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George Balanchine : New York et la Russie sur la scène de Garnier

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Paris. Palais Garnier. 10-II-2023. Ballet Impérial. Chorégraphie : George Balanchine. Musique : Piotr Ilitch Tchaïkovski. Costumes : Xavier Ronze. Lumières : Mark Stanley. Piano : Emmanuel Strosser. Avec : Ludmila Pagliero, Paul Marque, Silvia Saint-Martin, Florent Mélac, Thomas Docquir, Marine Ganio, Pauline Verdusen et le Corps de Ballet de l’Opéra national de Paris.
Who Cares? Chorégraphie : George Balanchine. Musique : George Gershwin. Décors : Paul Gallis. Costumes : Xavier Ronze. Avec : Léonore Baulac, Germain Louvet, Hannah O’Neill, Valentine Colasante et le Corps de Ballet de l’Opéra national de Paris. Orchestre de l’Opéra national de Paris, direction : Mikhail Agrest

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Pour ce nouveau programme très attendu de la saison danse, deux ballets de , Ballet Impérial et Who Cares ? font leur entrée au répertoire du Ballet de l'Opéra, réconciliant sur scène les deux pays de la danse que sont la Russie et les États-Unis.

Ballet Impérial a été créé en 1941 lors d'une tournée par l'American Ballet Caravan sur la musique du Concerto pour piano en sol majeur de . Le ballet a été plusieurs fois remanié par Balanchine jusqu'à la version actuelle qui date de 1964 pour le New York City Ballet. L'écriture chorégraphique est celle que l'on retrouve dans les recherches de Balanchine sur le style néoclassique. Le danseur est au service de la ballerine, les arabesques sont décalées et il y a un travail complexe et assez savant autour des pirouettes qui sont étudiées dans toutes les positions de base de la danse. C'est donc une grammaire très virtuose et difficile techniquement qui sert de support à la danse dans ce ballet très élaboré.

est maîtresse de cérémonie et elle excelle pour se jouer de toutes les difficultés, avec parfois une certaine appréhension (il y a des relevés sur pointe en arabesque en reculant qui semblent terrorisants), mais toujours avec un port de tête assuré et confiant. Le bas de jambe est également mis à rude épreuve avec des séries de développés-enveloppés, dont la propreté dans la fermeture des positions est une caractéristique du travail à la française pratiqué par le Ballet de l'Opéra de Paris, mais pénalise ici la rapidité de ces pas.
Les grandes figures sont ardemment réalisées (les fouettés, amenés de façon naturelle), ainsi que les sauts périlleux réalisés avec son partenaire. travaille en puissance et en élégance avec une géométrie de l'espace qui n'appartient qu'à lui, réalisant des figures au sol très lisibles, prenant tout l'espace de la scène en quelques sauts. La seconde partenaire féminine, Sylvia Saint-Martin, réalise un « sans faute », même si elle manque un peu d'assurance.
Malheureusement, le corps de ballet n'est pas tout à fait à la hauteur de la réputation de la « Grande boutique ». Il est principalement composé de surnuméraires qui donnent beaucoup de leur énergie mais ne peuvent masquer le manque de répétitions, et on ne compte plus le nombre de faux départs (qui ne pardonnent pas dans l'exactitude métronomique des pas), de bras peu coordonnés, de décalages dans les changements de direction. L'engagement est sincère mais ne peut, au début de cette série de spectacles, suffire à mettre en valeur les solistes.

 

Changement d'ambiance pour Who Cares? Composée sur un mélange de musiques de , ce ballet est un pilier du répertoire du New York City Ballet. Créé en 1970, c'est un hommage du chorégraphe à son ami disparu 33 ans plus tôt ainsi qu'une déclaration d'amour à cette ville pleine de gouaille et de joie de vivre. L'on n'aurait pas d'instinct imaginé le Ballet de l'Opéra national de Paris briller dans cette chorégraphie aussi « déhanchée » que la musique. C'est pourtant le cas, tant par les solistes que par les différents groupes de danseurs.

En tout premier lieu, la mutine donne une touche très élégante avec des regards en coin, par derrière, qui rappellent une Audrey Hepburn habillée par Givenchy à la vitrine d'un joailler (sur le célèbre Fascinatin' rhythm). fait preuve de sa solidité à toute épreuve, un rien frondeuse et fabuleusement féminine (I'll Buy a stairway to Paradise). est sérieuse dans son solo mais garde un caractère très sensuel et direct. Le partenaire masculin principal est un renouvelé. Quand bien même sa technique reste superlative, il parvient à se glisser dans un rythme volontairement décalé et s'autorise quelques excentricités bienvenues qui permettent d'entraîner les autres couples dans une folie douce et néanmoins très contrôlée.

Le corps de ballet convainc entièrement par une présence et une coordination de tous les instants, jusque dans les pas les plus chaloupés. Le fabuleux quintette de garçons (Bidin' my time) et les couples épisodiques (tels Bianca Scudamore avec Antoine Kirscher) sont en interaction constante avec le public par des regards francs, un sourire à toute épreuve et l'envie de légèreté.

Si le décor de Who Cares? est figuratif, avec ses buildings new-yorkais en suspension, le cadre de Ballet Impérial est un simple fond de scène bleu. En revanche, les costumes du ballet « à la russe » sont des tutus d'une blancheur éclatante, parés de joyaux, tandis que pour l'américain Who cares?, la vigueur et l'énergie du ballet se traduisent par des jeunes hommes en bras de chemise et des jupes raccourcies pour les danseuses.

L'Orchestre de l'Opéra de Paris est très juste dans les deux volets de son interprétation. Adoptant un rythme vigoureux pour les cordes dans le concerto interprété par le pianiste , habitué à accompagner le corps de ballet dans de précédentes productions, il soutient par ailleurs la démesure musicale transposée pour l'orchestre à partir des tubes de Gershwin.

Ces deux entrées au répertoire offrent deux images d'une façon de danser, défendues par un style très français dont la qualité ne pourra que se bonifier au cours de la série de représentations.

Crédit photographique: © Agathe Poupeney/ Opéra National de Paris

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Paris. Palais Garnier. 10-II-2023. Ballet Impérial. Chorégraphie : George Balanchine. Musique : Piotr Ilitch Tchaïkovski. Costumes : Xavier Ronze. Lumières : Mark Stanley. Piano : Emmanuel Strosser. Avec : Ludmila Pagliero, Paul Marque, Silvia Saint-Martin, Florent Mélac, Thomas Docquir, Marine Ganio, Pauline Verdusen et le Corps de Ballet de l’Opéra national de Paris.
Who Cares? Chorégraphie : George Balanchine. Musique : George Gershwin. Décors : Paul Gallis. Costumes : Xavier Ronze. Avec : Léonore Baulac, Germain Louvet, Hannah O’Neill, Valentine Colasante et le Corps de Ballet de l’Opéra national de Paris. Orchestre de l’Opéra national de Paris, direction : Mikhail Agrest

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