Concerts, Festivals, La Scène, Musique de chambre et récital

Journée Liszt au Festival de La Roque d’Anthéron

Plus de détails

Instagram

La Roque d’Anthéron. Centre Marcel Pagnol & Parc du Château de Florans. 1-VIII-2023. À 11h : Johann Sebastian Bach (1685-1750) / Franz Liszt (1811-1886) : Prélude et fugue en la mineur, BWV 543 ; Fantaisie et fugue en sol mineur BWV 542. Franz Liszt (1811-1886) : Toccata S.197a ; Rapsodies Hongroises n°16 en la mineur, n°5 en mi mineur « Héroïde élégiaque », n°10 en mi majeur ; Berceuse S.174 ; Rapsodie espagnole S. 245. Rodolphe Menguy, piano.
À 17h : Franz Liszt (1811-1886) : En rêve, nocturne ; Ballade n°2 en si mineur ; Wiegenlied ; Bagatelle sans tonalité ; Valse oubliée n°1 en fa dièse majeur ; La lugubre Gondole n°2 ; Sonate en si mineur. Gabriel Stern, piano.
À 19h30 : Franz Liszt (1811-1886) : Les Années de pèlerinage, Première année : Suisse S. 160. Tanguy de Williencourt, piano. Deuxième année : Italie (S 161) & supplément Venezia e Napoli S. 162. Jean-Frédéric Neuburger, piano. Troisième année S. 163. Nathanaël Gouin, piano.

Instagram

Bien que Rachmaninov soit le mieux représenté pour cette édition du Festival International de piano de la Roque d'Anthéron, a le droit à sa journée en trois récitals avec , et en soirée trois pianistes pour se partager Les Années de pèlerinage.

Le 1er août, si l'on ne choisissait pas l'Abbaye de Silvacane pour Pierre Hantaï ni le Musée Granet d'Aix-en-Provence pour Jean-Baptiste Doulcet, l'intégralité de la journée se faisait avec Liszt, en matinée et en après-midi à l'Auditorium du Centre Marcel Pagnol et le soir sur la grande scène du Parc du Château de Florans de La Roque d'Anthéron.

Pour commencer cette journée, le jeune Français propose un intéressant parcours autour de plusieurs figures de Liszt, puisqu'il mêle le religieux transcripteur de Bach au natif hongrois attiré par la forme populaire rhapsodique. D'un toucher coloré qui rappelle un style français, avec l'avantage de ne pas fuir la nuance au profit de la simple agilité, le pianiste débute, sur un Steinway & Sons dénaturé par le grave, un Prélude et fugue en la mineur BWV 543, transcrit pour piano par le compositeur du jour. Encore trop mesuré, sans sembler prendre la pleine mesure de l'écriture de Bach dans le Prélude, le jeu de Menguy s'adapte mieux à la fugue pour convaincre plus encore dans la petite Toccata S. 197a, cette fois de Liszt seul, avant de s'attaquer à trois Rapsodies Hongroises, jouées également dans son récent enregistrement.

D'une belle dextérité et sans se vouloir démonstratif, le pianiste aborde d'abord la n°16 sous-titrée « Budapest Munkácsy-Festlichkeiten », dans laquelle il rend honneur à la cadence en fin de première section et développe surtout avec une grande finesse la partie Lassan Langsam, et ensuite la n°5 « Héroïde-élégiaque ». La n°10 clôture le mini-cycle, bien débutée par les glissandi, puis trop portée dans le grave débordant du piano choisi pour le concert. En seconde partie, bien qu'il n'y ait pas d'entracte, on revient à une transcription de Bach, cette fois avec une Fantaisie et fugue en sol mineur BWV 542 plus adaptée aux coloris du doigté. La douce Berceuse S. 174 prépare à la Rapsodie espagnole jouée en conclusion, plus dynamique.

En après-midi, on retrouve la même salle trop climatisée et un autre Steinway au grave plus tenu et donc d'un meilleur équilibre tonal, même si l'aigu s'y montre trop mat à la dernière octave. À présent, est devant le clavier et choisit un programme fait de pièces relativement rares, achevé par la célèbre Sonate en si mineur. En rêve, le nocturne introductif présente un jeu différent de celui de Menguy par une recherche à la fois plus pure et moins colorée du son. Cela convient parfaitement à cette première petite pièce comme au Wiegenlied, ou encore à une Bagatelle sans tonalité parfaitement retranscrite dans son mal-être. La Ballade n°2 en si mineur profite quant à elle de l'agilité sans faille de Stern, aussi présente dans une Valse oubliée n°1 toutefois trop peu emportée dans ses tourments. De même La Lugubre Gondole n° 2 ne se montre pas si sombre qu'elle le pourrait. En seconde partie, la Sonate en si mineur débute par des notes profondes, pour alterner ensuite dans un jeu de plus en plus contrasté, bien que pas encore tout à fait assez mûr pour magnifier l'intégralité de l'œuvre. Il n'empêche que la prestation reste d'un grand intérêt et aurait mérité une salle complète, là où elle n'est qu'à peine plus qu'à moitié remplie.

