protagonistes parviennent sans peine à rendre crédible une intrigue en définitive simpliste.

Les détours par la psychanalyse ne seront pas interdits, même si la lecture de l'ouvrage permet une approche plus immédiatement esthétique, mais qui n'a rêvé de mener sa vie à son gré avec son imagination comme seule limite ?

En cela, nous sommes « tous des Akhnaten ».

Et puisque l'ironie est sans limites au théâtre comme dans l'existence, sachons que le fils d'Akhenaton (pâle copie du paternel) fut promis à une fabuleuse destinée posthume sous le nom de Toutankhamon.

Crédit photographique : © Alain Kaiser

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