Union franco-espagnole à la Marbrerie avec L’Itinéraire et OcazeEnigma
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Montreuil. La Marbrerie. 30-I-2023. Tristan Murail (née en 1947) : I would prefer not to, pour piano et percussion (CM) ; La chambre des cartes, pour ensemble ; Clara Olivares (né en 1993) : En un ciel inconnu notre ciel est changé, pour violon, alto et clarinette basse ; José Manuel López López (né en 1956) : Jenseits… Diesseits, pour ensemble ; Lisa Illean (née en 1983) ; Weather a Rare Blue, pour piano, ensemble et électronique. Ensemble Itinéraire ; OcazeEnigma, direction : Asier Puga
La température est fraîche mais la musique stimulante à la Marbrerie où les ensembles L'Itinéraire et OcazeEnigma conjuguent leur talent dans un concert qui met à l'affiche deux pièces de Tristan Murail dont une création mondiale.
C'est une première collaboration de L'Itinéraire avec les musiciens de Zaragoza où était donné, il y a quelques jours, le même concert : Tristan Murail (co-fondateur de l'ensemble français qui fête ses cinquante ans !), partage l'affiche avec deux compositeurs franco-espagnols (présents dans la salle) et une compositrice australienne Lisa Illean.
I would prefer not to répète l'anti-héros Bartleby dans la nouvelle éponyme d'Hermann Melville. C'est aussi le titre de la dixième pièce du cycle Portulan (qui doit en compter douze) de Tristan Murail, donnée ce soir en première française. Le cycle est autobiographique par métaphore, rappelle le compositeur, « en ce sens que chaque pièce se référera à quelque chose, lieu, voyage, lecture, expérience esthétique, de particulière signification pour moi ». I would prefer not to est un duo piano et percussion dont le set économe associe au vibraphone central deux cymbales de part et d'autre et un temple block. Évoquant plus d'une fois les accords de couleurs de Messiaen et sa métrique libre, la musique est d'une grande poésie, baignée de nostalgie (l'hommage au maître) et de résonance moirée, les deux instrumentistes (David Chevalier et Christophe Bredeloup) jouant en synchronie ou en complémentarité.
Comme chez Tristan Murail, le titre En un ciel inconnu notre ciel est changé de la compositrice franco-espagnol Clara Olivares est emprunté à un ouvrage littéraire, le De natura rerum du poète latin Lucrèce. Les deux ensembles y sont réunis, le violon (Victor Parra), l'alto (Lucia Peralta), la clarinette basse (Emilio Ferrando) et le piano (David Chevalier). La tension, l'instabilité et l'univers déstructuré (il est question d'Apocalypse) habitent la musique de la compositrice dont le matériau fluctue entre son et bruit, trames microtonales et ponctuations sèches. Le discours est morcelé, l'univers sombre et étrange sous le geste engagé des quatre musiciens. Jenseits… Diesseits (« Au-delà de ce monde ») de José Manuel López López prolonge en quelque sorte les visions de la compositrice. Le geste y est puissant et le timbre riche, au large spectre rehaussé par les sonorités du vibraphone. Un courant dramaturgique traverse cette courte page alliant concentration et ciselure de l'écriture.
Les titres de l'Australienne Lisa Illean sont toujours difficiles à traduire mais connotent en général la nature. Aux six instruments convoqués dans Weather a Rare Blue (l'effectif de Vortex temporum de Gérard Grisey dont la pièce se veut un préambule), Illean ajoute une partie électronique de sons pré-enregistrés. Elle vient enrichir la texture de la trame instrumentale, la compositrice s'intéressant aux changements subtils et illimités des couleurs microtonales et des réverbérations de la matière. « Ambient music », pourrait-on dire, de cette pièce au temps étiré visant la coïncidence du vaste et de l'intime.
La dernière pièce appelle l'effectif au complet, huit instruments (incluant le cor d'Antoine Dreyfus) et le chef espagnol Asier Puga. La chambre des cartes (2011) de Tristan Murail, qui referme en beauté le concert, est la sixième pièce du cycle Portulan déjà mentionné, titre emprunté au recueil de poèmes du père du compositeur. Ce sont de superbes pages spectrales où l'on goûte avec un plaisir gourmand les subtilités orchestrales du maître et la beauté des timbres de l'ensemble.
Rendez-vous pris au prochain festival Messiaen où L'Itinéraire, qui y est à l'honneur pour fêter ses cinquante ans, créera les deux dernières pièces du cycle débuté en 1996.
Crédit photographique : © L'Itinéraire
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Montreuil. La Marbrerie. 30-I-2023. Tristan Murail (née en 1947) : I would prefer not to, pour piano et percussion (CM) ; La chambre des cartes, pour ensemble ; Clara Olivares (né en 1993) : En un ciel inconnu notre ciel est changé, pour violon, alto et clarinette basse ; José Manuel López López (né en 1956) : Jenseits… Diesseits, pour ensemble ; Lisa Illean (née en 1983) ; Weather a Rare Blue, pour piano, ensemble et électronique. Ensemble Itinéraire ; OcazeEnigma, direction : Asier Puga