Le soir, les gradins sont de nouveau seulement à demi pleins au Parc du Château de Florans, en contraste avec les soirées combles pour Bruce Liu l'avant-veille ou Kantorow le lendemain. Cela représente tout de même au moins un millier de personnes présentes pour accueillir trois pianistes français dans une œuvre-monde, chacun dévolu à une Année de pèlerinage. ouvre le voyage et s'il convainc en de nombreux points pour peindre avec de belles nuances les paysages de Suisse, notre souvenir de l'interprétation géniale et plus mature de Bertrand Chamayou dix jours plus tôt à Montpellier est encore trop prégnant.

Pour retrouver cette forme de justesse, il faut attendre le second pianiste, , qui s'impose ce soir dès les premières notes du Sposalizio.

Fatigué après quarante minutes et les trois Sonetto del Petrarca gérés d'une main de maître, perturbe le programme en se levant et en revenant saluer autant de fois qu'il a joué de sonnets. Une partie du public pense alors que la Deuxième Année est achevée, et croit entendre le supplément à la Deuxième Année lorsque le pianiste se rassoit. Mais les accords graves ne peuvent tromper, et c'est bien dans Après une lecture de Dante que l'on est entraîné, à coup de moments prenants et sombres, presque froids dans les derniers instants. Très applaudi, Neuburger s'échappe à nouveau, et au retour d'entracte, une annonce au micro doit préciser qu'il devait encore jouer le supplément ; celui-ci introduira donc la dernière partie.

Rasséréné, le pianiste livre tout en clarté les trois morceaux de Venezia e Napoli, puis laisse sa place à pour les ultimes parties d'Italie, dans une Troisième Année très différente des deux précédentes, car proposée dans un style beaucoup moins pur. À l'inverse des deux premiers pianistes, le dernier démontre un besoin de surexposer toutes les idées et tous les accents, sans particulièrement renforcer les contrastes, mais en ajoutant sa marque à chaque instant. À notre goût beaucoup trop déclamatoire, cette interprétation a pour qualité de capter toujours l'attention, même si elle ne convainc véritablement que dans les notes perlées des Jeux d'eaux de la Villa d'Este.

Cette soirée peut s'achever après le Sursum corda dans la nuit noire de Provence, mais les trois pianistes ont préparé une surprise, et si avait bien gardé Liszt pour son bis, le trio lui préfère, comme le matin avec deux Études-Tableaux, le Russe Rachmaninov, dont Williencourt-Neuburger-Gouin jouent l'une des rares pièces du répertoire écrites pour six mains : la Romance en la majeur.

Crédits photographiques : © Valentine Chauvin

Tous nos articles du Festival de La Roque d'Anthéron

(Visited 755 times, 1 visits today)

Plus de détails

Instagram

La Roque d’Anthéron. Centre Marcel Pagnol & Parc du Château de Florans. 1-VIII-2023. À 11h : Johann Sebastian Bach (1685-1750) / Franz Liszt (1811-1886) : Prélude et fugue en la mineur, BWV 543 ; Fantaisie et fugue en sol mineur BWV 542. Franz Liszt (1811-1886) : Toccata S.197a ; Rapsodies Hongroises n°16 en la mineur, n°5 en mi mineur « Héroïde élégiaque », n°10 en mi majeur ; Berceuse S.174 ; Rapsodie espagnole S. 245. Rodolphe Menguy, piano.
À 17h : Franz Liszt (1811-1886) : En rêve, nocturne ; Ballade n°2 en si mineur ; Wiegenlied ; Bagatelle sans tonalité ; Valse oubliée n°1 en fa dièse majeur ; La lugubre Gondole n°2 ; Sonate en si mineur. Gabriel Stern, piano.
À 19h30 : Franz Liszt (1811-1886) : Les Années de pèlerinage, Première année : Suisse S. 160. Tanguy de Williencourt, piano. Deuxième année : Italie (S 161) & supplément Venezia e Napoli S. 162. Jean-Frédéric Neuburger, piano. Troisième année S. 163. Nathanaël Gouin, piano.

Mots-clefs de cet article
Instagram
Reproduire cet article : Vous avez aimé cet article ? N’hésitez pas à le faire savoir sur votre site, votre blog, etc. ! Le site de ResMusica est protégé par la propriété intellectuelle, mais vous pouvez reproduire de courtes citations de cet article, à condition de faire un lien vers cette page. Pour toute demande de reproduction du texte, écrivez-nous en citant la source que vous voulez reproduire ainsi que le site sur lequel il sera éventuellement autorisé à être reproduit.