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Une colossale Symphonie « Leningrad » par Tugan Sokhiev et le Capitole de Toulouse

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Paris. Philharmonie. Grande Salle Pierre Boulez. 13-III-2024. Dimitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n° 7 dite « Leningrad » en ut majeur op. 60. Orchestre National du Capitole de Toulouse, direction : Tugan Sokhiev

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Symphonie de guerre, symbole de la résistance à tous les totalitarismes, nazi et stalinien, en même temps qu'hommage rendu à la ville de Leningrad assiégée en 1942, la Symphonie n° 7 dite « Leningrad » de bénéficie d'une bouleversante interprétation par et l'Orchestre du capitole de Toulouse.

Par les temps qui courent, a souvent les honneurs de l'affiche à la Philharmonie de Paris avec un bonheur parfois incertain, ses symphonies se suivent mais ne se ressemblent pas : après une belle Onzième avec l'Orchestre de Paris et Klaus Mäkelä, une bien fade Quatrième avec Simon Rattle et le LSO, c'est au tour aujourd'hui de l' d'occuper la scène parisienne pour une éblouissante interprétation de la Symphonie n° 7 dite « Leningrad » du compositeur russe.

Force est de reconnaitre qu'avec ce répertoire, est dans son jardin, retrouvant de plus une phalange toulousaine qu'il a dirigée pendant de nombreuses années et qu'il a quitté pour les mauvaises raisons que l'on sait, que beaucoup regrettent aujourd'hui…Dans une vision très « russe » il nous livre aujourd'hui de la Symphonie « Leningrad » une interprétation plus que parfaite et consensuelle alliant la vision âpre, « à fleur de peau » des lectures russes les plus tendues avec la beauté et l'ampleur sonores d'un grand orchestre européen.

Originellement sous-titré Guerre, le premier mouvement s'ouvre sur des thèmes enjoués et lyriques recrutant les cordes graves, la flûte, le hautbois et le violon solo, évoquant une joie trompeuse devant un ciel apparemment serein légèrement teinté d'inquiétude, avant qu'un discret roulement de caisse claire ne marque le début d'une inexorable et formidable marche sur le thème obsédant de l'invasion, circulant de pupitre en pupitre avec une amplification orchestrale comparable au Boléro de Ravel. On y admire la clarté de la mise en place, la dynamique soutenue, plus douloureuse qu'hypnotique, ainsi que la tension et le poids que le chef transmet aux pupitres de cordes. C'est ensuite au tour des cuivres et des percussions de participer d'un grand fracas orchestral qui détruit tout sur son passage ne laissant après lui qu'une terre musicale désolée où ne subsistent que les quelques plaintes agoniques de la flute, de la clarinette et du basson et un court épisode lyrique aux cordes vite interrompu par le retour du sinistre thème. Devant ce maelstrom sonore  dissonant que rien ne semble pouvoir arrêter, on est paradoxalement séduit par la sobriété et l'économie de moyen de la direction de qui sculpte la pâte sonore, à mains nues, avec une gestique souple et précise en s'aidant ici d'un regard ou d'un mouvement de tête…

Le deuxième mouvement, Réminiscence, convoque les violons sur des pizzicati des cordes graves avant de réunir le quatuor autour de la cantilène mélancolique du hautbois dans un chant élégiaque dont le phrasé va progressivement se creuser pour devenir une plainte rageuse et affligée où s'invite le tutti chargé de violence et d'interjections stridentes des bois.

L'Adagio suivant s'ouvre sur un imposant choral de vents auquel s'adjoignent rapidement des cordes lyriques et tendues dans une sombre déploration recueillie, sans une once de pathos, puis le discours va se faire plus allègre sur un rythme de marche aux ostinatos martelés, témoins d'une humanité qui refuse de mourir, tandis qu'un émouvant solo du pupitre d'altos porte l'émotion à son acmé dans une sorte de requiem à vous tirer les larmes.

Dans une subtile transition le quatrième mouvement, Victoire, joué enchainé, bâti sur un ambigu crescendo expressif, hésitant entre victoire et anéantissement, soutenu par un phrasé pesant et chaotique, fait encore une fois la part belle aux cordes, contrebasses, percussions et cuivres, avant une coda suffocante de tension qui conclut en beauté cette magnifique interprétation.

Crédit photographique : © Romain Alcaraz

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