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Le Pierrot lunaire de l’Ensemble Op.Cit avec (et sans) Jessica Martin-Maresco

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Arnold Schönberg (1874-1951) : Pierrot lunaire op.21, pour voix parlée, piano, flûte (et piccolo), clarinette (et clarinette basse), violon (et alto), violoncelle ; version française de Guillaume Bourgogne d’après la traduction allemande d’Otto Erich Hartleben. Pierrot lunaire op.21 : partie instrumentale. Jessica Martin-Maresco, soprano ; Ensemble Op.Cit : Sabine Tavenard, flûte et piccolo ; Christian Laborie, clarinette et clarinette basse ; Claudine Simon, piano ; Albane Genat, violon et alto ; Nicolas Cerveau, violoncelle. Direction, Guillaume Bourgogne. 1 CD Klarthe. Enregistré les 26 et 27 juin 2022 aux Studios de l’Hacienda, Saint-Colombe-sur-Grand (Loire). Notice de présentation en français et en anglais. Durée : 74:00

 
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L'entreprise est risquée mais le projet mené de main de maître par et ses musiciens d'Op.Cit qui nous proposent dans ce nouvel enregistrement deux inédits : une adaptation française du Pierrot lunaire de Schönberg au côté de la version instrumentale du « Pierrot » sans la voix.

Deux choses importaient à dans cette aventure : d'une part, le fait de réaliser sa propre traduction des poèmes d'Otto Erich Hartleben (eux-mêmes issus des originaux français d'Albert Giraud) en se tenant au plus près de la prosodie de Schönberg, travail qu'il réalise en 2014 pour le spectacle « Cabaret lunaire » ; le choix, d'autre part, d'une voix parlée, celle de , chanteuse de la scène jazz/punk-rock lyonnaise, tirant la technique du Sprechgesang (parlé-chanté) vers la déclamation théâtrale. Rappelons que l'œuvre a été commandée à Schönberg par la diseuse Albertine Zehme. Le compositeur s'est exprimé à ce sujet : il demande à l'interprète de respecter le rythme avec précision, « comme si l'on chantait, c'est-à-dire, sans plus de liberté que dans le cas d'une mélodie chantée ; mais en étant conscient de la différence entre note chantée et note parlée […] La différence entre la manière ordinaire de parler et celle utilisée dans une forme musicale doit être évidente. En même temps, elle ne doit jamais rappeler le chant. »

On ne pourrait mieux résumer les options prises par (chanteuse mais aussi performeuse et compositrice) dans les 21 mélodrames du « Pierrot » présentés en trois parties de sept poèmes chacune ; elle est respectueuse à la lettre du rythme de la partie vocale tandis que les inflexions de la voix se calquent sur le mouvement mélodique noté par Schönberg (avec des croix sur la hampe des notes) en atteignant les hauteurs sans les garder. L'amplitude de la voix parlée, étonnante chez l'interprète, a ses limites que outrepasse parfois à dessein : la voix « craque » sur le mot « déborde » dans le n°1 (Ivresse de lune). Elle passe du hurlement au chuchotement dans La tache de lune (n°15), cherche une couleur ou un grain laryngé pour rejoindre l'univers instrumental. Complice du violoncelle au début du 17 (Parodie), la voix s'envole sur certains mots, elle est « dans le masque » (proche du chant) lorsque la tessiture est plus élevée (Madonna) ; elle chantonne même dans le vingt-et-unième et dernier mélodrame (Ô vieux parfum). Les ressorts de la mélodie parlée sont nombreux et l'emphase expressionniste recherchée (dans la seconde partie surtout), sollicitant le passage entre technique de gorge et projection du chant, dans le respect de l'écriture schönbergienne, tels ces « tremblements » demandés à la fin du 7 (Lune malade) ou sur le mot « tendre » dans le 16 (Vilénie).

« La deuxième partie du CD, sans la voix, s'apparente à la face B des 45 tours de notre enfance sur laquelle il y avait « l'instru » qui permettait de s'essayer à chanter la chanson de la face A avec le seul accompagnement, bien avant que le karaoké ne devienne populaire », nous confie . « D'ailleurs ne parle-t-on pas de « Quintette Pierrot » pour désigner la formation de chambre emblématique (cinq instrumentistes et huit instruments) la plus couramment utilisée encore aujourd'hui », renchérit-il. L'expérience d'écoute est des plus convaincantes, faisant pleinement apprécier l'invention des figures, le choix des alliages de timbres et la minutie de l'écriture avec laquelle Schönberg cisèle ses miniatures et sollicite la part virtuose de chacun : le violon de Colombine (Albane Genat), la flûte de Lune malade (Sabine Tavenard), le piano sur trois portées des Croix (Claudine Simon), le violoncelle de la Sérénade (Nicolas Cerveau), les canons qui fusent entre flûte et clarinette (Christian Laborie) et l'étirement maximal des tessitures, des profondeurs abyssales du piano (Nuit) à l'irradiance du piccolo (Rote Messe). L'interprétation est au cordeau, les tempi finement ajustés et l'écoute captive dans cette version inédite du « Pierrot ».

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Arnold Schönberg (1874-1951) : Pierrot lunaire op.21, pour voix parlée, piano, flûte (et piccolo), clarinette (et clarinette basse), violon (et alto), violoncelle ; version française de Guillaume Bourgogne d’après la traduction allemande d’Otto Erich Hartleben. Pierrot lunaire op.21 : partie instrumentale. Jessica Martin-Maresco, soprano ; Ensemble Op.Cit : Sabine Tavenard, flûte et piccolo ; Christian Laborie, clarinette et clarinette basse ; Claudine Simon, piano ; Albane Genat, violon et alto ; Nicolas Cerveau, violoncelle. Direction, Guillaume Bourgogne. 1 CD Klarthe. Enregistré les 26 et 27 juin 2022 aux Studios de l’Hacienda, Saint-Colombe-sur-Grand (Loire). Notice de présentation en français et en anglais. Durée : 74:00

 
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