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Paris, Salle Pleyel. 13-X-2009. Frédéric Chopin (1810-1849) : Prélude en ut dièse mineur op. 45 ; Ballade n°2 en fa majeur op. 38 ; Scherzo n°1 en si mineur op. 20 ; Sonate n°2 en si bémol mineur op. 35. Luigi Nono (1924-1990) : …sofferte onde serene… pour piano et bande ; Djamila Boupacha pour voix soliste ; A floresta é joven e chja de vida pour ensemble vocal et instrumental et bandes magnétiques. Maurizio Pollini, piano ; Alain Damiens, clarinette ; Barbara Hannigan, soprano ; Sara Ercoli, récitante ; Margot Nies, récitante ; Terrence Rœ, récitante ; Schlagquartet Köln ; Experimentalstudio Freiburg ; André Richard, régie son ; Marino Formenti, direction

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Pour le sixième concert des «Pollini perspectives» 2009 donné à Pleyel, était associé à dans une confrontation audacieuse qui ne manquait pas d'attiser la curiosité sauf pour ceux qui avaient décidé de quitter la salle à l'entracte – ou, fort bruyamment, pendant la deuxième partie ! – renonçant alors à une expérience d'écoute passionnante dont la Salle Pleyel n'est, en effet, pas si familière.

était, à son piano, le héros de la première partie, interprétant Chopin comme nul autre pareil. La prestation allait crescendo, permettant au maître de capter peu à peu son auditoire jusqu'à l'écoute hypnotique de la Sonate n°2 dont la célèbre Marche funèbre résonnait avec une intensité rare. Si le Prélude en ut dièse mineur et la Ballade n°2 surprennent par tant de rigueur formelle et une volonté ferme de «tordre le cou» au rubato, le Scherzo n°1, nourri de contrastes et d'énergie éruptive, laisse s'épanouir la résonance et nous fait apprécier le juste équilibre de l'articulation. Avec une vision apollinienne de la forme, atteint sa pleine sonorité et toute la gamme de ses timbres dans la Sonate n°2, admirablement conduite avec un souci permanent de nervures et de couleurs qui confère une lisibilité parfaite de l'écriture et un intérêt toujours renouvelé du discours.

En dialogue avec la bande magnétique, Pollini revient dans la deuxième partie pour interpréter …sofferte onde serene… de , une pièce/déploration – qu'on ne saurait traduire sans déflorer la poésie du titre – écrite en 1976 et dédiée au couple Maurizio et Marilisa Pollini. «A cette époque – écrit Nono – un dur vent de mort vint balayer le sourire infini des ondes dans ma famille et dans celle de Pollini. Cette expérience commune nous rapprocha encore davantage l'un de l'autre». La pièce joue sur le flux et le reflux des deux sources acoustique et électroacoustique creusant la perspective sonore dans un temps lisse et étiré d'une grande poésie.

C'est le lien souterrain de la vocalité (l'»Aria idéale» que Chopin essayait de traduire au piano) qui inspire à Pollini le rapprochement Chopin/Nono. La merveilleuse soprano canadienne interpréte la brève monodie Djamila Boupacha, deuxième partie du triptyque pour voix et orchestre Canti di vita e amore (1962) ; c'est un «cri» d'espoir écrit à la mémoire de la combattante algérienne torturée par les paras français (dont il existe un portrait de la main de Picasso). Le poème Esta noche de Jesús López Pacheco inspire à Nono une ligne sobre autant que fulgurante explorant le registre extrême de la tessiture dont la voix de propage l'intense luminosité.

Ce préambule vocal préparait à l'œuvre phare de la soirée, A floresta é jovem e cheja de vida (1966), un spectacle auriculaire à la (dé)mesure de la force revendicatrice de Nono ; l'œuvre mixte est dédiée au Front national de libération du Viêt Nam. Le livret, conçu par Giovanni Pirelli, est un montage de textes historiques parlés/chantés en direct par quatre voix féminines amplifiées ou enregistrés et diffusés en alternance par les haut-parleurs. Nono ajoute une clarinette en prolongement des voix et quatre percussionnistes en fond de scène jouant sur des plaques de bronze (façon Niebelungen !) dont les impacts bruyants participent de la violence ambiante. La source électroacoustique est certes datée (issue du studio de phonologie de la RAI de Milan crée par Berio et Maderna en 1955) mais néanmoins audacieuse et bigrement efficace pour violenter l'espace un peu froid de la salle Pleyel et remuer les consciences en profondeur. «Autant d'instruments au service d'une idéologie – ajoute Nono – dans l'expression des sentiments collectifs et dans la prise de position sur les grands thèmes de l'actualité».

Crédit photographique : Maurizio Pollini © Jennifer Taylor

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