La Scène, Opéra, Opéras

Doublé Bartok-Schœnberg à Québec, le théâtre de l’âme

Plus de détails

Instagram

Québec. Salle Louis-Fréchette du Grand-Théâtre de Québec. 18-X-2008. Béla Bartok (1881-1945) : A Kékszakállú herceg vára [Le château de Barbe-bleue] Sz. 48 BB62 op. 11, opéra en un acte et un prologue sur un livret de Béla Balazs. Arnold Schœnberg (1874-1951) : Erwartung [L’attente], monodrame en un acte sur un livret de Marie Pappenheim. Mise en scène : Robert Lepage ; Décors et costumes : Michael Levine. Éclairages : Robert Thomson ; Effets medias : Laurie-Shawn Borzovoy. Avec : Mihkail Svetlov, Barbe-bleue ; Andrea Meláth, Judith ; Lyne Fortin, Une femme. Comédiens : Jordan Gasparik, Épouse/Maîtresse ; Noam Markus, Épouse/Amant ; Mark Johnson, Épouse/Psychiatre. Orchestre Symphonique de Québec, direction : Jacques Lacombe.

Instagram

L'Opéra de Québec a eu l'audace d'inscrire pour la saison 2008/2009, le doublé Bartok-Schœnberg, créé à Toronto au COC en 1993. Vision toute intérieure pour Le château de Barbe-bleue, théâtre de l'âme pour Erwartung (L'attente), c'est la conception du metteur en scène québécois qui retient l'attention – de l'onirisme à la réalité – et qui donne sens à deux œuvres majeures du vingtième siècle.

Les deux opéras présentés offrent quelques points en commun : œuvres d'introspection, modernes, d'une intensité insoutenable, habitées par des êtres étranges. Tout se déroule à l'intérieur d'un cadre, intimant d'emblée une distanciation, avec des jeux d'ombres qui donnent un aspect irréel aux personnages. L'ambiance peu rassurante est accentuée par une toile transparente – une gaze en sfumato – que circonscrit l'action dramatique. Dans Le château de Barbe-bleue, les deux protagonistes évoluent dans une sorte de duel, de mise à mort symbolique. La maquette d'un château exposée au centre de la scène, sert de prélude avant de pénétrer plus à fond dans un espace délimité, un long couloir profond où se dessine l'ombre des sept serrures, petites ouvertures vers des réalités cauchemardesques et où se joue la trame dramatique de l'œuvre. Théâtre de l'âme, certes, mais d'un lyrisme prégnant, magie sonore des voix et de l'orchestre.

Si l'esthétique du Château de Barbe-bleue relève du conte populaire – deux personnages, on a sacrifié le rôle parlé du Barde, qui évoluent à l'intérieur d'un château sombre – celle d'Erwartung, monodrame en un acte, est plus complexe, et renvoie à l'étude de cas, les délires d'une psychopathe en camisole de force, épisode de démence froidement noté par un docteur Freud muet et omniprésent. Univers kafkaïen et claustré dans les deux cas. C'est Judith, personnage biblique qui voulant libérer son peuple, s'introduit dans le camp ennemi, séduit et décapite Holopherne. C'est la femme trahie et sa dérive amoureuse au cœur de la folie.

vit son personnage avec une rare intensité. Un rôle à sa mesure, on dirait qu'il a été écrit pour elle. Elle est femme, de cette féminité près de l'hystérie, voix haletante, présence hallucinante sur scène, beauté du geste, souvent blottie dans les replis de sa vie, hantée de cauchemars.

En première partie, dans Le château de Barbe-bleue, la basse russe Mikhail Svetlov et la mezzo-soprano hongroise Andrea Meláth forment un excellent «couple» dans cette longue marche au supplice autant par le jeu scénique que par les voix. Leurs regards ardents se toisent accentuant le mystère et l'intensité du drame.

L' sous la direction de , démontre une grande maîtrise de deux œuvres jugées difficiles. La direction précise du maestro assure une cohésion entre orchestre et voix.

Crédit photographique : (La femme) ; Mikhail Svetlov (Barbe-bleue) & Andrea Meláth (Judith) © Louise Leblanc

(Visited 608 times, 1 visits today)

Plus de détails

Instagram

Québec. Salle Louis-Fréchette du Grand-Théâtre de Québec. 18-X-2008. Béla Bartok (1881-1945) : A Kékszakállú herceg vára [Le château de Barbe-bleue] Sz. 48 BB62 op. 11, opéra en un acte et un prologue sur un livret de Béla Balazs. Arnold Schœnberg (1874-1951) : Erwartung [L’attente], monodrame en un acte sur un livret de Marie Pappenheim. Mise en scène : Robert Lepage ; Décors et costumes : Michael Levine. Éclairages : Robert Thomson ; Effets medias : Laurie-Shawn Borzovoy. Avec : Mihkail Svetlov, Barbe-bleue ; Andrea Meláth, Judith ; Lyne Fortin, Une femme. Comédiens : Jordan Gasparik, Épouse/Maîtresse ; Noam Markus, Épouse/Amant ; Mark Johnson, Épouse/Psychiatre. Orchestre Symphonique de Québec, direction : Jacques Lacombe.

Mots-clefs de cet article
Instagram
Reproduire cet article : Vous avez aimé cet article ? N’hésitez pas à le faire savoir sur votre site, votre blog, etc. ! Le site de ResMusica est protégé par la propriété intellectuelle, mais vous pouvez reproduire de courtes citations de cet article, à condition de faire un lien vers cette page. Pour toute demande de reproduction du texte, écrivez-nous en citant la source que vous voulez reproduire ainsi que le site sur lequel il sera éventuellement autorisé à être reproduit.