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Klaus Mäkelä et Janine Jansen : pour le pire et le meilleur

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Paris. Philharmonie, Grande Salle Pierre Boulez. 2-III-2023. Kaija Saariaho (née en 1952) : Ciel d’hiver, extrait d’Orion ; Jean Sibelius (1865-1957) : Concerto pour violon en ré mineur op. 47 ; Hector Berlioz (1803-1869) : Symphonie fantastique op. 14. Janine Jansen, violon. Orchestre de Paris, direction : Klaus Mäkelä

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Dans un splendide programme appariant les sonorités oniriques du Chant d'hiver de , le lyrisme poignant du Concerto pour violon de Sibelius et les couleurs orchestrales rutilantes de la Symphonie fantastique d', la violoniste tire facilement son épingle du jeu tandis que peine à convaincre dans Berlioz.

Composé en 2013 à partir du deuxième mouvement de la trilogie Orion (2002), Ciel d'hiver de , ouvre la soirée sur ses sonorités planantes, diaphanes et éthérées, empreintes de mystère, de rêve et de contemplation. Sorte de nocturne inspiré du Chasseur céleste débutant sur une pédale de cordes d'où émergent successivement différents solos instrumentaux (piccolo, violon solo, clarinette, trompette, harpe et violoncelle), nous en dresse les contours avec une maestria qui concilie habilement statisme et tension, orchestration foisonnante et flux musical continu, dans une progression claire, envoûtante et hypnotique portée par un crescendo longuement retenu, presque douloureux, qui ne trouve jamais sa résolution, semblable à un désir inassouvi, vite oublié, qui s'évanouit dans les notes égrenées du célesta, de la harpe et du violoncelle… comme un regret… magnifique !

Tout autre ambiance avec le Concerto pour violon de Sibelius dont la violoniste nous livre une interprétation éclatante, habitée et passionnée. Issu du silence sur un trémolo de cordes à peine audible, le premier mouvement laisse d'emblée la parole à un violon au lyrisme ardent et éperdu tandis que l'orchestre conduit au cordeau par Mäkelä assure un accompagnement équilibré et complice, développant de larges lignes mélodiques d'une belle ampleur sonore qui ne sont pas sans évoquer les grands espaces chers à Sibelius. On ne sait qu'admirer le plus de la faconde violonistique virtuose de la soliste qui donnera toute sa mesure dans une cadence envoûtante, de la qualité des performances solistiques (petite harmonie) ou de la justesse de la direction, riche en nuances, dans un mélange de violence et de passion. Le second mouvement consolide encore le dialogue entre soliste et orchestre autour d'un chant poignant du violon soutenu par les bois et les cors, avant que le Finale n'entreprenne sa cavalcade endiablée et dansante, scandée par les timbales dans un ostinato grisant soutenant les assauts virtuoses répétés du violon et de l'orchestre. Un bis emprunté à Bach conclut cette belle première partie.

Si nous avions goûté au meilleur, le pire restait à venir avec la Symphonie fantastique de Berlioz dont nous livre, hélas, une interprétation d'une théâtralité outrancière, qui, par son incapacité à fédérer les timbres dans une lecture cohérente, confine rapidement à l'ennui… Chargé de nuances excessives et de ruptures rythmiques intempestives qui entament la tension et la continuité du discours, le premier mouvement Rêveries – Passions parait bien prosaïque ; le Bal, mieux réalisé quant à lui, ne manque ni de grâce (harpe, cordes, petite harmonie) ni d'une certaine inquiétude sous-jacente porté par la récurrence de « l'idée fixe » ; Scène aux champs, malgré son beau solo de cor anglais reste désespérément déliquescente et vide de sens ; Nonobstant les belles interventions des cors, timbales, cordes graves et basson, la Marche au supplice où seul Klaus Mäkelä semble s'amuser prend un aspect hollywoodien par les exubérances de son phrasé, tandis que Songe d'une nuit de Sabbat sombre définitivement dans le grand guignol d'une superficialité accablante dont on ne retiendra en définitive que les cloches bien sonnantes.

Dommage, mais assurément, n'est par Sir John Eliot Gardiner qui veut !

Crédit photographique : © Marco Borggreve

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Paris. Philharmonie, Grande Salle Pierre Boulez. 2-III-2023. Kaija Saariaho (née en 1952) : Ciel d’hiver, extrait d’Orion ; Jean Sibelius (1865-1957) : Concerto pour violon en ré mineur op. 47 ; Hector Berlioz (1803-1869) : Symphonie fantastique op. 14. Janine Jansen, violon. Orchestre de Paris, direction : Klaus Mäkelä

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